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L’avenir de la diplomatie : Transformer Affaires mondiales Canada – Document de travail (Juin 2023)

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Table des matières

Résumé

Après 3 décennies de sécurité et de prospérité sans précédent, le Canada fait face à un recentrage du pouvoir économique et politique au détriment de ses alliés et partenaires traditionnels, à un retour de la rivalité entre grandes puissances, à une vulnérabilité croissante face à des menaces transnationales comme les changements climatiques et les cyberattaques, ainsi qu’à une évolution technologique rapide. Parallèlement, le tissu social canadien a évolué : les Canadiens ont beaucoup plus de liens avec le reste du monde que par le passé, et leurs attentes sont plus élevées quant à la façon dont leur gouvernement doit promouvoir et protéger leurs intérêts à l’étranger.

Affaires mondiales Canada est au premier plan des politiques et des activités internationales du Canada. Le Ministère a une histoire dont il est fier, mais il doit maintenant s’adapter à un environnement qui évolue rapidement. Aux prises avec des pressions similaires, de nombreux alliés et partenaires du Canada réinvestissent dans leurs capacités diplomatiques. Le Canada doit aussi le faire maintenant, sinon il risque de perdre du terrain face à ses partenaires et à ses concurrents.

Cette revitalisation permettrait à Affaires mondiales Canada :

Pour ce faire, le Ministère devrait :

Un dirigeant principal de la transformation, le sous-ministre adjoint Antoine Chevrier, a été nommé pour créer une équipe et diriger le processus de transformation pour une période initiale de 3 ans (2023-2026). Il rendra compte directement au sous-ministre des Affaires étrangères et, à travers des liens hiérarchiques matriciels, aux sous-ministres du Commerce international et du Développement international. Le sous-ministre des Affaires étrangères fera rapport tous les 6 mois à la ministre des Affaires étrangères et aura à rendre des comptes sur les progrès accomplis.

Pour que cette transformation soit couronnée de succès, il faudra procéder activement à des réaffectations des ressources financières existantes. De nouveaux investissements seront aussi requis pour permettre à Affaires mondiales Canada de s’adapter aux défis des prochaines décennies.

Pourquoi la diplomatie est-elle importante pour les Canadiens?

Aujourd’hui, les défis mondiaux ne connaissent pas de frontières, et les événements qui se déroulent à l’étranger ont une incidence directe sur la prospérité, le bien-être et la sécurité des Canadiens. Nous avons pu le constater au plus fort de la pandémie de COVID‑19, lorsque les perturbations des chaînes d’approvisionnement mondiales ont entraîné des hausses de prix et des pénuries de produits au Canada. L’invasion de l’Ukraine par la Russie a fait grimper le coût des denrées alimentaires et de l’essence dans le monde entier, y compris dans les collectivités partout au Canada. En raison de la montée des tensions et de l’instabilité dans de nombreuses régions du monde, les Canadiens qui voyagent ou vivent à l’étranger peuvent faire face à des dangers imprévus.

Le réseau diplomatique du Canada peut aider. Les Canadiens en poste dans les missions diplomatiques à l’étranger, qui travaillent avec leurs collègues au Canada et avec le personnel recruté sur place, sont les yeux, les oreilles et les jambes du Canada dans le monde. Ils sont les premiers intervenants quand les choses tournent mal et que les Canadiens ont besoin d’aide. Ils négocient les règles et les accords qui toucheront directement les Canadiens, notamment dans les domaines des changements climatiques et des technologies de pointe. Pendant la pandémie, ils ont vu à l’évacuation de dizaines de milliers de Canadiens bloqués à l’étranger et ont facilité l’accès à un approvisionnement limité en équipement de protection individuelle et en vaccins pour les Canadiens au pays. Ils ont aussi fourni un soutien vital en aidant les pays partenaires à faire face à la pandémie. Dans la foulée de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, le réseau diplomatique mondial du Canada a contribué à l’acheminement d’aide humanitaire. Il a travaillé avec des partenaires à des mécanismes permettant d’abaisser le coût des denrées alimentaires et de l’essence, et il a participé à un vaste effort international visant à imposer des sanctions à la Russie et à lui demander des comptes. Ces dernières années, les diplomates canadiens responsables du commerce ont sillonné le monde pour conclure d’importants traités commerciaux, promouvoir les exportations et attirer des investissements, et ils ont ainsi contribué à la création d’emplois au Canada en ouvrant de nouveaux marchés à l’étranger.

Les missions diplomatiques du Canada et le travail de ses représentants au pays et à l’étranger auront encore plus d’importance à l’avenir. Il y a près de 200 pays dans le monde, et le Canada entretient des relations diplomatiques avec la quasi-totalité d’entre eux. Par ailleurs, le Canada compte des représentants au sein de nombreuses instances multilatérales. Certes, le maintien d’un réseau complexe de relations internationales exige du temps, des efforts et des investissements. Mais un engagement diplomatique efficace signifie que, lorsque le Canada est aux prises avec des feux de forêt, des pompiers mexicains, australiens, américains et sud-africains viennent lui prêter main-forte. Cela signifie aussi que lorsque le Canada manque de vaccins contre la COVID, les fournisseurs d’autres pays s’acquittent de leurs engagements. Cela veut dire qu’en cas de détention arbitraire de citoyens canadiens à l’étranger, le monde se mobilise autour du Canada. Cela signifie également que si d’autres pays demandent de l’aide, en particulier ceux qui en ont le plus besoin, le Canada fait sa part.

Au bout du compte, la diplomatie est une question de relations entre les pays. Une bonne partie du travail visant à établir des relations efficaces se passe en coulisses, et les progrès sont souvent lents. Ceci dit, les relations du Canada dans le monde entier — qui ont été bâties et entretenues au fil du temps par des générations de Canadiens et d’employés recrutés sur place en poste au pays et dans les missions à l’étranger — confèrent au Canada une influence à l’échelle planétaire, influence qu’il peut exercer où et quand cela compte le plus. Cela se traduit par une prospérité et une sécurité accrues pour tous les Canadiens.

1. Introduction

Affaires mondiales Canada est à l’avant-scène de la politique étrangère canadienne. Son personnel au Canada et dans les missions à l’étranger travaille 24 heures sur 24 et dans tous les fuseaux horaires pour faire valoir les intérêts du Canada et protéger la population canadienne contre les menaces existantes et nouvelles. Le Ministère contribue à la création d’emplois en soutenant les exportateurs canadiens et en attirant des investissements au pays. Il soutient les Canadiens en détresse à l’étranger. Il collabore avec d’autres pays pour trouver des solutions aux problèmes les plus difficiles de la planète, comme les changements climatiques, les conflits, la faim, les droits de la personne et l’inégalité entre les genres.

Les origines d’Affaires mondiales Canada remontent à 1909 et à la création du ministère des Affaires extérieures. Le Ministère a envoyé les premiers diplomates canadiens pleinement accrédités à Londres, à Paris et à la Société des Nations à Genève au milieu des années 1920.Note de bas de page 1 Quelques années plus tard, il a ouvert des légations (précurseurs d’ambassades à part entière) à Washington, Paris et Tokyo. Le premier consulat général du Canada a ouvert ses portes à New York en 1943.Note de bas de page 2 Le mandat du Ministère s’est élargi pour inclure le soutien aux exportateurs canadiens lorsqu’il a repris le Service des délégués commerciaux de l’ancien ministère de l’Industrie et du Commerce en 1982. Ce mandat s’est encore élargi pour inclure l’aide à la réduction de la pauvreté dans le monde lorsqu’il a fusionné avec l’ancienne Agence canadienne de développement international en 2013. Et depuis près de 100 ans, les ambassades, les hauts-commissariats et les consulats du Ministère dans le monde sont le port d’escale des Canadiens qui cherchent de l’aide à l’étranger.

Bien entendu, le Ministère a pris de l’expansion et a considérablement évolué avec l’élargissement de son mandat. Aujourd’hui, près de 14 000 employés d’Affaires mondiales Canada travaillent à l’administration centrale dans la région de la capitale nationale, dans des bureaux régionaux un peu partout au Canada et dans 178 missions diplomatiques réparties dans 110 pays sur 6 continents, un réseau où œuvrent également les employés de plusieurs ministères fédéraux partenaires et de certaines provinces. D’ici fin 2023, on prévoit que le Canada aura 182 missions réparties dans 112 pays, avec la mise en place d’un observateur permanent et d’une mission auprès de l’Union africaine à Addis-Abeba et l’ouverture de nouvelles missions à Milan (Italie), Suva (Fidji) et Erevan (Arménie). Le réseau de missions apporte son soutien au ministre des Affaires étrangères, au ministre du Commerce international et au ministre du Développement international, ainsi qu’à d’autres ministres dans le cadre des aspects internationaux de leurs mandats.

Ces dernières années, le contexte international est devenu plus complexe et le rythme des changements s’est accéléré. La pandémie mondiale, l’invasion de l’Ukraine par la Russie, la montée en puissance d’une Chine exerçant une influence de plus en plus perturbatrice et les effets croissants des changements climatiques ont montré aux Canadiens que la sécurité et la prospérité dont ils jouissent depuis la fin de la Guerre Froide ne peuvent être tenues pour acquises.

La dernière grande étude du Ministère, et en particulier de son service extérieur, a eu lieu en 1981 : une commission royale dirigée par Pamela A. McDougall, alors sous-ministre de la Santé nationale et du Bien-être social.Note de bas de page 3 Reconnaissant que le Ministère devait s’adapter aux réalités mondiales nouvelles et émergentes, le 16 décembre 2021, le premier ministre Justin Trudeau a demandé à la ministre des Affaires étrangères Mélanie Joly de « diriger la contribution du Canada pour relever les défis mondiaux, notamment en […] renforçant la capacité diplomatique du Canada. »

En mai 2022, la ministre Joly a lancé l’initiative « L’avenir de la diplomatie : transformer Affaires mondiales Canada » aux côtés du sous-ministre des Affaires étrangères. S’appuyant sur un processus exhaustif de consultation, de réflexion et d’établissement de priorités, cette revue interne propose divers moyens de renforcer Affaires mondiales Canada afin de promouvoir et de protéger plus efficacement les intérêts du Canada aujourd’hui et pour de nombreuses années à venir.

Figure 1
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Affaires mondiales Canada en bref :

  • 14 000 employés
  • 178 missions
  • 110 pays

Mandats :

Affaires mondiales Canada définit, façonne et fait progresser les intérêts et les valeurs du Canada dans un contexte mondial complexe. Le Ministère gère les relations diplomatiques, fait la promotion du commerce international, fournit de l’aide consulaire et dirige les efforts du Canada en matière de développement, d’aide humanitaire, de paix et de sécurité à l’échelle internationale. Il contribue également à la sécurité nationale et à l’évolution du droit international.

2. Facteurs de changement

La fin de la Guerre Froide en 1989 a marqué le début d’une période de mondialisation et d’interconnexion sans précédent, centrée sur la prééminence des États-Unis et un réseau de règles internationales largement acceptées, fondées sur des principes démocratiques. Le Canada, entouré de 3 océans et partageant une frontière avec une superpuissance amie et le plus grand marché du monde, a prospéré. Ses diplomates multilatéraux ont participé activement aux négociations sur le désarmement et au démantèlement des stocks d’armes et de munitions de l’ère soviétique. La Convention d’Ottawa de 1997 (également appelée Traité sur l’interdiction des mines antipersonnel) a montré le leadership du Canada à l’échelle mondiale.

Les diplomates commerciaux du Canada ont sillonné le monde pendant cette période, si bien qu’en 2020, le Canada avait un accès privilégié aux marchés à l’origine de 61 % du PIB mondialNote de bas de page 4 (représentant 1,5 milliard de consommateurs) et était le seul membre du G7 à avoir un accord de libre-échange avec tous les autres pays du G7. Les services consulaires ont également crû de manière spectaculaire, alors que de plus en plus de Canadiens voyagent à l’étranger et dans des pays de plus en plus éloignés. L’aide canadienne au développement a contribué à une baisse constante du taux de pauvreté dans le monde, qui a atteint un niveau historiquement bas avant la pandémie de COVID-19. En 2019, 3,5 milliards de personnes avaient atteint les niveaux de santé et de revenu dont jouissaient seulement 1,3 milliard de personnes en 2000.Note de bas de page 5

Au cours des dernières années, le contexte mondial a considérablement changé. La période de mondialisation de l’après-Guerre Froide fait place à une nouvelle ère, marquée par une complexité croissante et une myriade de menaces et d’obstacles nouveaux qui prennent leur source dans les grandes tendances suivantes.

2.1. Déplacement du pouvoir économique et politique vers le Sud et l’Est

Au milieu des années 1970, les pays du G7 – France, États-Unis, Royaume-Uni, Allemagne, Japon, Italie et Canada – représentaient environ 63 % du PIB mondial.Note de bas de page 6 Cela signifie très concrètement que lorsque le G7 prenait position, le reste du monde suivait. La part du G7 dans l’économie mondiale, qui atteignait 66 % à la fin de la Guerre Froide, s’élève aujourd’hui à 44 %. En 2023, la Chine représente à elle seule 18 % de la production économique mondiale actuelle. Le Canada est passé de la 7e économie en importance en 1976 au 10e rang aujourd’hui.Note de bas de page 7 Le déplacement du pouvoir économique a entraîné des changements dans le domaine politique. La Chine, l’Inde et d’autres économies émergentes sont en plein essor. Collectivement, les pays du BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud) visent à redéfinir des éléments clés des règles et normes internationales existantes et s’emploient activement à mettre en place de nouvelles institutions et de nouveaux discours pour soutenir cette approche. Certains pays en développement et certaines économies émergentes se sont sentis contraints de choisir entre les différentes sphères d’influence, en particulier compte tenu du fossé qui se creuse de plus en plus entre les régimes démocratiques et les régimes autoritaires. Tout cela signifie que la carte du pouvoir mondial a progressivement basculé vers le Sud et l’Est, tandis que le Canada et ses partenaires les plus proches restent largement au Nord et à l’Ouest.

Figure 2
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La part des pays du G7 dans le PIB mondial a considérablement diminué

Part du PIB19751991 (fin de la guerre froide)2023
Part du PIB mondial – Autres pays37 %34 %56 %
Part du PIB mondial – Pays du G763 %66 %44 %

Source : Council on Foreign Relations. What does the G7 do?, 2022.

2.2. Retour de la rivalité entre grandes puissances et affaiblissement de l’ordre fondé sur des règles

Après 40 ans de paix et de prospérité relatives, nous assistons à un retour de la rivalité entre grandes puissances. La montée en puissance de la Chine en tant qu’acteur mondial, tant sur le plan économique que sur le plan militaire, représente un défi direct pour l’ordre mondial fondé sur des règles. La Russie a abandonné toute prétention de respect de la souveraineté et de l’intégrité des territoires et est revenue à l’agression militaire, lançant la guerre la plus brutale en Europe depuis la Seconde Guerre mondiale. La coopération entre la Chine et la Russie s’intensifie, y compris dans l’Arctique, où le Canada, les États-Unis et les partenaires nordiques sont confrontés à une nouvelle réalité géopolitique. L’avènement d’une nouvelle ère multipolaire s’est accompagné d’un net affaiblissement des règles internationales convenues. Les conflits entre États sont en hausse : 56 ont été enregistrés en 2020,Note de bas de page 8 soit le nombre le plus élevé depuis le début des années 1990. Ces crises sont plus longues, perdurent et se prêtent moins bien aux formes traditionnelles de résolution. De plus, les démocraties sont aux prises avec des défis importants, notamment la montée d’un populisme malveillant qui, dans certains pays, a encore davantage affaibli l’ordre international fondé sur des règles.

2.3. Impact accru de forces transnationales

Le Canada fait aussi face à des défis complexes qui transcendent les frontières internationales et échappent au contrôle d’un seul État. Des acteurs hostiles, étatiques ou non étatiques, les cybermenaces, la criminalité organisée, la faiblesse de la gouvernance internationale et le déclin de la primauté du droit n’en sont que quelques exemples. Les pressions migratoires augmentent, car des millions de personnes dans le monde fuient les conflits et d’autres menaces. La pandémie de COVID-19 a montré à l’ensemble des Canadiens leur vulnérabilité face à des menaces provenant de l’étranger. Elle a également mis en lumière l’importance de chaînes d’approvisionnement fiables et résilientes. Plus récemment, les répercussions de l’invasion de l’Ukraine par la Russie ont mis en évidence la vulnérabilité de millions de personnes dans le monde face à l’insécurité alimentaire. Et, bien sûr, la planète entière est confrontée à la menace existentielle des changements climatiques qui, entre autres impacts, ont quintuplé le nombre des catastrophes naturelles au cours des 50 dernières années, ce qui a multiplié par 7 les pertes économiques subies entre les années 1970 et les années 2010.Note de bas de page 9 La lutte contre les changements climatiques et les problèmes connexes, tels que la perte de biodiversité et les migrations de masse, nécessite non seulement une vaste collaboration internationale, mais aussi des investissements majeurs, y compris par le Canada.

2.4. Nouvelles technologies et nouveaux domaines de concurrence

Partout où se pose leur regard, les Canadiens constatent que leur monde est en train de changer et que le rythme du changement s’accélère. Les nouvelles technologies transforment la production et la demande de main-d’œuvre comme jamais auparavant. Les Canadiens ont déjà ressenti cette dynamique dans leur vie professionnelle et personnelle, mais des changements encore plus importants pourraient se profiler à l’horizon. Les nouvelles technologies telles que l’intelligence artificielle, alimentée par l’apprentissage automatique, l’informatique quantique et les progrès de la biotechnologie pourraient s’avérer plus importantes que l’invention de l’imprimerie ou d’Internet. Il est impossible de savoir si la révolution numérique et les révolutions connexes auront en fin de compte un effet positif sur les relations internationales, en permettant aux pays de travailler ensemble de manière plus collaborative et plus efficace et en renforçant le développement démocratique. Mais les nouvelles technologies présentent déjà de nouvelles menaces sous la forme de technologies militaires mises au point par des adversaires, d’un autoritarisme favorisé par la technologie, d’une augmentation des cybermenaces, d’information trompeuse et de désinformation générée par l’intelligence artificielle – autant de menaces pour la démocratie, la prospérité et la sécurité nationale du Canada. Les progrès technologiques ouvrent également la voie à de nouvelles rivalités géopolitiques, y compris dans l’espace et dans les grands fonds marins. Il y a là des possibilités pour le Canada, mais aussi de nouvelles menaces. Voilà pourquoi le Canada doit, plus que jamais, être présent dans tous les forums internationaux qui influenceront l’élaboration de nouvelles normes et règles internationales liées aux technologies émergentes.

2.5. Un Canada en pleine mutation

Enfin, le Canada d’aujourd’hui n’est plus celui d’il y a plusieurs décennies. La population autochtone du Canada a augmenté de 56,8 % entre 2006 et 2021, soit près de 4 fois plus vite que la population non autochtone.Note de bas de page 10 D’importants changements démographiques et sociaux ont modifié les attentes de la population canadienne à l’égard de leur gouvernement à l’échelle internationale et de la manière dont il devrait les représenter et les servir à l’étranger. Près du quart de la population canadienne est née à l’étranger, le taux le plus élevé parmi les pays du G7, et ce pourcentage devrait atteindre jusqu’à un tiers de la population au cours des 20 prochaines années. Dans les grandes régions métropolitaines comme Vancouver et Toronto, près du quart des enfants commencent l’école sans que le français ou l’anglais soit leur langue première.Note de bas de page 11 L’Inde, la Chine et l’Afghanistan étaient les 3 principaux pays d’origine des nouveaux résidents permanents canadiens en 2022; la part globale des nouveaux immigrants au Canada en provenance du Nigéria, des Philippines, de la France, du Pakistan, de l’Iran, des États-Unis et de la Syrie est également en hausse.Note de bas de page 12 L’essor des voyages et des télécommunications modernes et abordables (y compris les médias sociaux) permet à tous les Canadiens d’être davantage en contact avec le monde extérieur. Cela signifie également que les Néo-Canadiens peuvent maintenir des liens plus étroits avec leur pays d’origine.

Affaires mondiales Canada s’est bien entendu adapté à ces facteurs de changement. Ces dernières années, le Ministère a entrepris de nouveaux programmes et investissements pour accroître son rayonnement diplomatique et sa mobilisation internationale, créer davantage d’espaces et de possibilités de collaboration avec des alliés, des partenaires aux vues similaires et des partenaires non traditionnels, et améliorer les services aux Canadiens à l’étranger. Ces programmes et investissements visaient aussi à soutenir les pays en développement dans des domaines clés tels que les changements climatiques et à étendre sa présence dans des emplacements stratégiques essentiels à la prospérité et à la sécurité du Canada, ainsi qu’aux relations que nos citoyens entretiennent. Ces investissements sont notamment les suivants :

Renforcement de la sécurité et de la préparation dans les missions à l’étranger (2017)

Le Ministère investit 1,8 milliard de dollars sur 10 ans pour améliorer la sécurité et s’assurer qu’il peut s’acquitter de son obligation de diligence à l’égard de ses employés et des autres Canadiens en poste dans ses missions à l’étranger.

Accroissement du financement de l’action climatique (2021)

Affaires mondiales Canada affecte une part importante des 5,3 milliards de dollars sur 5 ans que le Canada fournit pour appuyer les efforts des pays en développement en matière de lutte contre les changements climatiques et de prévention de la perte de biodiversité.

Augmentation des capacités consulaires (2022)

Affaires mondiales Canada investit 101,4 millions de dollars sur 6 ans pour améliorer la communication avec les Canadiens à l’étranger et renforcer le soutien en cas de crise.

Stratégie pour l’Indo-Pacifique (2022)

Dans le cadre de la Stratégie du Canada pour l’Indo-Pacifique de 2,3 milliards de dollars, Affaires mondiales Canada investit 637,7 millions de dollars sur 5 ans pour renforcer son soutien aux exportateurs canadiens, pour accroître son aide au développement des pays partenaires, notamment dans le domaine de la réduction des risques de catastrophe, pour renforcer les liens interpersonnels au moyen de bourses d’études et pour améliorer la sécurité, y compris la cybersécurité.

Augmentation des capacités axées sur la Chine (2022)

Le Ministère coordonne un investissement de 35 millions de dollars sur 5 ans afin de renforcer les capacités d’analyse axées sur la Chine dans l’ensemble de son réseau de missions dans le monde et au sein du gouvernement du Canada, d’améliorer la coordination des politiques interministérielles, d’élargir la collaboration avec les provinces et les territoires et de renforcer la mobilisation des chercheurs et de la société civile du Canada.

Présence accrue à l’étranger (2023)

Le Ministère aura investi, d’ici la fin de 2023, 110 millions de dollars afin d’établir une mission entièrement dédiée et un observateur permanent auprès de l’Union africaine, à Addis-Abeba; de convertir les bureaux canadiens en Estonie, en Lituanie, en Slovaquie et au Rwanda en ambassades et en hauts-commissariats à part entière avec des chefs de mission résidents; et d’ouvrir de nouvelles missions en Arménie, aux Fidji et à Milan. Le Ministère renforcera également sa présence à l’ambassade de Lettonie en 2024.

Effectif plus diversifié et milieu de travail plus sain (en cours)

Bien qu’il reste encore du travail à faire, la mise en œuvre d’une stratégie et d’un plan d’action de lutte contre le racisme à l’échelle du Ministère, ainsi que d’un plan d’action pour la réconciliation, est en cours. Au total, 26,2 % des employés canadiensNote de bas de page 13 du Ministère sont maintenant issus de minorités visibles, et la moitié des chefs de missionNote de bas de page 14 sont des femmes. En février 2023, le Ministère a établi un Bureau de l’ombud afin de favoriser un milieu de travail dans lequel chacun est traité avec respect et dignité.

Ces initiatives et investissements récents constituent un bon point de départ sur lequel capitaliser. Cependant, Affaires mondiales Canada n’a pas encore entrepris le type d’exercice de modernisation exhaustif et ambitieux nécessaire pour répondre pleinement aux changements survenus à la fois au Canada et dans le contexte international plus large.Note de bas de page 15 Certains pays partenaires du Canada ont déjà lancé des initiatives concrètes pour répondre à l’évolution du contexte mondial. Les États-Unis, par exemple, ont lancé leur exercice de « modernisation du département d’État » en octobre 2021 (avant cela, leur dernier changement majeur remontait à l’adoption de la loi historique sur le service extérieur en 1980). En 2023, la France a achevé sa propre révision du service diplomatique, qui entraînera la création de 700 postes supplémentaires et une augmentation de 20 % du budget annuel du ministère. Au Parlement canadien, le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international mène une étude sur « le service extérieur canadien et d’autres éléments de l’appareil de politique étrangère au sein d’Affaires mondiales Canada » et présentera son rapport en décembre 2023.

3. De quel type de ministère des affaires mondiales le Canada a-t-il besoin?

Pour servir efficacement le Canada et la population canadienne, Affaires mondiales Canada doit être en mesure de :

Affaires mondiales Canada doit jouer un rôle prépondérant dans les dossiers prioritaires sur la scène internationale, être en mesure d’aider les Canadiens en cas de problème et appuyer l’élaboration de stratégies pangouvernementales intégrées. Les partenaires du gouvernement fédéral comptent sur Affaires mondiales Canada pour définir l’orientation générale de la politique étrangère canadienne, réunir les parties prenantes, diriger les collaborations du Canada à l’échelle mondiale sur un éventail de questions et les aider à accomplir leurs importants mandats et engagements internationaux. De même, les provinces, les territoires, le secteur privé, la société civile et le milieu universitaire s’attendent à ce qu’Affaires mondiales Canada encadre les efforts déployés à l’égard d’enjeux mondiaux transversaux qui recoupent leurs propres responsabilités et intérêts. Enfin, le Ministère doit maximiser les avantages de regrouper sous un même toit tous les grands éléments de la collaboration internationale moderne : affaires étrangères, commerce international, développement international et politiques et programmes consulaires. Pour être vraiment efficace, Affaires mondiales Canada doit être bien plus que la somme de ses parties.

Le Canada a besoin d’un ministère :

En mesure d’exercer une influence stratégique là où il le faut et quand il le faut.

Ouvert sur le monde et en phase avec les Canadiens.

Capable de réagir avec souplesse face à de nouveaux défis et à de nouvelles possibilités.

Il doit jouer un rôle de premier plan dans les efforts pangouvernementaux en matière de politiques à l’échelle internationale.

Doté d’un effectif diversifié, hautement qualifié, bilingue, en bonne santé et voué à l’excellence.

4. Comment y parvenir? Champs d’action et recommandations

Les 4 champs d’action et les recommandations qui suivent sont le fruit d’un vaste processus de consultation, d’analyse et de réflexion qui a duré plusieurs mois. Le Ministère a mené plus de 80 consultations avec le personnel d’Affaires mondiales Canada à l’administration centrale et dans les missions, tous secteurs confondus, ainsi qu’avec le Conseil sur la diversité et l’inclusion, le Secrétariat de lutte contre le racisme et les syndicats. De vastes consultations ont également eu lieu avec des pays ayant réalisé des exercices de modernisation similaires, d’autres partenaires du gouvernement fédéral, des provinces ayant des représentations au sein des missions canadiennes à l’étranger, d’anciens hauts fonctionnaires et d’autres intervenants clés. En tout, plus de 9 000 idées et propositions individuelles ont été reçues et examinées.

De plus, le Ministère a tiré avantage d’un conseil consultatif externe auprès du sous-ministre des Affaires étrangères, qui a également consulté d’autres pays et intervenants clés, comme les chefs de mission actuels et anciens et le Réseau des jeunes professionnels d’Affaires mondiales Canada.

Dans l’ensemble, un degré de convergence remarquable est ressorti des réponses des personnes consultées. Il y a eu certes quelques différences d’orientation, mais la plupart (tant au Canada qu’à l’étranger) ont convenu qu’un véritable changement se produirait si on accordait la priorité à une combinaison de facteurs, à savoir l’expertise en politiques, une présence adéquate à l’étranger, l’effectif, ainsi que les processus et outils nécessaires pour exécuter les multiples mandats du Ministère.

Les recommandations qui suivent s’articulent donc autour de 4 « champs d’action » clés.

  1. Acquérir une nouvelle expertise en politiques et renforcer la capacité de gérer les crises qui perdurent.
  2. Accroître la présence à l’étranger.
  3. Investir dans le personnel d’Affaires mondiales Canada.
  4. Investir dans les outils, les processus et la culture du Ministère.

Les champs d’action ne doivent pas être considérés comme distincts ou cloisonnés, mais plutôt comme un ensemble de mesures qui se renforcent mutuellement pour préparer le Ministère aux défis d’aujourd’hui et de demain.

4.1. Acquérir une nouvelle expertise sur les enjeux internationaux cruciaux pour l’avenir du Canada et renforcer la capacité de prévoir et de gérer les crises qui perdurent

a) Pourquoi?

Comme on l’a expliqué plus tôt, le Canada est plus que jamais aux prises avec un éventail grandissant de dossiers complexes et multiformes. Compte tenu du rythme actuel des changements, Affaires mondiales Canada devrait renforcer sa capacité à prévoir et à analyser les tendances mondiales importantes pour le Canada et à recommander des politiques pour y faire face et protéger les intérêts canadiens.

En même temps, les expériences récentes en Afghanistan, en Ukraine, au Soudan et en Haïti ont montré que des crises initialement perçues comme « internationales » peuvent rapidement prendre des dimensions politiques nationales importantes (p. ex., afflux soudains de réfugiés) ou se poursuivre pendant une longue période. En tant que principal ministère fédéral chargé de toutes les questions internationales, Affaires mondiales Canada doit continuer à fournir une solide plateforme pangouvernementale pour appuyer la réponse opérationnelle et stratégique du Canada face aux crises à court terme et aux crises qui perdurent dans un monde de plus en plus complexe.

b) Comment?

Renforcer les capacités dans les principaux secteurs de politiques.
Accroître la capacité globale à comprendre les répercussions des principaux changements géopolitiques et géoéconomiques et à agir rapidement en conséquence, dans la défense des intérêts du Canada.
Accroître la capacité de prévoir et de gérer la réponse pangouvernementale aux crises géopolitiques et sécuritaires.

4.2. Renforcer la capacité du Canada à exercer une influence en augmentant sa présence à l’étranger, y compris dans les instances multilatérales

a) Pourquoi?

La diplomatie est une question d’influence – la capacité de convaincre ou de dissuader les autres au service des intérêts du Canada dans le monde. À l’étranger, le Canada exerce son influence principalement par l’intermédiaire de son réseau de missions diplomatiques, qui mènent une série d’activités à l’appui des objectifs du Canada en matière de politique étrangère, de politique de développement et de politique commerciale. Ces activités comprennent notamment les programmes qui fournissent un soutien financier direct aux pays partenaires pour lutter contre les changements climatiques, les conflits et la faim, et pour promouvoir l’égalité des genres.

Les missions diplomatiques du Canada sont dirigées par des ambassadeurs, des hauts-commissaires et d’autres hauts fonctionnaires qui exercent les fonctions de chefs de mission. Ils dirigent des équipes de spécialistes de la politique étrangère, de la promotion du commerce et de l’attraction d’investissements, des affaires consulaires et du développement international. Ces équipes comprennent des Canadiens en poste à l’étranger et des employés recrutés sur place, pour la plupart des ressortissants des pays hôtes, qui exécutent directement les programmes et fournissent des services communs pour soutenir le fonctionnement des missions et les activités d’un large éventail de ministères et d’organismes fédéraux et de provinces canadiennes.Note de bas de page 16 Les missions du Canada à l’étranger accueillent régulièrement des visites du premier ministre et d’autres ministres, de premiers ministres provinciaux, de hauts fonctionnaires de l’ensemble du gouvernement, de délégations commerciales et de personnalités de premier plan du milieu culturel, ce qui contribue à accroître l’influence du Canada à l’étranger.Note de bas de page 17

Figure 3
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Dépenses des ministères des Affaires étrangères par habitant, 2021-2022 (affaires étrangères, commerce et aide internationale)

PaysDépenses totales (2021-2022)Dépenses par habitant
Allemagne27 769 002 065 $334 $
Royaume-Uni19 983 874 933 $297 $
Australie6 028 800 000 $233 $
Canada8 530 000 000 $223 $

Remarque : Ces chiffres doivent être interprétés comme des estimations approximatives visant à mettre en contexte de manière générale les dépenses d’Affaires mondiale Canada.

Source : Les chiffres sont tirés des budgets, des rapports financiers et des sites Web des gouvernements et des ministères des Affaires étrangères de ces pays. Les données relatives à la population et au PIB sont tirées des rapports du Fonds monétaire international. Remarque : Lorsque les mandats relatifs aux affaires étrangères, au commerce international et au développement sont répartis entre plusieurs organismes, les budgets respectifs ont été comptabilisés. Ces chiffres n’ont pas été approuvés par les autorités compétentes australiennes, allemandes ou britanniques.

C’est par son réseau de missions à l’étranger et la qualité des personnes qui y travaillent qu’Affaires mondiales Canada procure sa plus grande valeur ajoutée aux politiques et aux programmes du gouvernement du Canada. On s’attend à ce que d’ici la fin de 2023, le réseau actuel comprenne 182 ambassades, hauts-commissariats et consulats dans 112 pays.Note de bas de page 18

Alors que le nombre de missions du Canada à l’étranger est demeuré relativement stable au fil du temps,Note de bas de page 19 la présence globale du Canada et sa capacité à exercer une influence à l’étranger n’ont pas suivi le rythme de l’évolution des réalités mondiales. Le graphique ci-dessous présente les dépenses des ministères des Affaires étrangères de pays d’optique commune, par habitant, y compris pour leurs missions à l’étranger.

La composition du personnel et le nombre d’employés du Ministère affectés à l’étranger ont fluctué au fil du temps, principalement en raison des différents cycles d’examen des dépenses (les postes à l’étranger sont beaucoup plus coûteux qu’à l’administration centrale) et des progrès technologiques (plusieurs fonctions autrefois exécutées par des employés à l’étranger sont désormais automatisées, nécessitent beaucoup moins d’intervention humaine ou peuvent être exécutées par l’administration centrale). Le point culminant a été atteint avec 2 993 employés canadiens outre-mer à la fin de la Guerre Froide en 1990. Ce nombre avait diminué à 2 014 en 1998. En 2022, il y avait 2 777 employés canadiensNote de bas de page 20 en poste à l’étranger.

La représentation du Canada à l’Organisation des Nations Unies (ONU) est aujourd’hui l’une des plus faibles parmi les partenaires et concurrents du G7 et du G20, bien que le Canada soit le 7e donateur en importance. Le système des Nations Unies est au cœur de l’établissement des normes et de l’élaboration des règles dans un large éventail de domaines cruciaux pour l’avenir du Canada (p. ex., le développement des technologies 6G et les règles relatives à l’utilisation des grands fonds marins). Les intérêts à long terme du Canada exigent que ses diplomates soient présents dans les endroits où cela se passe.

Figure 4
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Comparaison de la présence à l’étranger

Nombre d'équivalents temps plein à la mission permanente à New York en comparaison avec d’autres pays

Pays (année)ETP à la mission permanente à New York
Russie (2020)200
États-Unis (2020)150
Chine (2023)140
Allemagne (2020)120
Royaume-Uni (2020)108
Japon (2023)102
France (2020)73
Indonésie (2020)65
UE (2020)60
Italie (2020)60
République de Corée (2023)35
Australie (2020)30
Canada (2022)25*

Nombre de pays ayant une présence diplomatique en comparaison avec d’autres pays

PaysNombre de pays ayant une présence diplomatique (2023)
Japon196
République de Corée191
Royaume-Uni178
France168
Allemagne153
Inde143
Turquie136
Brésil133
Australie122
Canada110
Afrique du Sud102
Norvège81

Sources : Graphique de gauche : Document de la MPONU (2021) : Harmoniser les intérêts et les ressources humaines du Canada à l’ONU à New York; MPONU, 8 février 2023. Graphique de droite : Affaires mondiales Canada; ministère des Affaires étrangères et du Commerce, Australie; ministère des Affaires étrangères, Norvège; ministère des Affaires étrangères, République de Corée; ministère des Affaires étrangères, Japon; ministère fédéral des Affaires étrangères, Allemagne; ministère de l'Europe et des Affaires étrangères, France; Bureau des Affaires étrangères, du Commonwealth et du Développement, Royaume-Uni; ministère des Affaires extérieures, Inde; ministère des Affaires étrangères, Türkiye; ministère des Affaires étrangères, Brésil; ministère des Affaires internationales et de la Coopération, Afrique du Sud.

* Il convient de noter que le nombre d'équivalent temps plein (ETP) du Canada comprend les autres ministères (7 ETP), mais exclut les services communs et les postes d’une durée déterminée. Les chiffres du Canada et des pays d'optique commune incluent les diplomates nationaux et les employés recrutés sur place; la Chine et la Russie n'ont pas d’employés recrutés sur place.

b) Comment?

Il convient de réexaminer les endroits où le Canada est représenté à l’étranger et ses modes de représentation. Certes, les progrès technologiques offrent de nouvelles possibilités de collaboration virtuelle et hybride à l’échelle mondiale, mais une présence renforcée sur le terrain est nécessaire pour rendre compte des résultats, et défendre et représenter les intérêts stratégiques du Canada là où cela importe le plus. Il pourrait aussi être nécessaire d’examiner où la présence devrait être redéployée, afin de fournir un appui dans les régions où les intérêts du Canada sont plus importants.

À cette fin, Affaires mondiales Canada devrait :

Renforcer la présence du Canada dans les instances internationales qui comptent le plus pour le Canada.

Renforcer la présence du Canada dans les pays clés du G20 et dans d’autres pays d’importance stratégique.

Élaborer et mettre en œuvre un mécanisme permettant d’examiner et de rééquilibrer régulièrement la présence du Canada à l’étranger.

Utiliser des moyens novateurs afin d’exercer une influence à l’étranger.

Renforcer sa capacité de communication, de défense des intérêts, de mobilisation et de consultation, afin d’atteindre plus efficacement les intervenants et les publics canadiens et étrangers.

4.3. Veiller à ce qu’Affaires mondiales Canada compte un personnel hautement qualifié, bilingue, diversifié, en bonne santé et capable de produire des résultats de calibre mondial pour les Canadiens

a) Pourquoi?

Les employés d’Affaires mondiales Canada, qu’ils soient des employés canadiens ou recrutés sur place, sont au cœur de toutes les activités du Ministère. Ils travaillent 24 heures sur 24 et dans le monde entier, souvent dans des postes difficiles, loin de leur famille et de leurs proches. Le Sondage auprès des fonctionnaires fédéraux 2022 montre que 85 % des employés d’Affaires mondiales Canada sont fiers de leur travail Note de bas de page 23. Cependant, l’un des messages les plus clairs issus des consultations et des sondages menés pour préparer ce rapport est le suivant : il faudra rapidement moderniser et renforcer bon nombre des pratiques et des systèmes de ressources humaines d’Affaires mondiales Canada afin de garantir que tous les employés puissent donner le meilleur d’eux-mêmes au travail. Les employés ont de plus grandes attentes envers leur milieu de travail aujourd’hui. Le passage au travail hybride, le resserrement du marché du travail, le rééquilibrage démographique et les progrès rapides de la technologie ne sont que quelques-uns des facteurs qui touchent Affaires mondiales Canada et sa capacité à attirer et à retenir les meilleurs talents.

L’effectif du Ministère est complexe. Il y a environ 8 300 employés canadiens et 5 600 employés recrutés sur place. À l’intérieur du groupe des employés canadiens, on compte quelque 2 000 agents du service extérieur (permutants).Note de bas de page 24 L’équilibre entre le service extérieur et les autres groupes professionnels s’est considérablement modifié au cours des 20 dernières années. Il y a 20 ans, la majorité du personnel était composée d’employés du service extérieur, alors qu’aujourd’hui, la grande majorité (74 %) provient d’autres groupes. Il s’agit d’analystes de politiques, d’experts en commerce, en développement et en affaires consulaires, d’agents des ressources humaines et des finances, de conseillers juridiques, de professionnels et d’analystes des technologies de l’information, pour n’en citer que quelques-uns. Cette évolution vers d’autres groupes professionnels peut être attribuée à divers facteurs, y compris la fusion avec l’Agence canadienne de développement international (ACDI) en 2013Note de bas de page 25 et la quasi-cessation pendant plus d’une décennie du recrutement, tant aux premiers échelons qu’à d’autres niveaux du service extérieur, en raison de contraintes financières. Faute d’un recrutement régulier, les employés du service extérieur ont continué d’être affectés à l’étranger, mais le travail qu’ils effectuaient auparavant à l’administration centrale a commencé à être accompli par des employés d’autres groupes professionnels, dont beaucoup ont été engagés en tant qu’employés occasionnels ou employés nommés pour une période déterminée. Enfin, l’élargissement des fonctions à l’administration centrale pour gérer les systèmes de technologie de l’information, assurer la sécurité du personnel à l’étranger, diriger le réseau mondial des missions (y compris la présence croissante d’autres ministères et des provinces et territoires) et gérer les demandes consulaires croissantes ont contribué à l’augmentation des postes au Canada en dehors du service extérieur.

Ces facteurs structurels ont engendré des frustrations au sein d’une partie de l’effectif. S’il est faux qu’Affaires mondiales Canada ne valorise pas l’expertise (p. ex., le Ministère a soutenu le développement de certaines des meilleures compétences au monde en matière de politique commerciale et d’analyse comparative entre les sexes), il reste que les employés travaillant dans un certain nombre de domaines du Ministère, y compris les plus jeunes, se sentent désavantagés par rapport aux employés du service extérieur. Les employés de certaines catégories ont fait part de leurs préoccupations quant au fait qu’ils avaient moins accès à la formation spécialisée, qu’ils avaient moins de possibilités d’avancement et qu’ils n’avaient pas la même priorité pour les affectations à l’étranger. Alors que le taux d’attrition moyen des cinq dernières années des employés permutants est de 3,4 % , celui des autres groupes professionnels du Ministère est de 9,9 % - presque trois fois plus. Certains employés, particulièrement les agents du service extérieur possédant une expertise approfondie dans des zones géographiques et des domaines particuliers, se sont sentis de plus en plus désavantagés au fil du temps, y compris dans les processus de promotion, où l’accent a été mis sur les compétences en matière de gestion plutôt que sur l’expertise géographique, linguistique ou liée à un domaine particulier. Plusieurs ministères des Affaires étrangères sont confrontés à la question de l’équilibre entre les généralistes et les spécialistes, et il est légitime de se demander si qu’au fil du temps Affaires mondiales Canada n’a pas trop penché en faveur des généralistes.

Les réalités vécues par le personnel recruté sur place compliquent encore la situation : cette catégorie de l’effectif représente 81 % des employés du Ministère dans les missions, et les employés recrutés sur place sont répartis dans plus de 110 pays et territoires où les lois du travail diffèrent. Ils exercent un éventail de fonctions, allant d’assistants à chauffeurs à hauts responsables de divers programmes. Tous les Canadiens qui vont travailler à l’étranger savent que le personnel recruté sur place constitue la colonne vertébrale du réseau des missions du Canada dans le monde, servant notre pays avec loyauté et courage, souvent dans des endroits très difficiles. Au fil des ans, le personnel recruté sur place a présenté un profil de compétences de plus en plus pointues qui, conjugué aux conditions du marché du travail, signale la nécessité d’examiner en profondeur le rôle optimal du personnel recruté sur place dans les différentes missions, aujourd’hui et à l’avenir, et de vérifier si Affaires mondiales Canada fait le nécessaire pour maintenir en poste et perfectionner cette composante importante de son effectif. Le Ministère doit également veiller à ce que les employés recrutés sur place bénéficient d’un niveau de diligence adéquat en période de crise, y compris au moyen de consultations avec la ministre des Affaires étrangères, les chefs de mission et les ministères partenaires concernés.

Enfin, Affaires mondiales Canada doit être un lieu où tous les employés se sentent en sécurité et respectés, et où chacun comprend que les inconduites ou les actes répréhensibles, quels qu’ils soient, ne sont en aucun cas tolérés. La création récente du Bureau de l’ombud du mieux-être, qui offrira à l’ensemble du personnel un guichet unique pour obtenir de l’information et du soutien afin de résoudre les problèmes liés au milieu de travail, constitue un nouvel investissement important dans le mieux-être de tous les employés. Le Ministère prend également des mesures supplémentaires pour appuyer l’écosystème et les processus par lesquels les allégations d’actes répréhensibles et d’inconduites sont reçues, examinées et traitées. À l’été 2023, tout en prenant les mesures requises pour protéger les renseignements personnels, le Ministère commencera à rendre compte régulièrement et de manière transparente au personnel des allégations d’actes répréhensibles et des mesures prises à la suite de ces allégations. Une culture organisationnelle positive et axée sur les personnes, fondée sur la confiance, le respect, la fierté du travail accompli et la confiance envers les dirigeants, doit être un principe fondamental d’Affaires mondiales Canada aujourd’hui et à l’avenir.

b) Comment?

Recrutement
Formation
Perfectionnement professionnel
Conditions de travail à l’étranger
Employés recrutés sur place
Chefs de mission

4.4. Veiller à ce qu’Affaires mondiales Canada dispose des outils, des processus et de la culture nécessaires pour prospérer

a) Pourquoi?

Que ce soit au Canada ou à l’étranger, l’effectif du Ministère doit être en mesure de fournir les meilleurs services et conseils, à tout moment et en tout lieu, de manière éclairée, compétente et sûre. La modernisation des processus et des outils est un élément important d’une culture organisationnelle efficace, efficiente et centrée sur les personnes. Les fonctions habilitantes, comme le réseau informatique du Ministère, et les processus opérationnels doivent être harmonisés avec la vision et les objectifs ambitieux de l’organisation, y compris lorsque les objectifs changent pour tenir compte de l’évolution du contexte international.

Les systèmes numériques et les autres systèmes de gestion de l’information et de technologie de l’information (GI-TI) du Ministère vieillissent rapidement. Les membres du personnel d’Affaires mondiales Canada le constatent chaque jour, alors que la menace réelle des cyberattaques menées par des États et des acteurs qu’ils parrainent ne cesse de croître. Bien que des investissements aient été réalisés ces dernières années pour mieux servir les Canadiens, tels que la mise en place du Système de gestion des cas des services consulaires et du Système des contrôles à l’exportation et à l’importation, les fonctionnalités du système de GI-TI continuent de poser problème dans l’ensemble de l’organisation, et en particulier dans les missions à l’étranger. L’infrastructure et la prestation de services de GI-TI doivent être continuellement maintenues, mises à niveau et améliorées pour suivre l’évolution rapide des technologies et des menaces.

Outre la nécessité de moderniser les technologies de l’information et les outils, la culture ministérielle doit également évoluer. La simplicité est préférable. Le Ministère doit en faire davantage pour s’attaquer aux politiques rigides et lourdes, et aux processus opérationnels qui entravent l’efficacité et l’innovation. S’il est facile de pointer du doigt d’autres intervenants, dans les faits, une grande partie des contraintes qui entravent le fonctionnement d’Affaires mondiales Canada ont leurs origines à l’interne. Le Ministère doit repenser la manière dont il gère les risques, y compris les conséquences involontaires d’une culture ministérielle trop peu encline à prendre des risques. Les niveaux d’examen, tant verticaux qu’horizontaux, devraient être revus, notamment en ce qui a trait à leur effet sur l’efficacité de la prise de décision. Le personnel doit avoir la faculté d’agir pour faire ce qui s’impose à tous les niveaux de responsabilité. Cela signifie que la haute direction doit faire davantage confiance au jugement des membres du personnel; cela suppose également que les employés doivent accepter une plus grande responsabilité pour agir dans l’intérêt public.

b) Comment?

5. Résumé des recommandations

Champ d’action 1 : Acquérir une nouvelle expertise en matière d’enjeux internationaux cruciaux pour l’avenir du Canada et renforcer la capacité de prévoir et de gérer les crises prolongées

Champ d’action 2 : Renforcer la capacité du Canada à exercer une influence en augmentant sa présence à l’étranger notamment aux tables multilatérales

Champ d’action 3 : Veiller à ce qu’Affaires mondiales Canada compte un personnel hautement qualifié, bilingue, diversifié, en santé et capable de produire des résultats de calibre mondial pour les Canadiens

Champ d’action 4 : Veiller à ce qu’Affaires mondiales Canada dispose des outils, des processus et de la culture nécessaires pour prospérer

6. Mise en œuvre

Ce document de travail présente des recommandations clés sur les moyens de faire en sorte qu’Affaires mondiales Canada serve la population canadienne plus efficacement aujourd’hui et à l’avenir. Toutefois, comprendre ce qu’il faut faire ne représente qu’une facette de la solution. La plupart des plans de transformation institutionnelle échouent, non pas parce que les recommandations étaient erronées, mais plutôt parce qu’elles n’ont pas été mises en œuvre comme il se doit ou dans leur intégralité.

Le sous-ministre des Affaires étrangères devrait se voir confier la responsabilité globale de veiller à la réussite de l’initiative l’Avenir de la diplomatie : Transformer Affaires mondiales Canada, et les progrès réalisés en la matière devraient constituer un élément clé de son entente annuelle de gestion du rendement.

Le Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international du Sénat publiera en décembre 2023 un rapport à la suite de son étude sur « le service extérieur canadien et d’autres éléments de l’appareil de politique étrangère au sein d’Affaires mondiales Canada ». Le Ministère étudiera ce rapport et les recommandations qui y seront formulées et adaptera ses plans au besoin.

Pour lancer la phase de mise en œuvre de cette initiative, le sous-ministre des Affaires étrangères a déjà nommé un cadre supérieur, Antoine Chevrier, dirigeant principal de la transformation, pour superviser le processus de changement pendant une période initiale de 3 ans (2023-2026). M. Chevrier rendra compte directement au sous-ministre des Affaires étrangères et, à travers une structure matricielle, aux sous-ministres du Commerce international et du Développement international.

Pour que les recommandations figurant dans le présent rapport soient appliquées avec succès, il faudra affecter allouer de nouvelles ressources et procéder activement à des réaffectations des ressources financières existantes. Comme il a été mentionné plus tôt, le Ministère a déjà entamé un important exercice de réaffectation et est en train de mettre des processus en place pour procéder à de tels exercices de manière continue, en fonction de l’évolution de la situation des circonstances. Dans l’ensemble, il faut trouver des mesures incitatives à tous les échelons du Ministère pour récompenser la prise en compte des coûts en faveur du plus vaste dans le concept plus vaste d’harmonisation stratégique.

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