Objectifs du Canada pour les négociations d’un accord de libre-échange Canada-ANASE
Le 16 novembre 2021, au cours des 10es consultations entre les ministres de l’Économie de l’ANASE et du Canada, le Canada et l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ANASE)Note de bas de page 1 sont convenus d’engager des négociations en vue d’un accord de libre-échange (ALE) entre le Canada et l’ANASE. Le 24 novembre 2021, le gouvernement du Canada a avisé le Parlement de son intention d’entamer des négociations en vue d’un ALE entre le Canada et l’ANASE, conformément à la nouvelle Politique sur le dépôt des traités devant le Parlement.
Le lancement de négociations sur un ALE représente une étape importante dans les relations entre le Canada et l’ANASE, dans la redynamisation et dans l’approfondissement des partenariats économiques et des liens commerciaux du Canada dans la région indopacifique. Le lancement de ces négociations témoigne de la volonté constante du gouvernement de chercher des occasions d’accroître le libre-échange, notamment par de nouveaux accords bilatéraux et régionaux dans la région indopacifique et de faire progresser la Stratégie de diversification des exportations du Canada au profit des entreprises et des consommateurs canadiens.
Le Canada et l’ANASE ont évalué les avantages d’un éventuel ALE depuis 2017, lorsque des discussions exploratoires ont été lancées, puis suivies par la mise en place d’un Dialogue annuel sur la politique commerciale. Le Canada et l’ANASE ont réalisé une étude conjointe sur le potentiel économique d’un ALE Canada-ANASE, qui a été achevée en 2018. La modélisation du Canada prévoit qu’un ALE pourrait faire augmenter de 2,54 milliards de dollars américains le PIB du Canada et de 2,67 milliards les exportations canadiennes vers les pays de l’ANASE. Ces augmentations s’ajoutent aux gains dont bénéficie déjà le Canada en raison de son accès préférentiel aux marchés du Vietnam et de Singapour dans le cadre de l’Accord de partenariat transpacifique global et progressiste (PTPGP)Note de bas de page 2.
Avant la pandémie de COVID-19, l’ANASE était l’une des régions économiques qui affichait la croissance la plus élevée du monde et, après deux années de ralentissement en raison de la pandémie, l’ANASE devrait rebondir en 2022 pour se classer à nouveau parmi les régions dont la croissance est la plus forte sur la planète. Collectivement, l’ANASE compte le troisième bassin de population
en importance dans le monde, après la Chine et l’Inde, avec plus de 661,8 millions d’habitants. Cumulées, les économies membres de l’ANASE représentent le sixième partenaire commercial en importance du Canada (2020). Malgré une baisse de 1,4 % du commerce bilatéral de marchandises observée pendant la pandémie de COVID-19, le commerce de biens et de services du Canada avec l’ANASE reste important et s’est élevé à 32,9 milliards de dollars en 2020.
Un ALE entre le Canada et l’ANASE qui éliminerait les droits de douane et les autres barrières et qui améliorerait l’accès aux marchés aiderait les entreprises canadiennes à mieux intégrer les chaînes d’approvisionnement dynamiques de la région et à en tirer profit. Un ALE entre le Canada et l’ANASE pourrait également créer un environnement plus transparent, prévisible et accessible pour les investissements canadiens au sein de l’ANASE. Le Canada est maintenant le huitième investisseur étranger en importance dans l’ANASE, mais il prend du retard par rapport à d’autres acteurs de la région qui sont en plein essor.
Les intérêts du Canada dans la négociation d’un ALE avec l’ANASE vont au-delà du renforcement de nos relations en matière de commerce et d’investissement. Un ALE entre le Canada et l’ANASE ferait avancer l’objectif du gouvernement d’approfondir les partenariats du Canada dans la région indopacifique dans le contexte d’un accroissement des activités diplomatiques et de la Déclaration conjointe sur le partenariat renforcé Canada-ANASE. Cet ALE viendrait aussi confirmer le caractère central de l’ANASE, qui, en tant que principe sous-jacent de la coopération, contribue à concrétiser l’attachement du Canada à l’égard d’une région indopacifique libre, ouverte et inclusive.
L’ANASE est un groupe diversifié d’États membres, présentant chacun leurs propres possibilités et points à considérer. L’ALE entre le Canada et l’ANASE envisagé par le gouvernement du Canada est un accord complet et présentant des avantages considérables sur le plan commercial, qui tient compte des différents niveaux de développement des États membres de l’ANASE.
Le gouvernement du Canada a mené des consultations publiques du 1er septembre au 16 octobre 2018 afin de connaître l’opinion des Canadiens sur un éventuel ALE entre le Canada et l’ANASE. Les consultations publiques ont mis en évidence les possibilités importantes relevées par les Canadiens et les entreprises canadiennes sur le marché de l’ANASE dans un certain nombre de secteurs, dont l’agriculture et l’agroalimentaire, les poissons et les fruits de mer, les ressources naturelles, la fabrication et les services financiers. Un certain nombre de communications ont été favorables aux vastes efforts que déploie le gouvernement pour diversifier le commerce du Canada vers la région indopacifique. Les consultations ont également donné lieu au dépôt de mémoires qui demandaient au gouvernement de protéger les secteurs soumis à la gestion de l’offre et de tenter d’éliminer les barrières non tarifaires, tandis que d’autres signalaient les problèmes liés aux droits des travailleurs et aux droits de la personne dans la région. Dans la démarche qu’il adoptera en vue de conclure un ALE avec l’ANASE, le gouvernement sera guidé par les points de vue exprimés lors des consultations publiques et par la participation soutenue des Canadiens tout au long du processus de négociation. La stratégie de négociation du Canada sera aussi guidée par une analyse comparative entre les sexes plus (ACS+) détaillée et une évaluation environnementale.
En plus de nouveaux débouchés, le Canada cherchera à obtenir dans l’ALE que les parties s’engagent à assurer la protection de l’environnement, des droits des travailleurs et des normes du travail, ainsi qu’à promouvoir l’égalité des genres au moyen de dispositions visant à éliminer des obstacles particuliers auxquels les femmes et d’autres groupes sous-représentés font face dans le commerce international. Le Canada préservera le droit des gouvernements d’établir des règlements dans l’intérêt public, y compris dans les domaines de la santé et de la sécurité publique, de l’éducation, des services sociaux et de l’environnement. En outre, le gouvernement cherchera à préserver toute la latitude des pouvoirs publics au Canada pour adopter et maintenir des mesures liées au secteur culturel et remplir leurs obligations juridiques à l’égard des peuples autochtones, y compris les droits ancestraux reconnus et confirmés par l’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982 et les droits énoncés dans les ententes sur l’autonomie gouvernementale.
Le gouvernement du Canada est déterminé à faire preuve d’une grande transparence tout au long de la négociation d’un ALE avec l’ANASE. Dans cet esprit, le gouvernement a accepté de publier un résumé de ses objectifs de négociation précis dans le contexte de la négociation de nouveaux accords commerciaux de large portée.
À la lumière de ce qui précède, le Canada cherchera à négocier un ALE qui :
Commerce de marchandises
Traitement national et accès aux marchés
- Octroie un accès au marché important sur le plan commercial, obtenu par l’élimination des barrières tarifaires et non tarifaires et répond aux préoccupations de certains secteurs canadiens sensibles. Le Canada continuera à préserver entièrement son système de gestion de l’offre pour les produits laitiers, la volaille et les œufs, notamment en ne concédant aucun accès au marché supplémentaire dans ces secteurs.
- Au minimum, réaffirme les principaux engagements internationaux en matière d’accès aux marchés et comprend des dispositions et des mécanismes visant à prévenir l’établissement de barrières non tarifaires et à éliminer les barrières en place.
Règles d’origine et procédures d’origine
- Comprend des règles d’origine et des règles spécifiques aux produits qui permettent le cumul des matières et de la production. Le Canada cherchera à établir des critères pour déterminer l’origine des marchandises qui sont clairs et aussi simples que possible, qui laissent peu de place à l’exercice d’un pouvoir discrétionnaire sur le plan administratif et qui tiennent compte des modèles de production existants et de l’intégration régionale.
- Définit les procédures que doivent suivre les administrations douanières pour appliquer les règles d’origine et permettre aux commerçants de profiter du traitement tarifaire préférentiel offert par l’ALE. Ces procédures soutiendront l’évolution de l’environnement commercial et permettront la certification de l’origine par l’exportateur au moyen de vérifications effectuées selon une approche de gestion des risques après l’importation du produit.
Douanes et facilitation du commerce
- Réaffirme les engagements pris dans l’Accord de l’OMC sur la facilitation des échanges et prend appui sur celui-ci pour aller plus loin. Il s’agira notamment de chercher à obtenir des dispositions qui favorisent un cadre transparent, prévisible et cohérent à la frontière pour faciliter le commerce légitime des marchandises, tout en préservant la capacité du Canada à protéger ses frontières et en procurant de la certitude quant à la capacité du Canada d’appliquer ou de mettre en place de nouvelles mesures qui viennent assurer ou accroître le respect par les commerçants des lois, des règlements ou des exigences procédurales du Canada en matière d’importation, d’exportation ou de transit des marchandises. De telles mesures peuvent, entre autres, viser à assurer la sûreté et la sécurité du Canada et de ses citoyens par la déclaration en bonne et due forme et en détail des marchandises et le paiement des droits, des taxes, des frais et des redevances par les commerçants.
Recours commerciaux
- Réaffirme les droits et obligations des parties découlant des accords de l’OMC en ce qui concerne les mesures globales de sauvegarde, ainsi que les mesures antidumping et compensatoires.
Mesures sanitaires et phytosanitaires
- Réaffirme les engagements pris dans l’Accord sur les mesures sanitaires et phytosanitaires (SPS) de l’OMC et prend appui sur celui-ci afin d’accroître la transparence, de renforcer la coopération et de faciliter le commerce par des mesures fondées sur la science, tout en préservant le droit de prendre les mesures nécessaires à la protection de la vie ou de la santé humaine, animale ou végétale.
- Établit un mécanisme bilatéral pour traiter les questions SPS.
Obstacles techniques au commerce
- Prend appui sur les engagements clés de l’Accord de l’OMC sur les obstacles techniques au commerce pour aller plus loin au moyen de dispositions qui permettent de prévenir et de régler les perturbations créées par la réglementation et les exigences qui en découlent en matière d’essais ou de certification.
- Favorise la transparence et la prévisibilité de la réglementation tout en préservant le droit de chaque partie de prendre des mesures réglementaires dans l’intérêt public pour atteindre des objectifs légitimes de politique publique.
Investissement et commerce des services
Investissement
- Comprend des règles concernant la promotion et la protection des investissements et des investisseurs sous réserve d’une liste négative de réserves, ainsi que des règles et des disciplines transparentes et prévisibles en matière de règlement des différends entre investisseurs et États.
Commerce transfrontières des services et élaboration et administration des mesures (réglementation nationale)
- Énonce des engagements complets, sous réserve d’une liste négative de réserves, visant à garantir l’accès au marché, à éliminer les obstacles et à améliorer sensiblement la prévisibilité, la certitude et la transparence en ce qui concerne le commerce des services entre les parties. Le Canada cherchera à aborder les disciplines relatives aux règlements nationaux et les dispositions visant à faciliter le commerce des services professionnels, y compris des lignes directrices non contraignantes pour la négociation d’accords de reconnaissance mutuelle.
Services financiers
- Comprend des engagements précis en matière de commerce et de protection des investissements dans le secteur des services financiers, qui reflètent la nature spécialisée et hautement réglementée du secteur, tout en préservant la capacité des parties de prendre des mesures d’ordre prudentiel.
Admission temporaire des gens d’affaires
- Vise à renforcer la transparence et à faciliter la mobilité de certaines catégories de gens d’affaires à l’appui du commerce bilatéral de biens et de services et des investissements.
Télécommunications
- Maintient un marché des télécommunications compétitif grâce à une réglementation transparente et efficace.
Autres domaines
Commerce numérique
- Facilite la croissance économique inclusive et les débouchés commerciaux grâce à l’utilisation d’Internet et élimine les obstacles possibles au commerce numérique.
Marchés publics
- Encourage la transparence et la coopération dans les marchés publics et offre un accès réciproque aux marchés publics.
Politique de concurrence
- Vise à promouvoir des marchés concurrentiels et à garantir que les avantages du libre‑échange ne sont pas annulés par des activités anticoncurrentielles, des représentations trompeuses ou des pratiques commerciales mensongères.
Entreprises appartenant à l’État et monopoles désignés
- Veille à ce que les grandes entreprises commerciales appartenant à l’État et les monopoles désignés fonctionnent généralement de manière conforme aux principes du marché, tout en reconnaissant le rôle des entreprises d’État dans le domaine public.
Propriété intellectuelle
- Soutient des régimes de propriété intellectuelle (PI) efficaces, prévisibles et transparents qui maintiennent un équilibre entre les intérêts des titulaires de droits, des intermédiaires et des utilisateurs, et qui tiennent compte d’objectifs de politique publique plus larges. Pour réduire les obstacles au commerce et à l’investissement, l’ALE visera à promouvoir des normes internationales et régionales en matière d’administration, de protection et d’application des droits de propriété intellectuelle et à prendre appui sur de telles normes pour aller plus loin, notamment par la coopération entre les responsables dans le domaine de la PI au Canada et au sein de l’ANASE.
Travail
- Comprend des engagements complets et exécutoires en matière de travail afin de garantir que le commerce et l’investissement ne se font pas au détriment des protections des travailleurs. Le Canada reconnaît que la promotion des droits fondamentaux des travailleurs favorise une croissance et une stabilité équitables.
Environnement
- Comprend des engagements complets et exécutoires en matière d’environnement pour aider à garantir que la protection de l’environnement est maintenue à mesure que le commerce et l’investissement sont libéralisés et pour veiller à ce que le commerce et la protection de l’environnement aillent de pair. Le Canada reconnaît que la promotion du commerce et la protection de l’environnement sont des objectifs interreliés et mutuellement bénéfiques.
Bonnes pratiques de réglementation
- Soutient, dans la mesure du possible, l’élaboration de règlements prévisibles et fondés sur des faits probants en encourageant les bonnes pratiques de réglementation largement acceptées au Canada et dans l’ANASE.
Transparence, lutte contre la corruption et conduite responsable des entreprises
- Favorise un environnement transparent et prévisible pour le commerce et l’investissement en préconisant la transparence, la lutte contre la corruption et la conduite responsable des entreprises.
Commerce et genre
- Comprend des dispositions propres à favoriser l’égalité des genres en cherchant à répondre aux intérêts, aux besoins et aux défis uniques des femmes et d’autres groupes sous-représentés dans le contexte de leur participation au commerce et aux investissements internationaux, et à garantir leur accès aux avantages et aux occasions qui peuvent découler des relations bilatérales de commerce et d’investissement entre le Canada et l’ANASE.
Commerce et peuples autochtones
- Comprend des dispositions propres aux peuples autochtones qui visent à prendre en compte les intérêts, les besoins et les défis particuliers des Autochtones dans le contexte de leur participation au commerce et aux investissements internationaux et à garantir leur accès aux avantages et aux occasions qui peuvent découler des relations bilatérales en matière de commerce et d’investissement entre le Canada et l’ANASE.
Petites et moyennes entreprises
- Comprend des dispositions consacrées aux PME, reconnaissant leur importante contribution à la croissance et au développement économiques et visant à assurer que les PME sont en mesure de saisir et de bénéficier des occasions découlant des relations bilatérales de commerce et d’investissement entre le Canada et l’ANASE. Les dispositions porteront sur les intérêts et les défis propres aux PME lorsqu’elles font des affaires sur les marchés étrangers et viseront à réduire les obstacles à leur participation au commerce et aux investissements internationaux.
Dispositions administratives
Règlement des différends
- Prévoit des moyens équitables, transparents et efficaces de résoudre les différends relatifs à l’accord qui surviennent entre les parties, y compris par la tenue de consultations et un mécanisme contraignant de règlement des différends.
Dispositions institutionnelles et exceptions générales
- Comprend des dispositions détaillées relatives à la mise en œuvre et au fonctionnement continu de l’accord, notamment par la création d’un organe institutionnel chargé de superviser la mise en œuvre, ainsi que des exceptions générales. Les exceptions garantiront que les parties conservent le droit de réglementer dans l’intérêt public, y compris en fonction de leurs intérêts essentiels en matière de sécurité et d’autres raisons liées au bien-être public.
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