Débat ouvert du CSNU sur les violences sexuelles dans les conflits – Déclaration nationale du Canada
14 avril 2021
Madame la Présidente/Monsieur le Président,
La présente déclaration est faite au nom du Canada.
Il y a plus de 20 ans, le Conseil de sécurité adoptait la résolution 1325 et demandait pour la première fois aux États et autres parties aux conflits de prendre des mesures spéciales pour prévenir les violences sexuelles liées aux conflits. Des progrès ont été réalisés depuis, notamment une meilleure compréhension de l’ampleur et de la nature multiforme de cette violence et, bien que grandement insuffisante, une augmentation du nombre de poursuites et de condamnations.
Les impacts de la pandémie de COVID-19 nous rappellent à quel point ces progrès sont fragiles. Alors que le recours à la violence sexuelle comme tactique de guerre, de terreur et de torture s’est poursuivi, la pandémie a compliqué davantage la recherche des responsables et la quête de justice. Elle a fait naître de nouvelle préoccupations en matière de protection fondée sur le genre, notamment en ce qui concerne les couvre-feux, les points de contrôle et les fermetures de frontière, et elle a restreint l’espace opérationnel des organisations qui fournissent des services médicaux, psychosociaux et juridiques aux victimes et aux survivants. Nous devons faire mieux, et nous devons redoubler d’effort pour corriger les lacunes.
En tant qu’États membres, nous devons :
- Enquêter sur les allégations crédibles et amener les responsables à rendre compte de leurs actes;
- Accorder à des tiers indépendants un accès sans entraves pour leur permettre de documenter les violations; et
- Fournir un soutien complet et une justice véritable aux victimes et aux survivants.
Nous devons également nous attaquer aux causes profondes de cette violence. Qu’il s’agisse de violence sexuelle liée à un conflit, d’exploitation et d’abus sexuels, de harcèlement sexuel ou d’autres types de violence sexuelle et sexiste, ces actes constituent des abus de pouvoir. Souvent, ces actes sont aussi l’expression de la misogynie, de l’intolérance, de la discrimination et du racisme, ainsi que de normes socioculturelles qui légitiment, favorisent et perpétuent la violence sexuelle et sexiste.
Trop souvent, les victimes et les survivants sont ciblés en raison de leur orientation sexuelle ou de leur identité de genre, réelle ou perçue. Nous saluons la première participation à ce débat ouvert du Groupe restreint LGBTI, dont le Canada est membre. Il s’agit d’un réel progrès qui permettra d’attirer l’attention du Conseil de sécurité sur la question de la violence sexuelle liée aux conflits exercée contre les personnes LGBTI.
Le Canada remercie le Groupe de travail des ONG d’avoir permis à une représentante du réseau des femmes handicapées du Soudan du Sud d’offrir son expertise au Conseil. Son témoignage souligne l’importance d’une approche intersectionnelle dans la lutte contre la violence sexuelle liée aux conflits, et d’une réponse éclairée par toutes les victimes et tous les survivants.
Inégalités entre les genres, conflits et fragilité sont inextricablement liés. Presque tous les pays qui figurent au bas des indices mondiaux d’égalité entre les genres sont également des États fragiles ou touchés par un conflit. Les sociétés inclusives et qui appuient l’égalité entre les genres sont plus sûres pour tous. Nombre des meilleurs exemples de leadership pendant la pandémie étaient le fait de femmes. Pourtant, au début de la pandémie, moins de 7 % des pays étaient dirigés par une femme, et une enquête menée dans 30 pays dotés de groupes de travail sur la COVID-19 a montré que seuls 24 % des membres de ces groupes étaient des femmes. Dans les pays touchés par des conflits, elles représentaient 18 %.
Le Canada est fier de codiriger la Coalition d’action sur les mouvements et le leadership féministes du Forum Génération Égalité et d’être un membre catalyseur du Mécanisme pour les femmes, la paix et la sécurité et l’action humanitaire. Le Forum Génération Égalité est une initiative unique, centrée sur la société civile, qui permettra de susciter un ensemble d’engagements concrets, ambitieux et transformateurs pour progresser vers l’égalité entre les genres.
La politique étrangère féministe du Canada vise à faire en sorte que les droits de la personne, l’égalité entre les genres, la diversité et l’inclusion soient au cœur de tous nos efforts et engagements internationaux, y compris les efforts visant à favoriser la participation et le leadership des femmes aux processus de résolution de conflits, aux opérations de paix et aux activités de consolidation de la paix des Nations Unies.
Le Canada a lancé cette année une campagne de sensibilisation – Paix au féminin – afin de reconnaître, de soutenir, de protéger et d’inclure les artisanes de la paix. Trop souvent, les artisanes de la paix ne disposent pas d’un financement suffisant, sont peu reconnues, sont exclues des processus de paix officiels et sont la cible de menaces et de violences sexistes pour leur travail de consolidation de la paix et de lutte contre la répression. En plus de cette campagne, le Canada fournit 5 millions de dollars pour soutenir expressément les femmes artisanes de la paix à l’échelle communautaire.
Le Canada cherche également à prévenir la violence sexuelle et fondée sur le genre au pays, notamment en s’attaquant aux niveaux de violence disproportionnés qui visent les femmes et les filles autochtones. L’élimination de toutes les formes de violence sexiste et de discrimination systémique à l’égard des femmes et des filles ainsi que des personnes bispirituelles, lesbiennes, gaies, bisexuelles, transgenres, allosexuelles, en questionnement, intersexuées et asexuées autochtones au Canada fait partie intégrante de l’engagement du gouvernement du Canada envers la réconciliation.
Enfin, le Canada félicite le Secrétaire général pour son rapport et encourage ce Conseil à en suivre les recommandations, notamment :
- Continuer de reconnaître la violence sexuelle comme critère de désignation distinct dans les régimes de sanctions, y compris lorsqu’elle est utilisée comme représailles contre les femmes dans la vie publique et politique;
- Continuer d’inviter la Représentante spéciale du Secrétaire général des Nations Unies sur la violence sexuelle dans les conflits pour communiquer de l’information aux comités des sanctions; et
- Appuyer le déploiement accéléré de conseillers à la protection des femmes dans les opérations de paix.
Ces recommandations sont essentielles pour améliorer la cohérence et l’efficacité de la réponse des Nations Unies aux violences sexuelles liées aux conflits.
Merci.
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