Rapport de consultation et revision de l’APIE 2019
Résumé
Le présent rapport résume la méthodologie et les résultats des consultations qui ont été lancées à l’été de 2018 dans le cadre du processus de révision du modèle d’Accord sur la promotion et la protection des investissements étrangers (APIE) du Canada.
Il décrit la méthodologie utilisée et les différentes approches adoptées pour mobiliser le public et les parties prenantes clées (p. ex. entreprises, organisations syndicales ) ainsi que les gouvernements provinciaux et territoriaux et les partenaires autochtones. Les points de vue ont été obtenus par l’entremise de consultations en ligne et en personne, de rencontres avec les provinces, les territoires et les partenaires autochtones, de tables rondes et d’observations écrites de différentes parties prenantes.
Le rapport présente les réactions recueillies auprès de 255 personnes de partout au Canada qui ont soumis des commentaires sur la plateforme PlaceSpeak et de 27 particuliers et organismes qui ont transmis des courriels et des lettres sur la façon dont les sujets ci-après devraient être abordés dans le nouvel APIE modèle du Canada : règlement des différends entre investisseurs et États (RDIE); petites et moyennes entreprises (PME); responsabilité sociale des entreprises (RSE); réglementation dans l’intérêt public; entreprises et peuples autochtones; et autonomisation économique des femmes. Ces questions ont aussi été abordées lors des réunions en personne.
Les commentaires reçus indiquent que les investisseurs et groupes d’entreprises canadiens continuent d’être très favorables à l’inclusion du mécanisme de RDIE dans les APIE, car le RDIE aide à atténuer les risques associés à l’investissement dans les pays étrangers. Un tel mécanisme permet aux investisseurs canadiens d’avoir accès à un forum neutre et objectif pour régler les différends. La société civile, les ONG, les organisations syndicales, les partenaires autochtones et certains groupes de réflexion ont exprimé des réserves à l’égard du RDIE. Ils ont notamment fait valoir la perception que ce mécanisme est incompatible avec la promotion d’un commerce inclusif, et qu’il mène à un « gel réglementaire », empêchant ainsi les gouvernements de réglementer et d’appliquer la réglementation dans l’intérêt public (p. ex. règlements en matière de santé et d’environnement).
Les résultats ont également révélé un soutien accru envers l’intégration d’éléments du commerce inclusif destinés à promouvoir les peuples et entreprises autochtones, l’autonomisation économique des femmes, les PME, la RSE et la réglementation dans l’intérêt public dans un APIE modernisé.
Révision en vue de la modernisation de l’APIE : Consultations publiques – Ce que nous avons entendu
Introduction
La dernière fois que le Canada a entrepris une révision importante de son APIE modèle était en 2003. À l’époque, le Canada avait mis à jour le modèle en s’inspirant principalement de l’expérience de mise en œuvre du chapitre portant sur l’investissement de l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA). Les leçons tirées des arbitrages d’investissement en vertu du chapitre 11 de l’ALENA de 1994 ont été instructives.
Depuis la révision de 2003, l’approche du Canada envers la politique commerciale sur l'investissement a encore évolué. La conclusion d’accords de libre-échange marquants comme l’Accord économique et commercial global (AECG) entre le Canada et l’Union européenne, l’Accord de partenariat transpacifique global et progressiste (PTPGP) et l’Accord Canada-États-Unis-Mexique (ACEUM), ainsi que la politique du gouvernement visant à promouvoir le commerce inclusif, a signalé la nécessité de réexaminer encore une fois le programme d’APIE du Canada et de le moderniser.
La Direction de la politique commerciale sur l’investissement d’Affaires mondiales Canada (AMC) a lancé un processus de consultation en août 2018 afin d’élaborer un APIE modèle modernisé et inclusif. Les consultations visaient à recueillir des idées sur la façon d’actualiser le traité pour tenir compte des innovations des grands accords de libre-échange, tout en cherchant aussi à obtenir des commentaires sur l’intégration des dispositions pour veiller à ce que l’ensemble des Canadiens, y compris les femmes, les Autochtones et les propriétaires de petites et moyennes entreprises, profitent mieux des accords d’investissement du Canada.
Méthodologie
Différentes approches ont servi à éclairer le processus de modernisation de l’APIE :
- Un processus de consultation publique (du 14 août 2018 au 28 octobre 2018) utilisant un outil en ligne (« PlaceSpeak ») qui a recueilli les points de vue de 255 personnes à travers le Canada. Les points de vue des Canadiens ont été sollicités au moyen de questions de discussion concernant un éventail de thèmes, comme le RDIE, la RSE, les droits des peuples autochtones et l’autonomisation économique des femmes.
- Des observations écrites (27 ont été reçues) émanant d’intervenants canadiens, notamment d’universitaires, de membres de la société civile et d’organisations syndicales, d’associations professionnelles, de fonds de pension et de praticiens du droit, ainsi que de partenaires autochtones.
- Des réunions avec des partenaires autochtones et un large éventail de parties prenantes, notamment, des entreprises et associations canadiennes, des groupes d’investisseurs (p. ex. fonds de pension), des ONG et des praticiens du droit.
- En octobre 2018, une table ronde sur l’APIE coprésidée par l’honorable Jim Carr, ministre de la Diversification du commerce international, et par Sean Fraser, député de Central Nova. Cet événement a donné l’occasion à un grand nombre de diverses parties prenantes d’exprimer leurs points de vue concernant la modernisation du programme d’APIE du Canada.
- Des consultations avec les provinces et les territoires (PT); plusieurs PT ont fait parvenir des observations écrites afin de communiquer leurs points de vue concernant la modernisation de l’APIE.
Le présent rapport offre un aperçu et un résumé des points de vue exprimés à travers le processus de consultations publiques. Il s’articule autour de six thèmes : (1) règlement des différends entre investisseurs et États; (2) petites et moyennes entreprises; (3) responsabilité sociale des entreprises; (4) réglementation dans l’intérêt public; (5) entreprises et peuples autochtones; et (6) autonomisation économique des femmes.
1. Règlement des différends entre investisseurs et États
Quatre-vingts (80) commentaires ont été reçus des parties prenantes et du public concernant le règlement des différends entre investisseurs et États (RDIE) : 56 commentaires au moyen de PlaceSpeak et 24 commentaires reçus par l’entremise de courriels, de lettres et de rencontres personnelles. La communauté universitaire était divisée en ce qui a trait au soutien au RDIE, la société civile et les ONG se montraient généralement critiques envers le RDIE, tandis que les groupes d’entreprises et les investisseurs canadiens étaient en faveur de ce mécanisme. Plusieurs suggestions ont été faites pour améliorer le fonctionnement du RDIE.
Quelques-uns des points de vue exprimés lors des consultations :
- Le Canada devrait s’éloigner du RDIE ou le supprimer dans les traités sur les investissements puisque le RDIE : manque de transparence; confère des droits aux investisseurs étrangers qui sont supérieurs à ceux offerts aux investisseurs nationaux; et fait en sorte que les droits des investisseurs sont protégés aux dépens des droits de la personne, de la durabilité de l’environnement, de la santé, de la protection des travailleurs et des droits des peuples autochtones.
- Le mécanisme traditionnel du RDIE protège les investisseurs canadiens contre les risques d’investir à l’étranger en leur donnant accès à un forum neutre, en cas de différend.
- Il importe de maintenir un mécanisme de RDIE robuste dans les APIE puisqu’un tel mécanisme procure une meilleure prévisibilité et une certitude accrue aux entreprises qui investissent à l’étranger.
- Le RDIE met en péril la réglementation dans l’intérêt public et entraîne un « gel réglementaire », en plus de favoriser les droits des investisseurs étrangers sans les tenir responsables de leurs pratiques commerciales d’entreprises (p. ex. protection des travailleurs et durabilité de l’environnement).
- Les APIE devraient accroître la transparence et chercher à reproduire le principe de la publicité des débats du droit canadien (p. ex. que les procédures judiciaires soient ouvertes et accessibles au public).
- On devrait envisager des mécanismes alternatifs de règlement des différends (p. ex. arbitrage d’État à État, médiation, conciliation) ou une initiative de tribunal multilatéral des investissements.
- Il est nécessaire d’établir un meilleur équilibre entre la protection des investisseurs et le droit des gouvernements de réglementer dans l’intérêt public. Nous avons notamment reçu des commentaires constructifs concernant les options d’ « épuisement des recours locaux » et la participation de tiers dans les procédures de RDIE comme façon d’accroître la transparence du RDIE.
- Il est impératif de préserver les principales obligations des APIE comme la protection contre la discrimination sur la base de la nationalité, la protection contre le traitement arbitraire des investisseurs ou la capacité des investisseurs de rapatrier les bénéfices.
- Si le RDIE est maintenu dans l’APIE, les mesures faisant la promotion des droits des peuples autochtones devraient être exemptées de ce mécanisme.
- Les APIE ne devraient pas empêcher les gouvernements de poursuivre des politiques légitimes dans l’intérêt public.
- Les alternatives et améliorations recommandées au mécanisme de RDIE incluaient :
- exigence du Canada que le système judiciaire des partenaires d’APIE atteignent un certain standard, en tant que condition préalable à la considération d’un accord d’investissement;
- dispositions explicites concernant le droit de l’État de réglementer dans l’intérêt public;
- élaborer des principes d’éthique clairs pour les arbitres;
- prévenir le chalandage de traités (« treaty shopping ») opportuniste de la part des investisseurs;
- prise en considération de la possibilité de créer un mécanisme d’appel;
- créer un mécanisme permettant aux États parties au traité de fournir une interprétation contraignante concernant les dispositions du traité;
- exempter du RDIE les programmes sociaux et les mesures de protection de l’environnement;
- introduire une procédure indépendante de dépistage visant la détection des causes frivoles;
- utiliser une liste d’arbitres déterminée à l’avance pour améliorer la cohérence des décisions arbitrales;
- examiner les activités rémunérées externes des arbitres pour repérer les éventuels conflits d’intérêts;
- inclusion de lignes directrices qui favorisent le règlement efficace et rapide des différends.
2. Petites et moyennes entreprises
Vingt-sept (27) commentaires ont été reçus des parties prenantes et du public concernant les PME – 19 commentaires au moyen de PlaceSpeak et 8 commentaires par l’entremise de courriels, de lettres et de rencontres personnelles. La perception générale était que les PME ne profitent pas traditionnellement des APIE. La perception globale était que le gouvernement a un rôle important à jouer pour soutenir les PME afin qu’elles puissent profiter des débouchés à l’étranger. Parmi les idées proposées à ce sujet, on compte le fait d’élaborer des obligations des APIE d’une manière qui reflète mieux les défis auxquels sont confrontées les PME canadiennes qui veulent faire des affaires à l’étranger.
Quelques-uns des points de vue exprimés lors des consultations :
- Les dispositions des APIE devraient être mieux conçues pour refléter les besoins et les défis rencontrés par des PME.
- En règle générale, les PME ne sont pas au courant des accords commerciaux et d’investissement, et une campagne de sensibilisation est nécessaire pour s’assurer que les PME comprennent mieux ces accords et en tirent parti une fois ceux-ci mis en place. Le gouvernement devrait coordonner le travail du Service des délégués commerciaux (SDC), d’Exportation et développement Canada et de la Banque de développement du Canada, afin que les PME puissent mieux tirer parti de ces services et accéder aux nouveaux marchés à l’étranger.
- Les intérêts des PME pourraient être mieux promus en subventionnant l’assurance contre le risque, en encourageant des politiques comme l’achat local, en appliquant les lois canadiennes de lutte contre la fraude et la corruption, et en diminuant les taxes.
- Les prescriptions de résultats pourraient s’avérer un instrument efficace pour promouvoir les intérêts des PME canadiennes. Ceci pourrait comprendre : demander aux investisseurs étrangers au Canada d’acheter des biens locaux auprès de PME canadiennes; permettre aux États parties d’appuyer le développement des entrepreneurs locaux et des PME; et préciser que certains types de prescriptions de résultats qui profitent aux PME devraient être autorisés en vertu de l’APIE.
- Le gouvernement pourrait envisager de jouer un rôle plus important pour aider les PME à soumettre une affaire en RDIE, notamment en accordant une aide financière ou un soutien aux PME pour présenter les revendications au moyen du système de règlement des différends d’État à État.
- Le SDC pourrait contribuer à faciliter l’augmentation des exportations des PME, à réduire la bureaucratie et à s’attaquer aux incertitudes et aux risques supplémentaires auxquels sont confrontées les PME.
- Il est possible que les APIE ne constituent pas le meilleur instrument pour promouvoir un programme commercial inclusif, y compris la promotion des PME.
3. Responsabilité sociale des entreprises (RSE)
Trente-deux (32) commentaires ont été reçus des parties prenantes et du public concernant la RSE – 26 commentaires au moyen de PlaceSpeak et 6 commentaires par l’entremise de courriels, de lettres et de rencontres personnelles. Dans l’ensemble, les réactions concernant la RSE étaient divisées entre ceux qui croient que le gouvernement ne devrait pas promouvoir les normes de RSE dans les APIE, et ceux qui sont d’avis que des dispositions plus strictes en matière de RSE sont nécessaires, y compris l’application de principes directeurs en matière de RSE pour les investisseurs (p. ex. pour tenir compte de secteurs comme le travail, l’environnement, l’égalité entre les sexes, etc.), voire même refuser d’accorder les avantages du traité à ceux qui enfreignent les principes directeurs établis.
Quelques-uns des points de vue exprimés lors des consultations :
- Certains étaient d’avis que le fait d’accorder des droits étendus aux investisseurs tout en assujettissant leur comportement commercial à des normes non contraignantes et non exécutoires n’était pas la bonne approche à adopter.
- Plusieurs ont proposé de renforcer des dispositions de RSE dans les prochains APIE (y compris les dispositions qui reconnaissent l’importance de l’Ombudsman canadien pour la responsabilité des entreprises) et la mise en place d’engagements contraignants et exécutoires en ce qui a trait au respect des droits du travail et de l’environnement, à la lutte contre la corruption et à la protection des droits de la personne. En revanche, il y avait également certaines personnes qui ont remis en question l’efficacité d’imposer des obligations en matière de RSE dans le cadre d’un APIE.
- Il a été suggéré que la disposition relative à la RSE était inefficace et devait tenir compte des lois nationales et internationales. Les suggestions pour la renforcer consistaient notamment à faire un renvoi à la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, aux droits de la personne, y compris les Principes directeurs de l’ONU relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme, au comportement commercial responsable des entreprises et au consentement libre, préalable et éclairé des AutochtonesNote de bas de page 1. Certains ont fait valoir que le Canada devrait veiller à ce que les investisseurs comprennent que le consentement libre, préalable et éclairé des Autochtones fait partie de leur engagement en matière de responsabilité sociale des entreprises; toutefois, certains se demandaient si l’APIE pourrait réellement être un outil utile à cet égard.
- Certains considéraient que le gouvernement devrait continuer à utiliser la terminologie de « meilleurs efforts » dans les APIE en ce qui a trait à la RSE.
- L’objectif fondamental des APIE est de protéger les investissements canadiens à l’étranger, et certains considéraient que les gouvernements ne devraient pas imposer de nouvelles obligations dans les APIE étant donné que de telles obligations pourraient rendre la conformité pour les entreprises canadiennes plus complexe et réduire l’utilité des APIE comme mécanisme d’atténuation des risques.
- Il a proposé que les investisseurs soient tenus d’établir un « processus de diligence raisonnable » et qu’ils subissent l’une ou l’autre des conséquences suivantes s’ils ne respectaient pas de tels principes directeurs: a) se voir refuser l’accès au RDIE; b) recevoir une demande reconventionnelle d’un État; c) subir une réduction de leur demande en dommages-intérêts par un montant proportionnel.
- Certains ont fait valoir que le Canada devrait participer activement à la coopération internationale avec les États partenaires pour promouvoir des politiques favorisant l’atteinte des objectifs de développement durable, y compris la RSE.
- On a aussi suggéré que le Canada devrait encourager l’adoption de principes développés au niveau multilatéral, tout en favorisant aussi l’adoption accrue des principes de lutte contre la corruption de l’OCDE dans les pays en développement.
4. Réglementation dans l’intérêt public
Quarante (40) commentaires ont été reçus des parties prenantes et du public concernant la réglementation dans l’intérêt public – 29 commentaires au moyen de PlaceSpeak et 11 commentaires par l’entremise de courriels, de lettres et de rencontres personnelles. Les réactions dans leur globalité faisaient état d’une préoccupation que les APIE, et particulièrement le RDIE, constituent une menace au droit d’un État de réglementer dans l’intérêt public. La majorité des commentaires ont réaffirmé que le droit de réglementer est important, et que les APIE devraient protéger expressément de tels droits dans les secteurs suivants : eau et protection de l’environnement, santé, droits de la personne, droits des travailleurs, sécurité, protection des consommateurs et respect de la vie privée.
Quelques-uns des points de vue exprimés lors des consultations :
- Les gouvernements doivent conserver la capacité de réglementer dans l’intérêt public d’une façon non discriminatoire, non arbitraire et transparente, et la meilleure manière d’y parvenir consiste à rédiger clairement les obligations de fond dans les APIE (p. ex. nation la plus favorisée, norme minimale de traitement et expropriation indirecte).
- Il est important de renforcer le droit de réglementer des gouvernements, notamment le droit de réglementer la santé, la sécurité des personnes et l’environnement, la protection des données et la confidentialité des données.
- Il est nécessaire d’inclure des dispositions qui clarifient que toute modification apportée à une loi nationale ne constitue pas en soi une violation de l’APIE.
- Les références propres au droit de réglementer devraient être incluses directement dans les dispositions de fond de l’APIE, comme le traitement national.
- La portée des exceptions générales devrait être clarifiée (p. ex. s’il s’agit d’exclusions ou de défenses affirmatives).
- Des préoccupations ont été soulevées concernant l’incidence du RDIE sur des secteurs d’intérêt public comme les droits de la personne, la santé, la protection des consommateurs, le travail et l’environnement.
- Certains considéraient que les APIE pourraient servir à promouvoir et à protéger les droits de la personne, y compris en réalisant une étude d’impact sur les droits de la personne, en élaborant une approche uniforme à l’égard des droits de la personne dans la politique sur l’investissement, et en exigeant des entreprises canadiennes qu’elles fassent preuve de diligence raisonnable en matière de droits de la personne dans le cadre de leurs activités.
- On a indiqué que les APIE sont intrinsèquement incompatibles avec la réglementation dans l’intérêt public, et qu’ils devraient être évités pour des raisons de politique publique vu leur incidence négative alléguée sur le devoir des gouvernements de réglementer dans l’intérêt public.
- Parmi les suggestions qui ont été faites sur la façon d’intégrer la réglementation dans l’intérêt public dans les APIE, on compte : appuyer des exceptions au RDIE lorsqu’approprié, comme l’exception liée aux produits du tabac du PTPGP; envisager la possibilité de faire en sorte que les causes en RDIE soient assujetties à l’épuisement des recours internes; limiter la portée du RDIE (ou l’éliminer complètement); imposer aux investisseurs étrangers le fardeau de démontrer que leur investissement ne sera pas préjudiciable à l’environnement et à la santé des Canadiens.
5. Entreprises appartenant à des Autochtones et peuples autochtones
Vingt (20) commentaires ont été reçus des partenaires autochtones, des parties prenantes et du public concernant la façon dont les APIE peuvent mieux tenir compte des intérêts des peuples autochtones et des entreprises appartenant à des Autochtones – 10 commentaires au moyen de PlaceSpeak et 10 commentaires par l’entremise de courriels, de lettres et de rencontres personnelles. Dans l’ensemble, les commentaires reçus ont fait valoir que la protection des droits des peuples autochtones et la promotion des entreprises appartenant à des Autochtones devraient être une priorité lors de la négociation d’un APIE. Ceci implique notamment un engagement significatif avant la négociation de tout APIE, ainsi que l’inclusion de dispositions particulières destinées à protéger les droits et les intérêts des peuples autochtones.
Quelques-uns des points de vue exprimés lors des consultations :
- Les politiques d’investissement devraient être harmonisées avec les obligations du Canada en vertu de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones (et inclure un renvoi à celles-ci). On a aussi proposé que les investissements étrangers ne soient pas autorisés à aller de l’avant si les investisseurs ne respectent pas les principes de cette Déclaration.
- Une étude d’impact sur les droits de la personne devrait être réalisée avant la négociation d’un APIE en mettant l’accent sur les effets préjudiciables éventuels pour les peuples autochtones.
- Les APIE pourraient ne pas être le meilleur instrument pour promouvoir un programme commercial inclusif, y compris les intérêts des peuples autochtones et des entreprises appartenant à des Autochtones.
- Il est nécessaire de promouvoir le respect et la protection des droits des peuples autochtones au Canada et à l’étranger, notamment en ce qui a trait aux terres, aux personnes, aux communautés, à la justice environnementale, à l’accès à l’eau, à la nourriture, au logement, à la santé, à l’éducation et aux emplois.
- On devrait véritablement consulter de manière significative les peuples autochtones avant de conclure un accord d’investissement.
- Les investisseurs étrangers opérant au Canada devraient être encouragés à entamer un dialogue avec les Premières Nations pour ce qui est de leurs investissements, et le gouvernement fédéral devrait faire en sorte qu’il soit obligatoire pour les programmes d’approvisionnement des entreprises de favoriser la participation avec les groupes des Premières Nations.
- Le modèle de processus d’approvisionnement du secteur des ressources pourrait représenter un bon exemple d’approche que les gouvernements pourraient adopter dans les APIE puisque beaucoup d’activités entreprises par les sociétés évoluant dans le secteur des ressources sont situées sur des terres autochtones et sont intrinsèquement près des communautés autochtones.
- On a indiqué que le Canada ne devrait pas inclure le RDIE dans les APIE puisque les arbitres pourraient ne pas avoir d’expertise en matière de droits des peuples autochtones et que les risques associés au fait d’investir à l’étranger ne devraient pas être assumés par les populations autochtones. Toutefois, si le RDIE est maintenu dans l’APIE, une « exception générale autochtone » devrait être prévue pour assurer la protection des droits des peuples autochtones en vertu de la Constitution canadienne, des accords sur les revendications territoriales et des accords sur l’autonomie gouvernementale (comme l’approche adoptée dans l’ACEUM).
- On convenait que le Canada devrait continuer à autoriser les exigences voulant que les investisseurs étrangers favorisent les biens et services produits ou fournis localement par des entreprises ou communautés autochtones.
6. Autonomisation économique des femmes
Vingt-deux (22) commentaires ont été reçus des parties prenantes et du public concernant la façon dont les APIE peuvent mieux favoriser l’égalité entre les sexes et l’autonomisation économique des femmes – 12 commentaires au moyen de PlaceSpeak et 10 commentaires par l’entremise de courriels, de lettres et de rencontres personnelles. Certains commentaires émettaient des réserves, indiquant que les APIE n’étaient pas le meilleur instrument pour aborder l’inégalité entre les sexes, tandis que d’autres appuyaient les efforts visant à inclure des dispositions qui pourraient promouvoir l’égalité entre les sexes. Dans l’ensemble, les réactions indiquent que la promotion de l’égalité entre les sexes est prioritaire pour les Canadiens et que les APIE devraient tenir compte de cet important objectif de politiques.
Quelques-uns des points de vue exprimés lors des consultations :
- Le Canada devrait continuer d’appliquer une perspective de genre aux APIE et s’efforcer d’atteindre l’égalité entre les sexes.
- Les APIE devraient utiliser les marchés publics comme mécanisme de promotion de l’égalité entre les sexes (p. ex. employer des femmes dans des métiers non traditionnels, employer des femmes lors des processus d’approvisionnement).
- À l’heure actuelle, les APIE n’atteignent pas d’objectifs commerciaux inclusifs réels ou significatifs, comme l’autonomisation économique des femmes. Une attention particulière devrait être accordée à l’incidence des APIE sur l’égalité entre les sexes, ainsi qu’à l’adoption de politiques d’investissement qui cadrent avec celles du Plan national d’action du Canada consacré aux femmes, à la paix et à la sécuritéNote de bas de page 2.
- Certains ont émis des doutes quant à savoir si l’APIE était le meilleur instrument disponible pour promouvoir l’égalité entre les sexes.
- Des données ventilées en fonction du genre devraient être utilisées pour mieux comprendre l’incidence des politiques commerciales sur les femmes et les minorités de genre.
- Les APIE ne sont pas compatibles avec la promotion de l’égalité entre les sexes étant donné que ces accords sont perçus comme faisant passer les intérêts des entreprises avant les politiques sociales.
- La diversité de genre devrait être un principe directeur dans les organismes juridictionnels du Canada, et le Canada devrait élaborer des politiques et des programmes nationaux pour favoriser l’autonomisation économique des femmes.
- Voici des suggestions sur la façon dont les APIE pourraient veiller à ce que les investisseurs étrangers au Canada et les investisseurs canadiens à l’étranger favorisent l’égalité entre les sexes :
- adapter leurs modèles et plans de gestion pour les rendre plus inclusifs et sensibles aux enjeux d’égalité des sexes;
- produire des rapports annuels sur les plans sensibles aux enjeux d’égalité des sexes;
- promouvoir l’égalité d’accès à l’emploi;
- adopter des pratiques qui favorisent la participation des femmes au marché du travail, comme de fournir un soutien pour la garde des enfants ou un horaire variable, etc.
Conclusion
Par l’entremise de ce vaste processus de consultation, le gouvernement du Canada a sollicité les points de vue des Canadiens sur la façon dont les accords d’investissement internationaux du Canada peuvent mieux refléter une approche inclusive à l’égard du commerce. Beaucoup d’idées et de suggestions pour améliorer l’APIE modèle ont été proposées lors des consultations et ont été prises en compte dans le processus d’examen des APIE.
Il faut aussi souligner que parallèlement à ces consultations, une révision technique interne de l’APIE modèle est aussi en train d’être réalisée par Affaires mondiales Canada (AMC). Son but est d’évaluer les implications des approches liées aux politiques d’investissement négociées dans les accords de libre-échange récents du Canada (p. ex. AECG, PTPGP et ACEUM) pour l’APIE. Les résultats de cet examen technique, en combinaison avec les commentaires reçus dans le cadre des consultations sur l’APIE, éclaireront la position et l’approche du Canada envers un nouvel APIE modèle inclusif.
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