Contexte: Consultations publiques sur de nouvelles mesures possibles pour défendre et faire avancer les intérêts du Canada en matière de sécurité économique
Le gouvernement du Canada sollicite des avis sur la protection et la promotion de la sécurité économique du Canada.
Situation actuelle au Canada
Le commerce fait partie intégrante de l’économie canadienne. En effet, il représente les deux tiers du PIB du Canada alors que les exportations soutiennent à elles seules près de 3,3 millions d’emplois canadiens, soit 1 emploi sur 6. En tant que nation commerçante, le Canada dépend et tire avantage d’un ensemble de règles et d’institutions qui procurent la certitude et la stabilité voulues pour les entreprises canadiennes dans les échanges commerciaux et les investissements internationaux.
Dans le monde d'aujourd'hui, les perturbations dans les chaînes d'approvisionnement, la montée globale du protectionnisme et des pratiques commerciales déloyales menacent de compromettre l'accès du Canada à des marchés ouverts, la fiabilité de nos chaînes d'approvisionnement, ainsi que notre sécurité nationale. S'ils ne sont pas surmontés, ces défis peuvent nuire à la compétitivité du Canada, entraîner la perte d’emplois et nuire à notre prospérité économique future.
Le Canada dispose d'une gamme d'outils pour protéger et promouvoir notre sécurité économique et notre prospérité, dont des mesures intégrées dans nos lois et cadres législatifs existants relatifs au commerce et aux investissements, ainsi que des politiques favorisant la diversification des échanges, l'attraction des investissements et le soutien de la compétitivité de nos industries. Dans le cadre des présentes consultations, le gouvernement a identifié une série de domaines dans lesquels nous pourrions éventuellement nous appuyer sur cette boîte à outils.
Le gouvernement sollicite aussi des avis sur les risques et les menaces qui pèsent sur la sécurité économique du Canada, les lacunes à combler dans les moyens dont dispose le Canada pour se protéger contre ces risques et menaces et l’incidence probable de nouvelles approches possibles sur les importateurs, les exportateurs, l’industrie et le public canadiens.
Les présentes consultations portent sur l’ensemble des outils dont dispose le Canada pour assurer sa sécurité économique, à l’égard de divers partenaires et secteurs, afin que le Canada soit prêt à faire face à un large éventail de menaces d’ordre économique. Ces consultations sont distinctes des consultations sur les réponses possibles aux pratiques commerciales déloyales de la Chine concernant les véhicules électriques, qui se sont achevées le 1er août 2024.
Les outils dont dispose le Canada pour assurer sa sécurité économique
Le Canada dispose de nombreux outils et instruments importants qu’il peut utiliser avec souplesse pour défendre ses intérêts économiques, par exemple :
- La Loi sur les mesures spéciales d’importation permet l’imposition de droits antidumping ou compensateurs à l’issue d’enquêtes indépendantes menées par l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) et le Tribunal canadien du commerce extérieur (TCCE), généralement en réponse à des plaintes formelles de l'industrie. Des droits peuvent être imposés lorsqu’il est constaté que les importations font l’objet soit d’un dumping déloyal (produits vendus aux importateurs à un prix inférieur à celui pratiqué dans le pays d’exportation ou à un prix ne permettant pas de réaliser un bénéfice), soit de subventions déloyales de la part d’un gouvernement étranger, et qu’elles causent un dommage ou un retard ou menacent de causer un dommage à l’industrie canadienne.
- La Loi sur les licences d’exportation et d’importation permet au gouvernement d’inscrire certaines marchandises sur la Liste des marchandises d’importation contrôlée (LMIC) ou sur la Liste des marchandises et technologies d’exportation contrôlée (LMTEC) à diverses fins, notamment pour assurer la sécurité nationale, faciliter la mise en œuvre d’autres lois (comme le Tarif des douanes) ou surveiller les échanges commerciaux. Une fois qu’un produit est inscrit sur la LMTEC ou la LMIC, il est nécessaire d’obtenir une licence délivrée par la ministre des Affaires étrangères pour pouvoir exporter ce produit à partir du Canada ou l’importer au pays.
- L’article 55 du Tarif des douanes permet d’appliquer des mesures de sauvegarde globales aux importations de toutes provenances à la suite d’une enquête du TCCE, lorsqu’une augmentation subite des importations cause un dommage grave ou menace de causer un dommage grave à l’industrie canadienne. Dans des circonstances critiques, le gouvernement peut imposer des mesures provisoires (p. ex. surtaxe ou contingent tarifaire) sur la base d’un rapport de la ministre des Finances. La prise de ces mesures doit être suivie d’une enquête du TCCE pour établir s’il convient d’appliquer des mesures de sauvegarde à plus long terme.
- L’article 53 du Tarif des douanes permet au gouvernement de prendre des mesures pour faire respecter les droits du Canada découlant d’un accord commercial ou de réagir « aux actes, politiques ou pratiques du gouvernement d’un pays qui soit nuisent au commerce des marchandises ou services du Canada, soit provoquent directement ou indirectement des effets nocifs à cet égard ». Les mesures prises pourraient comprendre l’imposition d’une surtaxe ou d’un contingent tarifaire ou encore la suspension (en tout ou en partie) des droits accordés à un autre pays dans un accord commercial.
- La Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur établit le TCCE et ses divers mandats en tant que tribunal quasi judiciaire indépendant ayant compétence relativement aux échanges commerciaux du Canada. Outre le rôle du TCCE dans les enquêtes sur les recours commerciaux et les mesures de sauvegarde globales mentionnées ci-dessus, les articles 18 et 19 de la Loi sur le TCCE permettent également au gouvernement d’ordonner au TCCE d’enquêter et de faire des recommandations sur des questions économiques, commerciales ou tarifaires.
- La Loi sur Investissement Canada (LIC) permet au gouvernement d’examiner les investissements étrangers de toute taille, afin de vérifier qu’ils ne nuisent pas à la sécurité nationale du Canada. La LIC permet également au gouvernement fédéral d’examiner les investissements les plus importants faits au Canada par des non-Canadiens afin de s’assurer qu’ils profitent à l’économie canadienne. Un ont été publiés pour préciser la façon dont la LIC peut s’appliquer à certains investissements étrangers.
- La Loi sur les mesures économiques spéciales permet au gouvernement d’imposer des sanctions. Les sanctions restreignent les activités permises entre les Canadiens et des États, entités ou individus étrangers. Elles peuvent englober une grande variété de mesures, y compris, mais sans s’y limiter, des restrictions financières, des restrictions de voyage, des embargos sur les armes, des restrictions à l’exportation et à l’importation, des interdictions d’expédition et la suspension de l’assistance technique à un pays. Des sanctions peuvent être imposées lorsqu’une organisation internationale dont le Canada fait partie demande à ses membres de prendre des mesures économiques contre un État étranger, ou dans les cas où il s’est produit une rupture sérieuse de la paix et de la sécurité internationales, des violations graves et systématiques des droits de la personne ou, encore, des actes de corruption à grande échelle impliquant un agent public étranger ou des personnes qui lui sont associées.
- La Loi sur la protection de l’information érige en infraction le vol de secrets industriels par des personnes agissant sur l’ordre d’une entité économique étrangère, en collaboration avec elle ou pour son profit.
- Les Lignes directrices sur la sécurité nationale pour les partenariats de recherche intègrent la prise en compte de la sécurité nationale dans l’établissement, l’évaluation et le financement des partenariats de recherche. Ces lignes directrices visent à rendre les chercheurs et les organismes subventionnaires fédéraux mieux en mesure de déceler et d’atténuer les risques pour la sécurité nationale liés à des activités de recherche, notamment au moyen d’un processus obligatoire d’évaluation des risques dans le contexte de certains programmes de subvention fédéraux.
- Conformément à la Politique sur la recherche en technologies sensibles et sur les affiliations préoccupantes, le gouvernement fédéral ne finance pas de recherches dans des domaines liés à des technologies sensibles si l’un des chercheurs participants est affilié à des organisations rattachées à des entités de sécurité d’État qui pourraient présenter un risque pour la sécurité nationale du Canada.
Le Canada est aussi en train de moderniser des outils existants dans des domaines clés :
- Selon l’Énoncé de politique sur l’obtention d’un traitement réciproque pour les entreprises canadiennes à l’étranger (2023), le Canada considère désormais la réciprocité comme un élément clé de la conception des nouvelles politiques, afin de s’assurer que ses partenaires commerciaux accordent aux entreprises canadiennes le même accès dont leurs entreprises bénéficient au Canada. Cette ligne de conduite s’appliquera dans une foule de domaines, y compris, mais sans s’y limiter, les marchés publics, les incitations fiscales à l’investissement, les subventions et contributions, les obstacles techniques au commerce, les mesures sanitaires et phytosanitaires, les restrictions à l’investissement et les exigences en matière de propriété intellectuelle.
- Le projet de loi C-34, qui vise à moderniser les dispositions de la Loi sur Investissement Canada sur les examens relatifs à la sécurité nationale, a reçu la sanction royale en mars 2024 et certaines nouvelles dispositions qui en découlent entreront en vigueur le 3 septembre 2024. Parmi les modifications apportées à la Loi, mentionnons entre autres les nouveaux pouvoirs permettant au ministre de l’Innovation, des Sciences et de l’Industrie de prendre certaines mesures (p. ex., prolonger l’examen, recevoir des engagements écrits) qui relevaient auparavant du gouverneur en conseil. De nouvelles exigences relatives aux avis à envoyer lorsque des secteurs sensibles sont en cause, ainsi que de nouvelles pénalités seront établies par règlement.
- En 2024, le Canada a mis en place un système de collecte et de publication de données sur les pays de fonte et de coulage de l’acier importé pour accroître la transparence des chaînes d’approvisionnement dans le secteur de l’acier et permettre à l’industrie de suivre en temps réel les tendances possibles. De plus, le Canada a achevé en juin 2024 des consultations publiques sur la collecte et la publication possibles de renseignements sur les pays de fusion et de moulage de certains produits d’aluminium importés.
- Depuis 2018, le Canada a pris une série de mesures pour renforcer son régime de recours commerciaux, notamment en se dotant de nouveaux outils pour lutter contre le commerce déloyal de produits venant fausser le marché, en intensifiant la lutte contre les infractions et le contournement des règles, et en permettant une plus grande prise en compte des intérêts des travailleurs. Tout récemment, dans le budget de 2024, le gouvernement a annoncé la création d’une unité spécialisée au sein de l’ASFC, qui sera chargée de surveiller les mesures de recours commerciaux et de les mettre à jour chaque année, afin que les droits appliqués soient représentatifs des conditions du marché et pour mieux protéger les entreprises canadiennes contre les pratiques commerciales déloyales.
- En juillet 2020, le Canada est devenu le 2e pays du monde, après les États-Unis, à interdire l’importation de biens issus du travail forcé, quel que soit le pays d’origine, concrétisant ainsi un engagement pris dans le chapitre sur le travail de l’Accord Canada–États-Unis–Mexique (ACEUM). Depuis, les budgets de 2023 et de 2024 ont réitéré l’intention du gouvernement fédéral de présenter un projet de loi en 2024 pour contribuer à éradiquer le travail forcé des chaînes d’approvisionnement canadiennes et renforcer l’interdiction d’importation de biens issus du travail forcé.
Le Canada collabore aussi avec des partenaires clés au sujet de la sécurité économique et de la résilience des chaînes d’approvisionnement :
- En juin 2023, le Canada a adhéré à la Déclaration commune contre la coercition économique liée au commerce et les politiques et pratiques contraires au marché, aux côtés des États-Unis, du Royaume-Uni, de la Nouvelle-Zélande, du Japon et de l’Australie.
- Le Canada a joué un rôle central dans l’élaboration de la Déclaration des dirigeants du G7 sur la résilience et la sécurité économiques, publiée en 2023 sous la présidence japonaise du G7 et poursuivie sous la présidence italienne.
- Le Canada et les États-Unis ont formé le Groupe de travail sur la transformation de l’énergie afin d’intensifier la coopération à l’égard de possibilités cruciales liées à l’énergie propre et de renforcer les chaînes d’approvisionnement intégrées entre les deux pays.
- En mai 2023, le Canada a signé un nouvel accord de coopération avec la Corée du Sud sur les chaînes d’approvisionnement en minéraux critiques, la transition vers l’énergie propre et la sécurité énergétique, et a lancé un dialogue de haut niveau sur la sécurité économique avec ce pays.
Améliorer la trousse d’outils du Canada
Le Canada cherche à savoir s’il lui faut améliorer cette trousse d’outils pour faire face efficacement à des pratiques économiques néfastes dans une conjoncture économique et géopolitique en évolution. Dans ce contexte, le Canada sollicite des avis sur les avantages et les risques possibles des mesures suivantes :
- Suspension des avantages (mesure autre que l’imposition d’une surtaxe) : en réponse à des mesures commerciales qui nuisent au Canada, serait-il envisageable de suspendre des avantages non liés aux droits de douane ayant été accordés dans un accord de libre-échange?
- Recours commerciaux : comment pourrait-on renforcer les pouvoirs en matière de recours commerciaux (p. ex. pour lutter contre les infractions et le contournement des règles) pour mieux protéger l’industrie canadienne contre les importations subventionnées ou faisant l’objet d’un dumping déloyal qui lui nuisent?
- Pouvoirs d’enquête : quels nouveaux types d’enquêtes ou d’examens administratifs ou quasi judiciaires faudrait-il pour atteindre les objectifs de résilience économique?
- Renforcement des chaînes d’approvisionnement : quelles politiques le Canada pourrait-il adopter (p. ex. restreindre l’admissibilité à des incitatifs ou à d’autres avantages en matière de commerce et d’investissement) pour renforcer ses chaînes d’approvisionnement de certains produits, notamment dans des secteurs critiques ou stratégiques, et limiter l’approvisionnement de ces produits auprès d’entités qui présentent des risques pour les intérêts essentiels de sa sécurité?
- Élargissement des incitatifs et des crédits d’impôt canadiens : serait-il envisageable d’élargir les incitatifs visant des secteurs ciblés afin d’améliorer leur position concurrentielle (p. ex. projets canadiens liés aux minéraux critiques)?
- Réglementation du commerce : pour que le régime de contrôles à l’exportation prévu par la Loi sur les licences d’exportation et d’importation (L.R.C. 1985, ch. E-19) continue de remédier aux risques pour la sécurité nationale posés par les exportations de technologies de pointe à double usage, faudrait-il envisager l’ajout d’autres articles critiques ou stratégiques sur la Liste des marchandises et technologies d’exportation contrôlée ou la Liste des marchandises d’importation contrôlée, y compris en tenant compte des cas où une surveillance accrue pourrait être nécessaire?
- Droits à l’exportation : faudrait-il envisager d’accroître ou de modifier les pouvoirs d’imposer des droits ou des restrictions à l’exportation de certains produits dans des secteurs critiques ou stratégiques en réponse aux mesures commerciales d’autres pays ou pour assurer la sécurité économique du Canada (p. ex. en modifiant la Loi sur les mesures économiques spéciales ou la Loi sur les exportations) ou d’adopter de nouvelles lois ciblées visant des secteurs particuliers comme celui des minéraux critiques? Tenez compte de critères précis qui pourraient justifier l’imposition de droits à l’exportation ou, encore, de produits sur lesquels il faudrait se concentrer pour protéger la sécurité économique du Canada.
- Investir dans la résilience des chaînes d’approvisionnement en minéraux critiques : par quelles mesures ou quels mécanismes de financement pourrait-on atténuer la volatilité des prix et favoriser la diversification des chaînes d’approvisionnement en minéraux critiques, y compris au moyen du financement accordé par des sociétés d’État fédérales (p. ex. Exportation et développement Canada et la Banque de développement du Canada) ou d’autres mécanismes visant à soutenir des investissements directs canadiens ciblés dans des projets stratégiques au pays et à l’étranger? Serait-il envisageable que des minéraux critiques précis ou des matières connexes soient détenus par des acteurs des secteurs public et privé afin de renforcer la sécurité économique et nationale du Canada et de prévenir des pénuries?
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