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PME exportatrices dirigées par des immigrants au Canada

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Nancy Blanchet
Économiste, Direction de l’Analyse commerciale et économique (BEA)

Table des matières

Figures

Sommaire

Le Canada compte une population d'immigrants nombreuse, diversifiée et très instruite qui apporte une contribution importante à l'économie canadienne. Cette étude examine la contribution des entreprises dirigées par des immigrants aux performances du Canada en matière d'exportation et constate que la population canadienne née à l'étranger a une plus grande ouverture sur l'extérieur que la population née au Canada. Les entreprises dirigées par des immigrants, bien qu'elles soient plus petites en moyenne, sont beaucoup plus susceptibles d'exporter et de tirer une plus grande part de leurs revenus de l'exportation. Elles ont également tendance à exporter plus loin ; elles dépendent moins des États-Unis comme marché et exportent vers des marchés plus diversifiés. Il est donc bénéfique pour la croissance et la diversification des exportations canadiennes que le nombre de PME exportatrices dirigées par des immigrants ait augmenté deux fois plus vite que celui des PME exportatrices dont le dirigeant est né au Canada. Les entreprises appartenant à des femmes immigrées sont particulièrement remarquables, car elles exportent à un taux bien plus élevé que les entreprises appartenant à des femmes nées au Canada. Cette étude réaffirme l'importante contribution des entreprises dirigées par des immigrants à l'économie canadienne et aux performances commerciales internationales du Canada.

Principales constatations

Introduction

À l’échelle mondiale, les populations d’immigrants ont atteint des niveaux sans précédent au cours des dernières décennies. Le nombre d’immigrants dans le monde est passé de 153 millions en 1990 à 272 millions en 2019, soit une augmentation de 78 %. Cette augmentation est largement supérieure à l’augmentation de la population mondiale (+ 45 %). Au Canada, l’immigration a augmenté de 58 %, alors que la population a augmenté de 36 % pour cette même périodeNote de bas de page 1 . La contribution des immigrants à l’économie de leur pays d’accueil a été démontrée plus d’une fois, et l’intérêt à cet égard s’est décuplé au cours des dernières années.Ce phénomène n’est pas unique au Canada; on constate également aux États-Unis, au Royaume‑Uni et en Australie que les citoyens nés à l’étranger ont davantage tendance à posséder une entreprise que les citoyens nés au pays.Au Canada, plus d’un Canadien sur cinq est né à l’étranger, ce qui le plaçait en 2018 au 6e rang des pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), devant le reste des pays du G-7 (figure 1).

Figure 1 – Pourcentage de la population née à l’étranger, pays de l’OCDE – 2018 Figure 1 – Pourcentage de la population née à l’étranger, pays de l’OCDE – 2018

Figure 1: Version texte
Pays2018
Mexique0,8 %
Japon1,9 %
Corée du Sud2,3 %
Portugal8,7 %
Italie10,2 %
France12,6 %
OCDE Moyenne13,1 %
États-Unis13,6 %
UE/AELE13,6 %
Royaume-Uni13,8 %
Allemagne16,0 %
Suède18,8 %
Autriche19,4 %
Canada20,8 %
Israël21,4 %
Nouvelle-Zélande23,3 %
Australie27,7 %
Suisse29,0 %
Luxembourg47,6 %

Source : OCDE,

Dungan et coll., 2012, ont examiné la contribution des immigrants à l’économie canadienne en utilisant un modèle prévisionnel macro-économétrique (FOCUS) et ses répercussions sur le produit intérieur brut (PIB) nominal. Selon le scénario dans lequel on présume que les nouveaux immigrants gagnent leur vie et contribuent au PIB au même taux que la population active de référence dans le pays, la croissance du PIB réel (+ 3,44 %) est supérieure à la croissance de la population (+ 2,6 %), ce qui signifie que le PIB réel par habitant augmente. Il n’a pas été démontré d’incidence sur le chômage et la répercussion générale sur les soldes du gouvernement est positive, puisque l’impôt payé par les immigrants est supérieur aux dépenses.

Au Canada, le commerce contribue grandement à l’économie et représente l’équivalent, en valeur, des deux tiers du PIB. On a constaté dans de nombreuses études depuis celle de Gould (1994) qu’il existe une corrélation solide entre le nombre d’immigrants et la quantité d’exportations. Si on examine par exemple l’Espagne (Peri et Requena, 2009), il a été démontré qu’une augmentation de 10 % de l’une des communautés immigrantes dans une province espagnole donnée a entraîné l’augmentation des exportations vers le pays d’origine de ces immigrants de 0,5 à 1 %.

Les immigrants qui s’installent dans un pays d’accueil proviennent de milieux différents de celui des personnes qui sont nées dans ce dernier. Le parcours qu’ils suivent afin d’assurer leur survie économique dépend alors, largement, des conditions qui les ont poussés à quitter leur pays d’origine en premier lieu. Beaucoup choisissent de démarrer une entreprise, et un nombre important de ces immigrants optent pour l’exportation. Voici les principales questions auxquelles la présente étude tente de répondre :

L’Enquête sur le financement des petites et moyennes entreprises (EFPME), menée tous les trois ans par Statistique Canada, permet l’évaluation approfondie de ces caractéristiques. Cette enquête a pour particularité intéressante de permettre de séparer et comparer des statistiques liées aux dirigeants de PME nés à l’étranger ou nés au Canada, puisqu’elle comprend une question portant sur le lieu de naissance du décideur principal (à savoir s’il est né au Canada ou ailleurs). Dans le cadre de ce document, nous utiliserons l’expression « PME dirigée par des immigrants » pour renvoyer aux décideurs principaux qui ont déclaré dans l’enquête être nés à l’extérieur du Canada. L’expression « PME dont les dirigeants sont nés au Canada » sera utilisée pour renvoyer aux décideurs principaux qui ont déclaré être nés au Canada dans cette même enquête. En nous fondant sur les données tirées de l’enquête, nous avons analysé les caractéristiques des activités et des décideurs principaux qui ont le plus d’incidence sur la décision d’internationaliser l’entreprise. Par exemple : la taille de l’industrie, le rendement de l’entreprise sur le plan de l’innovation et le niveau d’éducation des dirigeants.

La propension à exporter et les facteurs menant à l’internationalisation

Nous nous sommes fondés, dans le cadre du présent document, sur l’Enquête sur le financement des PME (l’Enquête) de Statistique Canada. L’Enquête a été conçue dans le but de déterminer les types de financement qu’utilisent les petites et moyennes entreprises (PME) au Canada, mais elle sert aussi à recueillir de l’information sur la croissance des entreprises, la participation aux activités commerciales internationales, l’innovation et la propriété intellectuelle, ainsi que sur les caractéristiques du propriétaire.De plus, l’Enquête fait la distinction entre les PME dirigées par des personnes nées à l’étranger et les PME dirigées par des personnes nées au Canada, ce qui permet de comparer leur propension respective à l’exportation.

La propension à l’exportation indique si l’entreprise exporte vers des marchés étrangers ou non.En analysant l’Enquête, nous avons déterminé que la propension à l’exportation des PME dirigées par des immigrants au Canada avait atteint un taux de 14,3 % en 2017, soit un taux beaucoup plus élevé que celui des PME dont les dirigeants sont nés au Canada, qui se tenait à 10,8 %. Il a été déterminé que le taux moyen pour l’ensemble des PME canadiennes était de 11,7 % (figure 2).En date de 2017, le Canada comptait 85 631 PME s’étant engagées dans des activités d’exportation. De ce nombre, 30,6 % étaient dirigées par une personne née à l’étranger.L’intensité de l’exportation désigne le pourcentage des ventes réalisées à l’étranger plutôt qu’au Canada. En 2017, l’intensité d’exportation des PME dirigées par des immigrants était de 5,8 %, alors qu’elle était de 3,7 % pour les PME dont les dirigeants sont nés au Canada.

Nous examinerons dans les sections suivantes les caractéristiques des PME qui mènent à la décision d’exporter vers l’étranger, comme le réseau de contacts du dirigeant, le secteur dans lequel l’entreprise opère, la région vers laquelle l’entreprise exporte et la taille de l’entreprise.

Figure 2 : Propension à l’exportation des PME dirigées par des immigrants, des PME dont les dirigeants sont nés au Canada et de l’ensemble des PME du Canada Propension à l’exportation des PME dirigées par des immigrants, des PME dont les dirigeants sont nés au Canada et de l’ensemble des PME du Canada

Figure 2: Version texte
Propension à l’exportation :(%)
PME dirigeant  né au Canada10,8 %
Moyenne des PME canadiennes11,7 %
PME dirigée par un immigrant14,3 %

Source : Bureau de l’économiste en chef, Affaires mondiales Canada, à partir de données obtenues de Statistique Canada, Enquête sur le financement et la croissance des petites et moyennes entreprises, 2017.

Réseau de contacts

Plus d’une étude a mis l’accent sur la relation entre le niveau d’exportation de l’entreprise d’un immigrant et son réseau de contacts. Effectivement, les immigrants, lorsqu’ils arrivent dans leur pays d’accueil, apportent le réseau de contacts qu’ils ont développé dans leur pays d’origine. Rauch et Trindale (1999) ont constaté que les réseaux des nombreux groupes ethniques vivant à l’extérieur de leur pays d’origine agissent en tant que catalyseur. Une fois établis dans leur pays d’accueil, ces immigrants créent des associations formelles et informelles auxquelles ont accès les gens d’affaires de la même communauté ethnique, sans égard au pays d’accueil ou au pays d’origine. Ces associations servent de nœud pour l’échange d’information, facilitant ainsi la décision d’exporter.

En plus d’apporter avec eux leur réseau de contacts, les immigrants apportent aussi plus de savoir quant à la culture d’exploitation d’entreprise de leur pays d’origine. Ces immigrants sont vraisemblablement plus aptes à comprendre la bureaucratie et les façons de faire de leur pays d’origine, sans compter qu’ils en comprennent la langue, lorsque ces notions diffèrent du pays d’accueil. Cohérent avec d’autres études menées dans le domaine des réseaux sociaux, les constatations d’Ellis (2000) soutiennent l’hypothèse selon laquelle la connaissance des débouchés commerciaux étrangers est acquise communément dans le cadre de relations interpersonnelles existantes, plutôt qu’à l’aide d’études du marché. Comme les immigrants s’appuient sur les connexions qu’ils ont développées dans leur pays d’origine et sur les clientèles et réseaux du même groupe ethnique, Wang et Liu (2015) ont constaté que les immigrants pourraient être naturellement disposés à internationaliser leurs pratiques commerciales, puisque les liens naturels entre eux et leur pays d’origine agissent comme un pont menant leurs entreprises vers des marchés transnationaux. Ils ont également constaté que les entreprises appartenant à des personnes asiatiques ou hispaniques nées aux États-Unis ont plus de chances de mener des activités transnationales que les entreprises possédées par des personnes blanches nées aux États-Unis. Cette observation s’applique également aux entreprises possédées par des personnes d’ethnicités mixtes.

Au Canada, Fung et coll. (2019) ont constaté, en se servant de la Base de données canadienne sur la dynamique employeurs-employés (BDCDEE)Note de bas de page 2 , que l’effet de l’information, soit « les connaissances des immigrants sur leur pays d’origine et les réseaux ethniques », peut contribuer à réduire les coûts de transaction et à faciliter le commerce. Ils ont également pu établir que les entreprises possédées par des immigrants commercent avec plus d’intensité que les entreprises dirigées par des personnes nées au Canada; il en est de même pour la valeur totale du commerce et le nombre de produits (la marge extensive), ainsi que pour la valeur moyenne par produit (la marge intensive), qui sont tous plus élevés pour les entreprises dirigées par un immigrant. En plus du réseau de contacts, nous avons cerné d’autres caractéristiques qui mènent à l’internationalisation des entreprises. Dans les sections suivantes, nous mettrons l’accent sur le secteur où la PME opère et la région vers laquelle elle exporte.

Secteurs à forte intensité d’exportation

Certains secteurs de l’économie sont plus propices à l’exportation, comme on le mentionne dans un document précédent du Bureau de l’économiste en chef (Communautés de langue officielle en situation minoritaire au Canada, janvier 2020). L’intensité d’exportation en fonction du secteur a été analysée au moyen de deux rapports du Conference Board du Canada : « What are the business characteristics of Indigenous exporters in Canada » par Fiser, Adam (2018) et « Who has been left out of trade’s benefits », par Palladini, Jaqueline et Goldfarb, Danielle (2018), dans lesquels on établit le pourcentage des revenus issus des exportations des entreprises canadiennes. Dans ce rapport antérieur du Bureau de l’économiste en chef sur les minorités de langue officielle au Canada, nous avons établi le seuil d’exportation à forte intensité à 19 % ou plus.

Secteurs à forte intensité d’exportationIntensité de l’exportation
Agriculture, exploitation minière et extraction de pétrole et de gazDe 9,5 % à 99 %
FabricationDe 12,5 % à 98,4 %
Commerce de gros61,7 %
Commerce de détail61,7 %
Hébergement et services de restauration19,3 %

En nous fondant sur les données de l’Enquête, nous avons établi qu’en 2017, au Canada, 38,7 % des PME dirigées par des immigrants sont actives dans les cinq secteurs dont l’intensité d’exportation est la plus élevée. Il s’agit d’un taux légèrement plus élevé que le 36,2 % des PME dont les dirigeants sont nés au Canada.

Figure 3 – Distribution des PME dirigées par des immigrants et des PME dont les dirigeants sont nés au Canada, classées selon le secteur d’exportation à forte intensité, en 2017 Distribution des PME dirigées par des immigrants et des PME dont les dirigeants sont nés au Canada, classées selon le secteur d’exportation à forte intensité, en 2017

Figure 3: Version texte
SecteurPME dirigeant né au CanadaPME dirigée par un immigrant
Agriculture, Extraction de pétrole et de gaz, Mines7,7 %1,8 %
Fabrication5,8 %5,4 %
Commerce de gros5,2 %5,1 %
Commerce de détail10,9 %13,3 %
Hébergement et services alimentaires6,6 %13,1 %
Industries de l’information et de la culture19,7 %20,3 %
Services professionnels, scientifiques et techniques13,4 %17,3 %
Transports et entreposage5,0 %7,8 %
Autres services7,0 %6,6 %
Construction18,8 %9,3 %

Source : Bureau de l’économiste en chef, Affaires mondiales Canada, à partir de données obtenues de Statistique Canada, Enquête sur le financement et la croissance des petites et moyennes entreprises, 2017 et Exports Revenues du Conference Board du Canada.

Toutefois, au Canada, les PME dirigées par des immigrants sont deux fois plus susceptibles d’être actives dans le secteur de l’hébergement et des services de restauration : 13,1 % d’entre elles opèrent dans ce secteur, comparativement à 6,6 % dans le cas des PME dont les dirigeants sont nés au Canada (figure 3). Des secteurs d’exportation à forte intensité, il s’agit d’un des plus faibles, avec un niveau d’intensité de 19,3 %.

Les PME dirigées par des immigrants sont aussi plus présentes dans le secteur du commerce de détail, dont l’intensité d’exportation est estimée à 61,7 % : 13,3 % d’entre elles opèrent actuellement dans ce secteur, comparativement à 10,9 % dans le cas des PME dont les dirigeants sont nés au Canada. Les PME dirigées par des immigrants et les PME dont les dirigeants sont nés au Canada ont une présence presque égale dans les secteurs d’exportation à forte intensité de la fabrication et du commerce de gros.

Le secteur de l’agriculture, de l’exploitation minière et de l’extraction de pétrole et de gaz connaît le plus haut taux d’intensité de l’exportation, et la présence des PME dont les dirigeants sont nés au Canada y est bien plus grande que celle des immigrants : 7,7 % des PME dont les dirigeants sont nés au Canada opèrent dans ce secteur, contre 1,8 % pour les PME dirigées par des immigrants.

Bien que l’analyse des secteurs d’exportation à forte intensité souligne un avantage en faveur des PME dirigées par des immigrants, cet avantage est marginal, et une plus grande proportion des PME dont les dirigeants sont nés au Canada a indiqué être active dans le secteur où l’intensité d’exportation est la plus élevée, soit le secteur de l’agriculture, de l’exploitation minière et de l’extraction de pétrole et de gaz. Par contre, les PME dirigées par des immigrants sont deux fois plus susceptibles d’être actives dans le secteur de l’hébergement et des services de restauration. La comparaison de ces deux secteurs révèle toutefois que le secteur de l’hébergement et des services de restauration a un niveau d’intensité d’exportation moins élevé.

Pays et régions vers lesquels les PME canadiennes exportent

Dans plus d’une étude menée au Canada au cours des dernières décennies, on a démontré que la présence des immigrants avait un effet positif et significatif sur le commerce du Canada avec les régions d’origine des propriétaires immigrants, mais que les répercussions sur l’ensemble des régions partenaires sont relativement faibles ou insignifiantes, en moyenne (Fung et coll., 2019). Dans une étude réalisée en 1998 par Head et Ries en se fondant, à l’aide d’une équation de gravité augmentée, sur les activités commerciales menées par le Canada avec 136 partenaires, de 1980 à 1992, les chercheurs ont établi qu’une augmentation de 10 % du nombre d’immigrants était associée à une augmentation de 1 % des exportations canadiennes vers le pays d’origine de l’immigrant en question, ainsi qu’une augmentation de 3 % des importations.

Les immigrants ont tendance à exporter davantage vers leur pays d’origine, puisque leur connaissance du marché et de la langue facilite les transactions. La majorité des études concordent sur le fait que les entreprises possédées par des immigrants commercent avec plus d’intensité et que la valeur totale du commerce, le nombre de produits et la valeur moyenne par produit sont tous plus élevés, et cet effet est plus prononcé dans la région d’où le propriétaire immigrant est originaire (Fung et coll., 2019).

Figure 4 – Propension à l’exportation par pays ou région pour les PME dirigées par des immigrants et des PME dont les dirigeants sont nés au Canada, en 2017 Propension à l’exportation par pays ou région pour les PME dirigées par des immigrants et des PME dont les dirigeants sont nés au Canada, en 2017

Figure 4: Version texte
2017-Propension à exporter:PME dirigeant né au CanadaPME dirigée par un immigrant
États-Unis88,9 %82,8 %
Europe - Autres24,9 %27,2 %
Royaume-Uni16,4 %17,0 %
Asie - Autres10,4 %16,6 %
Mexique8,0 %10,0 %
Chine6,8 %10,4 %
Amérique latine6,4 %7,8 %
Inde5,2 %3,6 %

Source : Bureau de l’économiste en chef, Affaires mondiales Canada, à partir de données obtenues  de Statistique Canada, Enquête sur le financement et la croissance des petites et moyennes entreprises, 2017.

En nous fondant sur l’Enquête, nous avons déterminé que, au Canada, les PME dirigées par des immigrants sont les exportateurs majoritaires vers presque tous les autres pays ou régions du monde, les exceptions étant les États-Unis et l’Inde (figure 4). Il n’est pas surprenant de constater que les PME dont les dirigeants sont nés au Canada soient plus susceptibles d’exporter vers les États-Unis, puisque beaucoup de personnes nées au Canada ont été fortement exposées aux États-Unis et sa culture, ses normes, ses lois et règlements, entre autres, sans compter qu’il s’agit du marché le plus semblable à celui du Canada, en plus d’être géographiquement situé à proximité. Néanmoins, comment expliquer le fait que les PME dont les dirigeants sont nés au Canada exportent davantage vers l’Inde que les PME dirigées par des immigrants?

Origine des populations immigrantes du Canada

L’Enquête révèle que 5,2 % des PME dont les dirigeants sont nés au Canada exportent vers l’Inde, comparativement à 3,6 % chez les PME dirigées par des immigrants. Ce phénomène serait-il lié aux vagues successives d’immigration au Canada et à la probabilité de devenir un entrepreneur? En utilisant les mises à jour annuelles archivées de l'IRCC, et les mises à jour mensuelles ultérieures Note de bas de page 3, qui indiquent le nombre annuel de résidents permanents qui ont été admis au Canada, nous avons constaté que l'Inde a toujours été un important pays source d'immigrants (figure 5). Du début des années 1980 au milieu des années 1990, l’Inde a continuellement figuré parmi les cinq pays d’où proviennent le plus de nouveaux résidents permanents admis au Canada.

Figure 5 – Résidents permanents admis au Canada en fonction du pays d’origine, de 2006 à 2019 Résidents permanents admis au Canada en fonction du pays d’origine, de 2006 à 2019

Figure 5: Version texte
Pays2006Pays2014Pays2017Pays2019
Inde33 773Philippines40 032Inde51 590Inde85 590
Chine33 493Inde38 330Philippines40 880Chine30 245
Philippines18 400Chine24 626Chine30 250Philippines27 820
Pakistan13 128Iran16 772Syrie12 060Nigéria12 600
États-Unis9 612Pakistan9 113États-Unis9 140Pakistan10 795
Iran7 481États-Unis8 491Pakistan7 655États-Unis10 780
Royaume-Uni7 136Royaume-Uni5 758France6 625Syrie10 120
Colombie6 535France4 716Nigéria5 445Eritrée7 030
Corée du Sud6 210Mexique4 477Royaume-Uni5 310Corée du Sud6 105
Algérie4 806Corée du Sud4 458Iraq4 740Iran6 055

Source : Bureau de l’économiste en chef, Affaires mondiales Canada, à partir de données obtenues d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada, données ouvertes, 2015 et 2020.

En 1996, l’Inde est devenue le deuxième plus important pays. Dès le début des années 2000, les personnes d’origine indienne constituaient le plus important groupe de résidents permanents admis au pays. Ce phénomène pourrait être expliqué par le fait que la génération qui a succédé à ces vagues d’immigration, soit des personnes nées au Canada d’immigrants originaires de l’Inde, deviennent eux-mêmes entrepreneurs continuant à exporter vers le pays d’origine de leurs parents. Les résultats obtenus par Green et coll. (2016) appuient cette hypothèse. De toutes les entreprises privées constituées en société dont les propriétaires étaient des immigrants en 2010 (jeu de données de la BDCDEE de Statistique Canada), les personnes d’origine indienne constituaient le plus grand groupe. Par ailleurs, Abada et coll. (2012) et Hou et coll. (2011) ont étudié le phénomène de seconde génération et constaté que, lorsqu’on contrôle les changements dans les facteurs démographiques, le taux de travailleurs indépendants restait le même pour les hommes de deuxième génération que pour leurs pères. Il porte à croire, donc, que les membres de la génération qui succède aux immigrants entrepreneurs sont aussi susceptibles que leurs parents de devenir entrepreneurs.

Arcand, S. (2008) a mené des entrevues auprès de la deuxième génération issue de parents immigrants qui ont possédé une entreprise à Montréal. Il a alors fait une série d’observations : les valeurs de l’honnêteté, du travail et de l’ambition promues par les parents qui ont possédé une entreprise ont agi comme source d’inspiration pour la génération qui leur a succédé. Cela a poussé les membres de cette deuxième génération à hériter de l’entreprise parentale ou à démarrer leur propre entreprise. Le pays d’accueil des parents immigrants, en l’occurrence le Canada, est perçu par plusieurs comme une terre de possibilités. La décision d’hériter de l’entreprise dépend, dans une certaine mesure, du type d’entreprise possédée par les parents.

La propension à l’exportation vers la Chine, le troisième pays le plus important quant à l’origine des nouveaux résidents permanents admis au Canada de 2014 à 2017, est plus élevée chez les PME dirigées par des immigrants (10,4 %) que chez les PME dont les dirigeants sont nés au Canada (6,8 %). Dans l’étude menée par Rauch et Trindale, où l’on a établi le lien de causalité entre le degré d’exportation et le réseau entretenu avec les immigrants du pays d’origine, on a également déterminé que les produits dont la marque est établie dans les réseaux de l’Asie du sud-est de la Chine connaissent une augmentation du commerce de plus de 150 %. Cette notion vient également appuyer l’hypothèse énoncée à la section précédente quant à l’importance du réseau de contacts.

La propension à l’exportation vers l’Europe (Royaume-Uni et reste de l’Europe) est élevée pour l’ensemble des PME canadiennes, mais elle est légèrement plus élevée chez les PME dirigées par des immigrants : 27,2 % d’entre elles ont exporté vers l’Europe (ailleurs qu’au Royaume‑Uni), comparativement à 24,9 % chez les PME dont les dirigeants sont nés au Canada. De nombreuses études ont mis l’accent sur les liens entre l’immigration et l’exportation. Peri et Requena (2009) ont mis l’accent sur la taille des communautés immigrantes en Espagne. Ils sont partis du principe selon lequel commercer avec des économies possédant des institutions inefficaces, des cultures et des langues différentes, ainsi que des lois et des règlements qui ne sont pas rigoureusement appliqués serait très coûteux. Ils ont mené une analyse afin de déterminer si la présence d’immigrants au sein d’une entreprise aurait pour effet de réduire les coûts associés à l’exportation. Ils ont ainsi constaté que c’est avec l’Afrique, la région avec le plus de différences culturelles avec l’Espagne et dont le niveau de développement est le plus faible, que les réseaux d’immigrants ont la plus grande incidence sur la réduction des coûts du commerce.

Ils ont aussi établi une corrélation entre l’élasticité des exportations et la taille de la communauté immigrante, en analysant l’incidence de l’exportation des immigrants au cours des premières années d’immigration, alors que ces populations étaient encore très petites en Espagne, comparativement aux années plus récentes. Les résultats montrent que l’élasticité tend à être plus élevée dans les provinces où la densité d’immigrants est plus prononcée. Elle tend également à être plus élevée au cours des années plus récentes. L’incidence des immigrants sur l’exportation a été beaucoup plus importante au cours des dernières années (2002-2008), avec une élasticité sur l’effet total égale de 0,2, comparativement à une élasticité de 0,085 au cours des premières années d’immigration.Cela pourrait aider à expliquer pourquoi les PME canadiennes exportent autant vers l’Europe, puisque le groupe à l’étude appartient à une troisième ou une quatrième vague d’immigration au Canada, qui a commencé en 1890 et s’est poursuivi après la Deuxième Guerre mondiale, faisant de lui l’un des groupes les plus grands et les plus anciens jamais admis au Canada. Selon Peri et Requena, plus le groupe est grand, plus l’élasticité (la probabilité) de l’exportation est élevée.

La propension à exporter vers les pays de l’Amérique latine s’est révélée faible, atteignant un taux de 7,8 % dans le cas des PME dirigées par des immigrants et de 6,4 % dans le cas des PME dont les dirigeants sont nés au Canada. L’exportation vers le Mexique n’est que légèrement plus élevée, à des taux respectifs de 10 et 8 %. L’exportation vers d’autres pays d’Asie (exception faite pour l’Inde et le Japon) est beaucoup plus élevée chez les PME dirigées par des immigrants (16,6 %) que chez les PME dont les dirigeants sont nés au Canada (10,4 %). Pangarkar (2007) a déterminé que les PME semblent mettre l’accent sur les environnements attrayants, particulièrement sur le plan du taux de croissance. L’afflux croissant d’immigrants issus de l’Asie, combiné au rendement économique de la région au cours de la dernière décennie, pourrait avoir amené les immigrants à intensifier le commerce avec leur région d’origine. D’autres considérations peuvent influer sur la capacité de l’entreprise à exporter. Nous avons effectué une analyse afin de déterminer si la taille de l’entreprise joue alors un rôle déterminant.

Taille des PME

La plupart des études dévoilent un lien positif entre la taille de l’entreprise et l’intensité de l’exportation (O’Rourke, 1985; Wagner, 1995; Majochi et coll., 2005), bien qu’il y en ait parmi lesquelles on n’arrive pas à cette conclusion (Iyer, 2010). Les entreprises de taille plus importante ont tendance à être plus productives, ce qui les rend plus concurrentielles sur la scène internationale. Elles peuvent aussi avoir à leur disposition une plus grande quantité de ressources financières et humaines, ce qui a pour effet d’augmenter les occasions d’étendre les activités et d’exporter vers l’étranger, notamment. Malgré cette relation entre la taille de l’entreprise et l’exportation, nous avons constaté que, en 2017, 60,8 % des PME dirigées par des immigrants ont déclaré diriger une microentreprise (de 1 à 4 employés), comparativement à 52,9 % chez les PME dont les dirigeants sont nés au Canada. Une plus grande proportion de PME dont les dirigeants sont nés au Canada a déclaré que leur entreprise était de très petite taille (5 à 9 employés), de petite taille (20 à 99 employés) ou de moyenne taille (100 à 499 employés) (figure 6). La probabilité accrue d’exporter est donc particulièrement notable considérant la taille relativement petite des PME dirigées par des immigrants.

Figure 6 – Taille des PME, des PME dirigées par des immigrants et des PME dont les dirigeants sont nés au Canada, en 2017 Taille des PME, des PME dirigées par des immigrants et des PME dont les dirigeants sont nés au Canada, en 2017

Figure 6 : Version texte
Taille des PMEMicroTrès petitePetiteMoyenne
Dirigées par des immigrants, en 201760,8 %30 %7 %2 %
MicroTrès petitePetiteMoyenne
Dont les dirigeants sont nés au Canada, en 201753 %33 %12 %2 %

Source : Bureau de l’économiste en chef, Affaires mondiales Canada, à partir de données obtenues de Statistique Canada, Enquête sur le financement et la croissance des petites et moyennes entreprises, 2017.

Green et coll. (2016) ont également constaté que, parmi la cohorte des 2 000 entrants qui possèdent une entreprise privée constituée en société, la majorité des entreprises possédées par des immigrants sont de petite taille, bien que la taille tende à augmenter lentement avec l’âge de la cohorte. Picot et Ostrovsky (2017) ont établi que les entreprises privées constituées en société qui sont possédées par un immigrant ont tendance à être de plus petite taille que celles possédées par une personne née au Canada, employant en moyenne quatre salariés, alors que la moyenne est de sept pour les entreprises privées constituées en société possédées par une personne née au Canada. Si les PME dont les dirigeants sont nés au Canada sont de plus grande taille, pourquoi exportent-elles moins? 

Raisons de ne pas exporter

Bien que, selon les PME dirigées par des immigrants et les PME dont les dirigeants sont nés au Canada, la raison principale de ne pas exporter soit la nature locale de l’entreprise, il existe des différences dans les autres motifs (figure 7).

Figure 7 – Principales raisons de ne pas exporter, PME dirigées par des immigrants et PME dont les dirigeants sont nés au Canada, en 2017 Principales raisons de ne pas exporter, PME dirigées par des immigrants et PME dont les dirigeants sont nés au Canada, en 2017

Figure 7 : Version texte
Principales raisons de  ne pas exporterPME dirigeant né au CanadaPME dirigée par un immigrant
Obstacles administratifs au Canada6,0 %4,5 %
Obstacles administratifs à l'étranger5,8 %4,6 %
Obstacles aux frontières5,6 %4,9 %
Obstacles logistiques7,1 %5,9 %
Problèmes liés à la connaissance du marché5,2 %5,2 %
Problèmes liés à la propriété intellectuelle1,3 %1,6 %
Manque de financement/flux de trésorerie3,2 %4,6 %
Risques financiers4,9 %6,5 %
Autres9,9 %5,0 %

Source : Bureau de l’économiste en chef, Affaires mondiales Canada, à partir de données obtenues   de Statistique Canada, Enquête sur le financement et la croissance des petites et moyennes entreprises, 2017.

Généralement, les PME dont les dirigeants sont nés au Canada accordent plus d’importance aux problèmes directement liés à l’exportation que les PME dirigées par des immigrants. Par exemple, la catégorie d’obstacle citée le plus fréquemment par les PME dont les dirigeants sont nés au Canada est celle des obstacles logistiques, à un taux de 7,1 %. Les dirigeants de PME nés au Canada sont aussi plus susceptibles que leurs homologues immigrants de citer les obstacles frontaliers et administratifs (bureaucratie), tant au Canada qu’à l’étranger, comme motifs les empêchant d’exporter. Il est intéressant de noter qu’une proportion similaire de PME dont les dirigeants sont nés au Canada et de PME dirigées par des immigrants cite les problèmes liés à la connaissance du marché comme raison de ne pas exporter. De l’autre côté, les PME dirigées par des immigrants étaient plus susceptibles de citer ce que l’on pourrait considérer comme des obstacles plus généraux à la croissance comme motif principal de ne pas exporter. Les risques financiers sont, à 6,5 % des cas, la principale raison avancée par les dirigeants de PME nés à l’étranger pour expliquer qu’ils n’exportent pas, suivi du manque de financement (ou de flux de trésorerie) dans 4,6 % des cas. Ces données sont particulièrement intéressantes à la lumière des constatations précédentes, où il fut déterminé que les PME dirigées par des immigrants sont plus petites en moyenne que leurs homologues dont les dirigeants sont nés au Canada.

Croissance chez les PME canadiennes exportatrices

Nous avons calculé que, globalement, de 2014 à 2017, le nombre de PME exportatrices au Canada a augmenté de 17,2 %. Il existe toutefois un important écart dans la croissance des PME dirigées par des immigrants et la croissance des PME dont les dirigeants sont nés au Canada. Le nombre de PME exportatrices dirigées par des immigrants a grimpé de 26,5 % durant la période de 2014 à 2017, comparativement à une croissance de 13,7 % pour la même période chez les PME dont les dirigeants sont nés au Canada, soit une croissance presque deux fois plus importante (figure 8).

Figure 8 – Augmentation du nombre de PME exportatrices de 2014 à 2017, PME dirigées par des immigrants et PME dont les dirigeants sont nés au Canada Augmentation du nombre de PME exportatrices de 2014 à 2017, PME dirigées par des immigrants et PME dont les dirigeants sont nés au Canada

Figure 8 : Version texte
Augmentation du nombre de PME entre 2014 et 2017(%)
 PME exportatrices dont les dirigeants sont nés au Canada+13,7 %
 PME exportatrices dirigées par des immigrants+26,5 %

Source : Bureau de l’économiste en chef, Affaires mondiales Canada, à partir de données obtenues de Statistique Canada, Enquête sur le financement et la croissance des petites et moyennes entreprises, 2014 et 2017.

Non seulement l’augmentation du nombre d’entreprises exportatrices était-elle proportionnellement beaucoup plus importante chez les PME dirigées par des immigrants, c’est aussi ce groupe qui a connu la plus grande augmentation du nombre d’entreprises durant cette période, par opposition aux PME dont les dirigeants sont nés au Canada.

Augmentation des PME au Canada

La proportion de PME appartenant à des immigrants a augmenté au courant des dernières années : de 2014 à 2017, le nombre de PME dirigées par des immigrants a augmenté de 24,7 %, devançant largement l’augmentation de 15,8 % chez les PME dont les dirigeants sont nés au Canada. Combinées aux tendances observées précédemment, ces données suggèrent que les PME dirigées par des immigrants ont augmenté leur propension à l’exportation, alors qu’elle aurait quelque peu diminué chez les PME dont les dirigeants sont nés au Canada.

Green et coll. (2016) ont étudié la cohorte d’immigrants qui sont arrivés en l’an 2000 et qui ont produit leur déclaration de revenus à un moment quelconque entre 2001 et 2010. Ils ont constaté qu’après avoir vécu au Canada pendant une décennie, les immigrants ont plus tendance à posséder une entreprise privée que la population née au Canada, puisque les immigrants doivent d’abord cumuler des connaissances sur les moyens de financement et les réseaux d’entreprise tout en accumulant des actifs.Considérant cette assertion, nous nous sommes penchés davantage sur cette hypothèse : si une plus grande proportion d’immigrants a tendance à posséder des entreprises privées comparativement à la population née au Canada, une fois qu’ils ont vécu au pays pendant au moins une décennie, serait-il possible de cerner la tendance en comparant les cohortes d’immigrants qui sont arrivés au Canada en fonction de leur catégorie d’immigration respective? 

Dans le Recensement de 2016, il est devenu possible de classer les immigrants admis au Canada depuis 1980 en fonction de leur catégorie d’admission respective. Au Canada, les immigrants sont sélectionnés en fonction de trois principaux objectifs : favoriser et promouvoir le développement économique, réunir les familles et respecter les obligations internationales et poursuivre la tradition humanitaire du Canada (accueil de réfugiés) (Statistique Canada).

De 1980 à 1999, près d’un immigrant sur cinq, en moyenne, a été admis à titre de réfugié (figure 9). L’admission de réfugiés au pays a ensuite commencé à diminuer en faveur d’immigrants appartenant à la catégorie économique. En moyenne, de 2011 à 2016, 59 % des immigrants arrivés au Canada ont été admis en vertu de la catégorie économique, soit une augmentation de 38,1 % par rapport au taux de 1980. L’année 2016 fait exception, étant donné le grand nombre de réfugiés syriens admis au Canada pour des raisons humanitaires.

Figure 9 – Distribution (en pourcentage) des immigrants au Canada, selon la catégorie d’admission et l’année d’arrivée Distribution (en pourcentage) des immigrants au Canada, 	selon la catégorie d’admission et l’année d’arrivée

Figure 9 : Version texte
Immigrants vivant au Canada,
selon la catégorie d’admission et l’année d’arrivée
Immigrants économiquesImmigrants parrainés par la familleRéfugiésAutres immigrants
198038,133,228,40,2
199041,434,523,20,9
200056,529,114,20,2
201065,223,99,71,2
201162,225,111,31,3
201560,525,512,61,4
201650,624,124,11,2

Source : Bureau de l’économiste en chef, Affaires mondiales Canada, à partir de données obtenues de Statistique Canada, Recensement de la population, 2016.

En 2017, 25 % des PME du Canada étaient dirigées par un immigrant.
Bureau de l’économiste en chef, Affaires mondiales Canada .

Les immigrants de la catégorie économique ont été sélectionnés pour leur capacité à contribuer à l’économie du Canada, soit en satisfaisant aux besoins du marché du travail, en établissant ou en gérant une entreprise, en faisant un investissement considérable, en créant leur propre emploi ou en répondant aux besoins particuliers d’une province ou d’un territoire. La politique du gouvernement visant l’augmentation du seuil d’immigrants appartenant à la catégorie économique pourrait avoir eu de nombreuses répercussions à long terme sur le profil économique de l’économie canadienne, ce qui suggérerait alors que la politique aura entraîné l’augmentation du nombre d’entreprises en démarrage au Canada au courant des dernières décennies.

Favoriser l’admission des immigrants appartenant à la catégorie économique soutient les constatations découlant de l’Enquête concernant l’augmentation du nombre de PME : au Canada en 2017, 1 PME sur 4 était dirigée par un immigrant, un taux record.

En explorant davantage l’hypothèse de Green et coll., selon laquelle les immigrants améliorent, au fil du temps, leurs connaissances des façons de faire des affaires dans le pays d’accueil, nous avons mis l’accent sur la longévité des PME dirigées par des immigrants, afin de voir s’il y a une augmentation de la longévité moyenne des activités.

Longévité des PME

De nombreuses études ont établi que les PME appartenant à des immigrants ont tendance à avoir une vie plus courte que les PME appartenant à une personne née au Canada. Nous voulions vérifier si c’était toujours le cas. Nous savons que Green et coll. (2016) ont conclu que, au fil du temps, les immigrants approfondissent leur compréhension des moyens de financement, et l’analyse de l’Enquête vient appuyer cette hypothèse. Nous avons déterminé que, en 2014, 3,6 % des PME dirigées par des immigrants ne connaissaient pas les sources de financements dont pouvait se prévaloir leur entreprise. Ce taux est tombé à 1,8 % en 2017. La longévité des entreprises devrait être affectée par l’augmentation des connaissances des immigrants et le recours plus intensif au financement extérieur. Néanmoins, l’analyse de l’Enquête témoigne du contraire : la longévité des PME dirigées par des immigrants a diminué au cours de la période examinée. En 2014, la longévité moyenne d’une PME dirigée par un immigrant était de 15,2 ans. En 2017, elle avait chuté à 13 ans. Il est important de mentionner que la longévité des PME dont les dirigeants sont nés au Canada a également diminué, quoiqu’elle fût encore supérieure à la longévité des PME dirigées par des immigrants, avec une moyenne de 17,9 ans d’activités en 2017.

Les immigrants font-ils trop confiance à la possibilité de faire des affaires avec leur pays d’origine? Morgan et coll. (2018) ont évalué l’intensité des exportations d’entreprises appartenant à des immigrants, ainsi que la relation entre l’intensité des exportations et le rendement financier, en mettant l’accent sur l’excès de confiance des dirigeants d’entreprises, qui a le potentiel d’affecter la prise de décisions et ainsi d’accentuer la prise de risque menant à des activités d’exportation à perte. Ils ont constaté que, en pratique, les propriétaires immigrants peuvent rapidement évaluer le potentiel d’une idée commerciale en vue de mieux se positionner pour l’exploiter, ce qui mène à une croissance plus rapide et des salaires plus élevés. Toutefois, comme ils ont tendance à se percevoir comme des experts du commerce international, ils sont susceptibles de surestimer la valeur réelle de leur capital humain et social dans le domaine. Cet excès de confiance peut venir biaiser leur jugement, accentuer la prise de risque et mener à des activités d’exportation marginales ou à perte.

Les auteurs suggèrent qu’ils pourraient bénéficier de services consultatifs abordables dans le pays d’accueil, suggestion appuyée par les résultats de l’Enquête. Environ 20 % des PME dirigées par des immigrants ont embauché un expert-conseil externe entre 2014 et 2017, comparativement à un taux de plus de 25 % chez les PME dont les dirigeants sont nés au Canada. Selon les 5 facteurs clés et les 5 pièges à éviter pour réussir en affairesNote de bas de page 4de la Banque de développement du Canada, demander des conseils à l’externe est le deuxième des cinq facteurs clés menant au succès. S’ils risquent d’être perçus comme des coûts supplémentaires, les dirigeants de PME immigrants devraient plutôt voir l’embauche d’un expert-conseil externe comme un investissement en vue d’une longue vie. Ces données suggèrent également que le pays d’accueil pourrait bénéficier de la mise en place de mesures servant à soutenir les entrepreneurs immigrants. Il est important de nous rappeler, tel qu’observé dans la section précédente portant sur les obstacles à l’exportation, que les dirigeants de PME nés à l’étranger ont identifié les défis liés à l’internationalisation moins souvent que les dirigeants nés au Canada, mais ont identifié comme élément le plus préoccupant les défis liés aux risques financiers. Cette information soulève une importante question, à savoir si les PME dirigées par les immigrants sous-estiment en fait les risques liés à l’exportation.

Adoption des technologies par les PME dirigées par des immigrants et des PME dont les dirigeants sont nés au Canada

L’Enquête nous a permis de colliger de l’information sur le niveau d’adoption des nouvelles technologies chez les PME canadiennes, particulièrement sur le plan du degré d’innovation, des titres de propriété intellectuelle et du développement de sites Web.

Innovations

L’innovation peut consister en un nouveau produit ou service, à l’intégration d’un nouveau processus ou d’une nouvelle méthode à un produit, à un nouveau processus de fabrication, à l’emploi de nouvelles pratiques opérationnelles ou d’une nouvelle organisation du lieu de travail, où même à une nouvelle méthode pour vendre des produits ou des services. Il a été établi que l’innovation est le facteur le plus important au succès des PME, selon les 5 facteurs clés et les 5 pièges à éviter pour réussir en affaire. En 2017, 32 % des PME dirigées par un immigrant avaient indiqué avoir recouru à au moins un type d’innovation au cours des trois années précédentes, soit un taux plus élevé que les 30,8 % des PME dont les dirigeants sont nés au Canada.

Propriété intellectuelle

Le titre de propriété intellectuelle (PI) est un important outil permettant aux innovateurs de réaliser des bénéfices sur les investissements effectués dans le but d’améliorer un produit ou un service. Les dirigeants de PME ont été sondés sur les ententes de non-divulgation, les secrets commerciaux, les dessins industriels enregistrés et les marques de commerce déposées. Encore une fois, une plus grande proportion de PME dirigées par des immigrants possèdent des titres de PI (30,1 %), comparativement aux PME dont les dirigeants sont nés au Canada (25,9 %).

Niveau de scolarité des dirigeants de PME au Canada

Comme nous l’avons mentionné plus tôt, les politiques liées à l’immigration ont évolué au cours des dernières années, tant sur le plan des catégories d’immigrants que sur le plan des pays d’origine. Nous avons également mentionné un autre changement majeur s’étant produit en 1993 au niveau de la Loi sur l’immigration. Depuis cette date, plus de points sont accordés aux immigrants possédant un niveau de scolarité élevé.

Bien que le nombre annuel d’immigrants ait continué de se situer autour des 25 000 personnes au cours des années 1990, le nombre d’immigrants possédant un diplôme d’études universitaires a grimpé, à partir de 10 000 au début des années 1980 à environ 41 000 en 1995, avant d’exploser à approximativement 78 000 en l’an 2000. Ce nombre est resté stable depuis (Picot et Hou, 2009).

En examinant l’Enquête, nous avons remarqué qu’en 2017, les dirigeants de PME nés à l’étranger étaient plus susceptibles de posséder un baccalauréat que les dirigeants de PME nés au Canada (34,2 % contre 22,6 %), ou un diplôme de maîtrise ou d’un niveau d’études supérieur (22,3 % contre 12,7 %) (figure 10).

Green et coll. (2016) ont constaté que, au Canada, les immigrants qui possèdent un baccalauréat sont 1,5 fois plus susceptibles de posséder une entreprise privée que les immigrants qui possèdent au plus un diplôme d’études secondaires.

Figure 10 – Niveau de scolarité des dirigeants de PME au Canada, en 2017 Figure 10 – Niveau de scolarité des dirigeants de PME au Canada, en 2017

Figure 10: Version texte
ScolaritéDirigeants de PME nés à l'étrangerDirigeants de PME nés au Canada
Moins qu'un diplôme d'études secondaires7,3 %4,4 %
Diplôme d'études secondaires25,8 %16,9 %
Collège/Cégep31,7 %22,1 %
Baccalauréat22,6 %34,2 %
Maîtrise ou plus12,7 %22,3 %

Source : Bureau de l’économiste en chef, Affaires mondiales Canada, à partir de données obtenues de Statistique Canada, Enquête sur le financement et la croissance des petites et moyennes entreprises, 2017.

Les immigrants possédant un baccalauréat sont 1,5 fois plus susceptibles de posséder une entreprise privée qu’un immigrant possédant au plus un diplôme d’études secondaires.
Immigration, propriété d’entreprises et emploi au Canada. 2016. Green et coll. Statistique Canada.

La probabilité qu’une entreprise ait recours à l’exportation pourrait être liée, dans une certaine mesure, au niveau de scolarité du propriétaire, selon Fung et coll. (2019). Ces derniers ont étudié les exportateurs d’entreprises possédées par des immigrants et constaté que ceux qui possèdent un baccalauréat ou un diplôme d’études supérieures sont plus susceptibles d’exporter que les propriétaires qui possèdent au plus un diplôme d’études secondaires. Ils ont aussi constaté que les propriétaires possédant un niveau de scolarité élevé à leur arrivée au pays étaient plus susceptibles d’avoir des répercussions positives sur le commerce international que les autres immigrants.

Ces chiffres sont à peu près équivalents à ceux obtenus à l’Enquête de 2014 et suggèrent que les modifications apportées à la Loi sur l’immigration il y a de cela des décennies ont produit les avantages escomptés. Les immigrants fondent des entreprises, créent des emplois et travaillent à l’amélioration de la capacité d’exportation du Canada.

En 1993, en plus d’accorder plus de points aux immigrants éduqués ou appartenant à la catégorie économique, un plus grand accent a été accordé au domaine d’expertise des immigrants, favorisant les personnes dont la formation touchait à l’informatique ou l’ingénierie. Picot et Hou (2009) ont constaté que les principaux demandeurs de la classe économique et leur conjoint avaient tendance à avoir un haut niveau de scolarité, mais aussi qu’ils étaient plus susceptibles d’œuvrer dans le domaine des technologies de l’information ou de l’ingénierie, comparativement aux personnes nées au Canada

Pangarkar (2007) a mentionné que les répondants à son étude ont indiqué considérer l’apprentissage de nouvelles connaissances comme étant un avantage clé de l’internationalisation. Ces données pourraient suggérer que les propriétaires dont le niveau de scolarité est élevé sont mieux disposés à continuer d’apprendre par eux-mêmes au fil des ans, ce qui les rendrait plus susceptibles d’innover ou d’élaborer de nouveaux produits ou nouvelles technologies.

L’OCDE collecte des données comparant les différents pays de l’Union européenne (28), les pays de l’OCDE et les pays sélectionnés du G20 sur le plan des résultats d’intégration pour les immigrants et leurs enfants. Une personne dont le niveau de scolarité est élevé renvoie à une personne ayant atteint un niveau d’études supérieures (niveaux 5 à 8 de la Classification internationale type de l’éducation). Parmi les pays de l’OCDE, le Canada a atteint en 2017 le taux le plus élevé de personnes nées à l’étranger possédant un niveau de scolarité élevé (figure 11).

Picot et Ostrovsky (2017) ont approfondi davantage cette analyse dans Entreprises appartenant à des immigrants dans les industries fondées sur le savoir, en examinant à l’aide de la BDCDEE le rôle des entrepreneurs immigrants dans l’économie en général, plus particulièrement les entreprises de haute technologie et les entreprises fondées sur le savoir. Ils ont constaté que 13,2 % des entreprises privées constituées en société étaient possédées par des immigrants appartenaient aux industries fondées sur le savoir, comparativement à un taux de 11,1 % chez les entreprises dont les dirigeants sont nés au Canada.

Figure 11 – Pourcentage de la population hautement éduquée dans les pays de l’OCDE, 2017 Pourcentage de la population hautement éduquée dans les pays de l’OCDE, 2017

Figure 11 : Version texte
PaysNé à l'étrangerNatif du pays
Italie12,6 %17,9 %
Chili13,0 %9,4 %
Allemagne22,6 %27,9 %
Union européenne28,7 %29,4 %
France29,4 %34,6 %
Corée du Sud30,0 %49,9 %
Japon32,1 %36,9 %
Mexique36,1 %15,2 %
OCDE total (35)36,8 %32,5 %
États-Unis40,1 %44,6 %
Royaume-Uni48,5 %38,7 %
Australie52,4 %35,7 %
Israël56,9 %41,0 %
Canada60,1 %45,3 %

Source : , Trouver ses marques 2018, Les indicateurs de l’intégration des immigrés.

En examinant de plus près les immigrants de la catégorie économique, on constate que même s’ils sont à peu près aussi susceptibles que les personnes nées au Canada de posséder une entreprise privée constituée en société, ils sont aussi 1,8 fois plus susceptibles de posséder une entreprise dans un domaine lié à la science et aux technologies et 2 fois plus susceptibles de posséder une entreprise liée à l’ingénierie et les technologies de l’information.

Aux États-Unis, Hart et coll. (2011) ont constaté que 16 % des entreprises de technologie de pointe de grande envergure comptaient au moins un immigrant parmi leurs fondateurs. Dans la Silicon Valley de San Francisco, en 2012, des immigrants d’origine chinoise ou indienne dirigeaient 43,9 % de toutes les entreprises de technologie de pointe (Yiang Liu et coll., 2014).

Site Web

On reconnaît généralement l’importance de posséder un site Web dans l’augmentation des ventes, tant à l’échelle locale qu’internationale. Et bien que les PME dirigées par des immigrants semblent plus novatrices que les PME dont les dirigeants sont nés au Canada, l’Enquête montre qu’un plus grand pourcentage de PME dont les dirigeants sont nés au Canada possède un site Web, soit un taux de 54,9 % comparativement au 49,5 % des PME dirigées par des immigrants.

La propension à l’exportation des PME appartenant à des femmes nées au Canada et des PME appartenant à des immigrantes, au Canada

En 2017, des questions supplémentaires ajoutées à l’Enquête ont permis de calculer la propension à l’exportation des femmes nées au Canada ou à l’étranger qui possèdent Note de bas de page 5 une PME. Si en 2017 la propension à l’exportation globale des PME canadiennes se dressait à 11,7 %, ce taux était plus faible chez les PME appartenant à des femmes nées au Canada, soit 9 %. On constatait parallèlement que ce taux atteignait les 16,5 % dans le cas des PME appartenant à des femmes nées à l’étranger.

Non seulement le taux de propension à l’exportation des PME appartenant à des immigrantes est plus élevé que le taux global, il est près de deux fois plus élevé que celui des PME appartenant à des femmes nées au Canada. D’autres caractéristiques propres aux entrepreneuses et aux immigrantes peuvent aider à expliquer ce phénomène.

Figure 12 – La propension à l’exportation des PME appartenant à des femmes nées au Canada et des PME appartenant à des immigrantes, en 2017 a propension à l’exportation des PME appartenant à des femmes nées au Canada et des PME appartenant à des immigrantes, en 2017

Figure 12 : Version texte
Propension à l’exportation d’une PME canadienne dirigée par:(%)
Une femme immigrante16,5 %
Une femme née au Canada9,0 %

Source : Bureau de l’économiste en chef, Affaires mondiales Canada, à partir de données obtenues de Statistique Canada, Enquête sur le financement et la croissance des petites et moyennes entreprises, article spécial, 2017.

D’un côté, comme l’indique Bélanger-Baur (2019), de nombreuses études montrent que les femmes (tant celles nées au Canada qu’à l’étranger) ont tendance à s’impliquer dans les secteurs liés aux services, comme la mode, l’esthétique et la couture, qui sont des activités moins portées à l’exportation. Ce qui distingue les immigrantes des femmes nées au Canada est le fait qu’elles profitent d’abord du marché des communautés ethniques auxquelles elles appartiennent (Zhou, 2004). Lorsqu’elles démarrent leurs entreprises, les immigrantes ont tendance à offrir des biens ou des services originaires de leur pays d’origine, soit afin d’exploiter une niche, soit en raison de leur connaissance de ces produits et services. Leur clientèle, constituée en majorité par d’autres immigrants, comme l’indique Zhou (2004), représente alors un marché homogène de clients possédant des croyances et des besoins que l’immigrante comprend bien et dont elle peut tirer profit. Au fil du temps, l’immigrante en apprend plus sur son pays d’accueil, ce qui lui permet de desservir une clientèle multiculturelle qui recouvre à la fois le marché de sa communauté ethnique et le marché de son pays d’accueil (Essers et Benschop, 2007 et 2009).

Elles élargissent ensuite leur clientèle afin d’y inclure à la fois des clients nés au Canada et des clients nés à l’étranger, ce qui signifie qu’elles ont tendance à posséder des entreprises de plus grande taille que leurs homologues nées au Canada. De nombreuses études réalisées à ce sujet montrent que les entreprises de plus grande envergure sont portées à exporter davantage, ce qui pourrait aider à expliquer pourquoi les PME appartenant à des immigrantes ont un plus grand taux d’exportation. Comme l’indiquent Collins et Low (2010), les entrepreneures immigrantes exploitent les réseaux et les ressources de leur pays d’origine afin d’importer ou exporter des biens et des services. Elles ont tendance sinon à investir à l’étranger dans des bureaux, des usines ou de la machinerie, ou encore à diriger la gestion, la commercialisation et le soutien technique offert aux agents locaux et aux fournisseurs étrangers. Ces femmes sont désignées au titre de « transnational entrepreneurs » (entrepreneuses transnationales) (Essers et Benschop, 2007).

Conclusion

Le Canada est l’un des pays qui comptent l’une des plus forte proportion d’immigrants au monde. La rédaction du présent document a été effectuée dans le but de comparer les caractéristiques des PME canadiennes dirigées par des immigrants aux PME dont les dirigeants sont nés au Canada. En tant qu’entité qui traite du commerce, notre objectif était de déterminer la mesure dans laquelle la présence de PME dirigées par des immigrants améliore les capacités d’exportation du Canada, et la réalisation d’un examen approfondi des caractéristiques des PME au Canada a permis de tirer de nombreuses conclusions et d’observer de nombreuses tendances.

Parmi nos constatations les plus intéressantes, nous avons constaté que la capacité d’exporter vers des marchés étrangers, soit la propension à exporter, était beaucoup plus élevée chez les PME dirigées par des immigrants que chez leurs homologues dont les dirigeants sont nés au Canada, à raison de 14,3 % par rapport à 10,8 %. Selon la littérature abondante, ce phénomène pourrait être expliqué par les réseaux de contacts importants cultivés par les immigrants dans leur pays d’origine. De plus, notre analyse montre que les PME dirigées par des immigrants ont tendance à œuvrer, dans une plus grande proportion, dans des secteurs d’exportation à forte intensité. L’analyse des exportations en fonction de la région et/ou du pays destinataire fait pencher aussi la balance en faveur des PME dirigées par des immigrants, qui sont plus nombreuses à exporter dans la plupart des régions et pays que les PME dont les dirigeants sont nés au Canada.

Nous avons aussi constaté que, au cours des trois dernières années, le taux de PME exportatrices dirigées par des immigrants a augmenté à rythme beaucoup plus élevé que les PME exportatrices dont les dirigeants sont nés au Canada, atteignant un taux de 26,5 % comparativement à seulement 13,7 %. Nous avons émis une hypothèse selon laquelle cette différence pourrait s’expliquer par la catégorie d’immigrants admise au pays, comme le Canada favorise maintenant les immigrants appartenant à la catégorie économique, par opposition aux immigrants appartenant aux catégories de réfugiés ou d’immigrants parrainés par un membre de la famille. Toutefois, nous avons aussi remarqué que la taille des PME dirigées par des immigrants continue d’être inférieure à celle des PME dont les dirigeants sont nés au Canada, tout comme les prévisions relatives à leur longévité.

Une autre constatation importante s’est produite lorsque nous avons comparé la propension à l’exportation des PME possédées par des immigrantes à celles possédées par des femmes nées au Canada. Au Canada, les PME dirigées par des immigrantes exportent presque deux fois plus que les PME dirigées par des femmes nées au Canada. En ce qui concerne l’adoption de technologies, les PME dirigées par des immigrants connaissent une plus grande tendance à l’innovation et à la protection de leurs PI que leurs homologues dont les dirigeants sont nés au Canada, malgré qu’ils soient moins nombreux à avoir déclaré posséder un site Web. Le fait que la Loi sur l’immigration a été modifié de façon à favoriser les immigrants possédant des formations en technologies de l’information ou en ingénierie pourrait expliquer leur présence plus accrue dans le secteur des technologies de pointe.

Enfin, nous avons déterminé que les politiques d’un gouvernement en matière d’immigration pourraient avoir des répercussions à long terme sur le profil économique d’un pays. Au Canada, l’admission des immigrants passe par des critères stricts. En étant sélectif sur le plan du pays d’origine et de la catégorie d’immigrants, le Canada a favorisé l’admission d’une population immigrante dont le niveau de scolarité est élevé. Il semble que les membres de la génération née de parents immigrants entrepreneurs ont tendance à hériter de leur entreprise ou à démarrer leur propre entreprise, ce qui ouvre la voie au renforcement des capacités d’exportation du Canada.

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