Politique sur la conduite d’un véhicule avec facultés affaiblies

Note circulaire No XDC-0427 du 14 mars 2001

La date la plus récente des changements : le 22 décembre 2015

Le ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement présente ses compliments à Leurs Excellences les chefs des missions accréditées au Canada et aux organisations internationales établies au Canada; il a l’honneur de les informer de sa nouvelle politique envers le personnel diplomatique et consulaire, et envers tous ceux et celles ayant un statut équivalent au Canada, qui seraient présumés avoir conduit un véhicule avec facultés affaiblies ou avoir commis d’autres délits graves de conduite d’un véhicule.

1. Contexte

Le Ministère rappelle aux chefs des missions qu’en vertu de l’article 41 (1) et de l’article 55 (1) de la , toutes les personnes qui bénéficient de privilèges et d’immunités ont le devoirNote de bas de page 1 de respecter les lois et les règlements de l’État accréditaire, sans préjudice de ces privilèges et immunités. La nouvelle politique du Ministère se fonde sur ce principe, mais elle rappelle aussi que la conduite automobile par celles et ceux qui jouissent de privilèges et d’immunités au Canada n’est pas un droit mais un privilège. Dans la mise en oeuvre de cette politique, l’importance primordiale d’assurer la protection et la sécurité des Canadiens et de toute personne se trouvant au Canada, y compris celles des membres du corps diplomatique, guidera le Ministère. Le Ministère n’en réitère pas moins qu’il accorde la plus haute importance aux conventions de Vienne et qu’il respectera, conformément aux engagements pris, les obligations qui y sont stipulées.

2. Le taux d'alcoolémie

Partout au Canada, le taux d'alcoolémie maximum légal pour un conducteur jouissant de tous les privilèges associés au permis de conduire est de 80 milligrammes d'alcool dans 100 millilitres de sang, soit un taux de 0,08. Quiconque conduit un véhicule lorsque son taux d'alcoolémie est supérieur à 0,08 commet un délit criminel.

Quelques précisions pour l'Ontario

Nonobstant ce qui précède, le permis de conduire d'un conducteur débutant et d'un jeune conducteur en Ontario est automatiquement assujetti à la condition que celui-ci ait un taux d'alcoolémie de zéro lors de la conduite automobile. L'expression « jeune conducteur » veut dire un conducteur âgé de moins de 22 ans, ayant résidence en Ontario ou hors cette province. Commet une infraction à la législation ontarienne un conducteur débutant ou un jeune conducteur au volant ayant un taux d'alcoolémie supérieur à zéro, passible d'une amende d'au moins 60 $ et d'au plus 500 $. En plus, le permis de conduire du conducteur débutant peut être suspendu, annulé ou modifié quant à sa catégorie et celui du jeune conducteur peut être suspendu pendant 30 jours.

Aussi, en Ontario, les conducteurs jouissant de tous les privilèges associés au permis de conduire qui sont pris au volent avec un taux d'alcoolémie entre 0,05 et 0,08 (« fourchette d'avertissement ») sont passibles d'une suspension du permis pour une période de 3 jours en cas de première infraction, pendant 7 jours pour une seconde infraction, et pendant 30 jours en cas de troisième infraction ou d'infraction ultérieure.

Pour en savoir davantage sur le taux d'alcoolémie aux termes des lois ontariennes ou celles d'une autre province, il faut joinde le ministère provincial des transports compétent.

3. Politique sur la conduite automobile avec facultés affaiblies et autres délits graves de conduite automobile

Contrôle routier des véhicules portant des plaques d’immatriculation diplomatiques

En cas de doute raisonnable que les facultés du conducteur d’un véhicule portant une plaque d’immatriculation diplomatique sont affaiblies par l’alcool ou toute autre substance, la police peut arrêter le véhicule et demander au conducteur de fournir des pièces d’identitéNote de bas de page 2. Les personnes bénéficiant de l’immunité consulaireNote de bas de page 3 sont visées par la politique énoncée à la note no XDC-4146 du 5 décembre 1996 du Ministère et pourraient devoir se plier à des tests de dépistage. Nonobstant les privilèges et immunités dont profite le conducteur, la police peut ouvrir une enquête si l’agent sur le terrain soupçonne que les facultés du conducteur sont altérées. Dans le cadre de l’enquête, on peut exiger un échantillon d’haleine en bordure de route aux fins de dépistage ou la tenue d’autres tests de sobriété afin de vérifier si la coordination ou les facultés du conducteur sont affaiblies par l’alcool ou d’autres substances. Si le policier a des motifs raisonnables de croire que les facultés du conducteur sont altérées, il en informe le conducteur et exige qu’il se rende au poste de police ou dans tout autre lieu approuvé pour fournir un échantillon d’haleine ou de sang. Les personnes bénéficiant de l’immunité diplomatique doivent savoir que, si elles ne peuvent pas être poursuivies pour des infractions au Canada sans une levée expresse de leur immunité par l’État d’envoi, la police peut porter une accusation contre quiconque refuse, après une demande formelle d’un policier, de fournir un échantillon d’haleine en bordure de route ou au poste, puisqu’il s’agit d’une infraction criminelle au Canada. Les personnes bénéficiant de l’immunité diplomatique peuvent accepter de fournir un échantillon d’haleine ou de sang afin d’établir qu’elles ne conduisent pas avec les facultés affaiblies. Par ailleurs, une fois que le policier a des motifs raisonnables de croire que les facultés du conducteur sont altérées, il prendra toutes les mesures raisonnables pour empêcher le conducteur de reprendre le volant. Il pourrait aller jusqu’à lui retirer ses clés. La police aidera le conducteur à trouver un autre moyen de transport soit, par exemple, en communiquant avec la mission ou un membre de la famille du conducteur, soit en ayant recours au transport en commun. La police ne permettra pas qu’un conducteur, pour sa propre sécurité, quitte la zone où le véhicule a été intercepté à moins que le conducteur soit confié aux soins d’une autre personne disposée et apte à assumer cette responsabilité. Pour des raisons de sécurité publique et pour la protection du véhicule, la police peut prendre des dispositions pour que le véhicule soit déplacé dans un endroit sûr. Le Ministère n’interviendra pas dans les cas où un policier a empêché une personne bénéficiant du statut diplomatique de conduire si le policier a agi conformément à cette politique et dans l’intérêt de la sécurité publique.

4. Mesures subséquentes

Dans tous les cas où le Ministère reçoit un rapport de police au sujet d’un incident où des autorités policières sont intervenues au nom de la sécurité publique pour empêcher de conduire une personne jouissant d’une immunité diplomatiqueNote de bas de page 4, le Ministère communiquera avec le Chef de la mission en cause par écrit afin de l’informer de l’incident et des allégations de la police. Le Ministère informera également le Chef de la mission que les autorités policières ou d’autres autorités pourraient vouloir porter des accusations au criminel. Le Ministère demandera par écrit à l’État accréditant de lever son immunité administrative, afin que le Ministère puisse retenir le permis de conduire de l’intéressé, communiquer avec les autorités compétentes et requérir la suspension du permis pour une période maximale d’un an. Si l’État accréditant accepte de lever l’immunité à cette fin, la Mission devra faire parvenir au Ministère une note confirmant la levée de l’immunité. Ou encore, le Ministère pourra accepter l’engagement, pris par écrit, du Chef de mission qu’il s’assurera que l’intéressé ne conduira pas un véhicule au Canada pour une période maximale d’un an. Dans les cas où l’intéressé, dont le privilège de conduire au Canada aura été suspendu, ne se conformera pas à cette condition du maintien de son affectation au Canada, le Ministère demandera le rappel immédiat de l’intéressé.

5. Inculpation au criminel et procédures judiciaire

 Le Ministère reconnaît que la police portera des accusations s’il y a lieu, indépendamment de l’immunité de la personne concernée. Conformément à la Convention de Vienne sur les relations diplomatiquesNote de bas de page 5, la police ne doit toutefois pas détenir ou arrêter un représentant étranger accrédité bénéficiant du statut diplomatiqueNote de bas de page 6.

Si une personne bénéficiant de l’immunité diplomatique Note de bas de page 7 est accusée d'un acte criminel ou d’une autre infraction devant être portée devant un tribunal, le Ministère communiquera avec le chef de la mission pour demander officiellement que l'État d'envoi lève l'immunité en questionNote de bas de page 8. Dans les cas où une personne est soupçonnée de conduite avec facultés affaiblies, la preuve peut conduire la police à porter des accusations criminelles pour un ou plusieurs des délits suivants : conduite avec facultés affaiblies d'un véhicule à moteur; conduite d'un véhicule à moteur tout en ayant une concentration d'alcool dans le sang de plus que la limite légale de 0,08; avoir eu la garde et le contrôle d'un véhicule à moteur avec facultés affaiblies ou un taux d'alcoolémie de plus de 0,08; ou défaut ou refus de se conformer à une demande d'un policier pour un échantillon d'haleine.

Si l'État d'envoi lève l'immunité, le Ministère en informe les autorités locales compétentes. Le Ministère s’attend à ce que la personne accusée se conforme à la décision du tribunal où l'affaire est jugée.

Si l'État d'envoi décide de ne pas lever l'immunité, le Ministère peut, dans certaines circonstances, accepter un engagement écrit du chef de la mission selon lequel ce dernier veillera à ce que la personne accusée ne conduise pas au Canada pour une période d'au moins un an. Le Ministère demandera également que la personne concernée lui remette volontairement son permis de conduire canadien pour cette période.

Le Ministère considère le respect d'une telle entente comme une condition du maintien de l’affectation de la personne accusée au Canada. Si la personne, dont le privilège de conduire au Canada a été suspendu conformément à un engagement par le chef de la mission, enfreint cette entente de quelque manière que ce soit, le Ministère demandera immédiatement son rappel.

À défaut d’en arriver à une entente sur l’une des options présentées précédemment, le Ministère demandera le rappel de la personne.

6. Récidive ou perpétration de délits de conduite automobile graves

Dans le cas où une personne titulaire de privilèges et d’immunités diplomatiquesNote de bas de page 9 sera interpelée une seconde fois pour conduite avec facultés affaiblies, ou si elle est inculpée d’un délit de conduite automobile ayant causé la mort ou des lésions corporelles, le Ministère demandera à la Mission en cause la levée de l’immunité. Si l’État accréditant refuse de lever l’immunité, le Ministère demandera le départ de cette personne. Dans des cas exceptionnels, le Ministère pourra demander le départ de l’intéressé même si l’État accréditant a accepté de lever l’immunité.

7. Autres considérations

Le Ministère reconnaît que la vaste majorité de celles et de ceux qui jouissent de privilèges et d’immunités au Canada se conforment, comme c’est leur devoir, aux lois locales. Mais qu’une petite minorité ne respecte pas les lois canadiennes et de graves conséquences peuvent s’ensuivre, aux dépens de Canadiens et de toutes les personnes impliquées. Aussi le Ministère est-il décidé à travailler en étroite collaboration avec les autorités policières, afin que sa politique sur la conduite automobile avec facultés affaiblies soit rigoureusement suivie. Les autorités policières seront tenus informés par écrit de toute mesure prise par le Ministère pour donner suite aux rapports qu’aura reçus le Bureau du protocole au sujet d’un délit de conduite d’un véhicule avec facultés affaiblies ou de tout autre délit grave de conduite automobile. Les missions sont priées de revoir la nouvelle politique avec leur personnel, partout au Canada, afin de s’assurer qu’elle est bien comprise. Le Ministère tient à informer les chefs des missions que leur coopération est à la fois attendue et appréciée : ils voudront bien veiller à ce que cette politique soit pleinement respectée. Le Ministère considérera que les transgressions de cette politique par tous ceux et celles qui sont accrédités au Canada, y compris l’inobservation des engagements qui pourraient être pris sur son fondement, comme étant de la responsabilité du Chef de la mission. Le Bureau du protocole, par ailleurs, se fera un plaisir de répondre à toute demande d’éclaircissement de cette politique.

À lire aussi :

Le ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement saisit cette occasion pour renouveler à Leurs Excellences les chefs des missions accréditées au Canada et aux organisations internationales établies au Canada les assurances de sa plus haute considération.

Ottawa, le 14 mars 2001

Notes de bas de page

Note de bas de page 1

Les accords de siège entre le gouvernement du Canada et les diverses organisations internationales comportent également une référence à ce devoir.

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Note de bas de page 2

Les pièces d'identité comprennent un permis de conduire valide et la carte d'identité fédérale émise par le Bureau du protocole.

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Note de bas de page 3

Au Canada, les fonctionnaires consulaires, y compris les consuls généraux, ainsi que certains membres désignés des organisations internationales, jouissent d'immunité fonctionnelle ou limitée, celle-ci étant rattachée au seuls actes accomplis dans l'exercice des fonctions officielles.

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Note de bas de page 4

Advenant qu'une personne ne jouisse que d'immunité limitée ou fonctionnelle et soit donc justiciable des autorités judiciaires et administratives canadienne, le Ministère demandera par écrit à ce que l'État d'envoi lui retourne le permis de conduire pour une période maximale d'un an. Ou encore, le Ministère pourra accepter l’engagement, pris par écrit, du Chef de mission qu’il s’assurera que l’intéressé ne conduira pas un véhicule au Canada pour une période maximale d’un an. Dans l'éventualité où l’intéressé, dont le privilège de conduire au Canada aura été suspendu, ne se conformera pas à cette condition du maintien de son affectation au Canada, le Ministère demandera le rappel immédiat de l’intéressé.

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Note de bas de page 5

Ou en vertu d'autres traités comme les accords de siège dans le cas des organisations internationales.

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Note de bas de page 6

S'agissant des fonctionnaires consulaires, et considérant les dispositions de la Convention de Vienne sur les Relations consulaires, ceux-ci ne peuvent être mis en état d’arrestation ou de détention qu'en cas de crime grave et qu'à la suite d’une décision de l’autorité judiciaire compétente.

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Note de bas de page 7

Advenant qu'une personne ne jouisse que d'immunité limitée ou fonctionnelle (et soit donc judiciable des autorités judiciaires locales, contrairement aux agents diplomatiques) soit inculpée de conduite d’un véhicule avec facultés affaiblies, ou de quelque autre délit majeur de conduite d’un véhicule, le Ministère communiquera avec le Chef de sa mission. Le Ministère, bien que d'avis que l'immunité fonctionnelle ne joue pas dans la plupart des cas de circulation routière, y compris lors de la navette pour le travail, reconnaît néanmoins qu'il appartient aux autorités judiciaires compétentes de trancher en la matière et, le cas échéant, d'accepter que l'immunité soit évoquée. Nonobstant, le Ministère s'attend à ce que l’inculpé comparaisse devant le tribunal saisi et se conforme alors à sa décision et, éventuellement, à toute condamnation au paiement d’une amende ou à suivre obligatoirement quelque programme éducatif ou un traitement. Dans le cas rare où le tribunal détermine que l'immunité prévue pour les personnes bénéficiant d'immunité fonctionnelle s'étend au cas d'infraction en question, le Ministère demandera une levée d'immunité au même titre qu'il le fait dans le cas des personnes jouissant d'immunité diplomatique.

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Note de bas de page 8

Conformément à la pratique canadienne, une demande de levée d'immunité, le cas échéant, comprendra la levée pour les fins de comparution en cour et celle pour l'exécution de la sentence.

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Note de bas de page 9

Advenant qu'une personne ne jouisse que d'immunité limitée ou fonctionnelle soit interpelée une seconde fois pour conduite avec facultés affaiblies, ou si elle est inculpée d’un délit de conduite automobile ayant causé la mort ou des lésions corporelles, le Ministère s'attend à ce que l'inculpé comparaisse devant les autorités locales compétentes et se conforme alors à la décision du tribunal saisi, et, éventuellement, à toute condamnation au paiement d’une amende ou à suivre obligatoirement quelque programme éducatif ou un traitement. Le Ministère pourrait également demander le rappel de la personne.

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