Analyse comparative entre les sexes
Qu'est-ce que l'analyse comparative entre les sexes?
L'analyse comparative entre les sexes comprend une variété de méthodes visant à éclairer les relations entre les hommes et les femmes, leur accès aux ressources, leurs activités et les difficultés qu'ils éprouvent les uns à l'égard des autres. Les données fournies par l'analyse comparative entre les sexes soulignent l'importance de la problématique homme-femme et de ses relations avec divers facteurs, notamment la race, l'ethnie, la culture, la classe sociale, l'âge ou l'incapacité, pour comprendre les différences entre les sexes dans les modes d'engagement, les comportements et les activités au sein des structures économiques, sociales et juridiques.
L'analyse comparative entre les sexes est un élément essentiel de l'analyse socio-économique. En effet, dans une analyse socio-économique complète, on ne manquera pas de prendre en considération les relations entre les sexes, puisqu'il s'agit d'un facteur digne d'intérêt dans toutes les relations sociales et économiques. L'analyse comparative entre les sexes renseigne sur les conditions des femmes et des hommes et sur les effets dissemblables que peuvent avoir sur eux les politiques et les programmes en raison même de leur situation particulière. En se fondant sur ces informations, on peut améliorer les politiques et les programmes et garantir ainsi la satisfaction des besoins propres à chacun des deux sexes.
Au niveau local, l'analyse comparative entre les sexes met en évidence les rôles variés des femmes et des hommes, des filles et des garçons dans la famille, la collectivité, ainsi que dans les structures économiques, juridiques et politiques. La problématique homme-femme insiste sur les causes de l'actuelle répartition des responsabilités et des avantages, et sur l'effet de cette répartition sur la distribution des récompenses et des stimulants.
L'analyse comparative entre les sexes et la coopération au développement
Comprendre les relations socio-économiques, incluant les relations entre les sexes, fait partie intégrante de l'analyse des politiques; cette démarche se révèle essentielle dans l'élaboration et la mise en oeuvre efficace d'initiatives de coopération au développement. En analysant les situations des hommes et des femmes, on peut mieux comprendre les effets dissemblables que peuvent avoir, sur chacun des deux sexes, les lois, les pratiques culturelles, les politiques et les programmes.
L'analyse comparative entre les sexes fournit des données qui nous permettent de comprendre les différences en fonction du sexe dans l'accès aux ressources et la maîtrise de ces dernières, ce qui est utile pour régler les problèmes de disparités, pour corriger les iniquités systémiques (en défaveur des femmes le plus souvent) et mettre au point des solutions efficaces et équitables. Les données réunies à l'étape de la recherche doivent faire ressortir les différences homme-femme (recours aux données ventilées par sexe), afin que les politiques, les programmes et les projets donnent lieu à des interventions efficaces qui favorisent l'égalité. Puisque les relations entre les sexes se modifient au fil du temps et selon le contexte, il importe de procéder à une nouvelle analyse pour chaque projet de développement.
Ce type d'analyse nous éclaire également sur les moyens de promouvoir l'égalité entre les sexes dans le cadre du développement durable tout en atteignant le plus efficacement possible les buts du développement. Pour ce faire, l'analyse comparative entre les sexes doit faire partie de toutes les étapes du projet de développement, c'est-à-dire de la conception à la mise en oeuvre et à l'évaluation. C'est ainsi que des changements se sont déjà opérés au sein des stratégies de coopération au développement qui ne répondaient pas aux besoins des femmes.
La section 6 de la Politique en matière d'égalité entre les sexes, intitulée L'analyse entre les sexes: un instrument, met en évidence quelques considérations importantes.
Que peut nous révéler l'analyse comparative entre les sexes?
Une analyse comparative entre les sexes peut nous révéler qui a accès à une nouvelle activité, qui en a la maîtrise et qui en bénéficie; elle peut également nous apprendre qui est le plus susceptible d'y perdre. Ce type d'analyse incite à s'interroger sur les raisons qui expliquent l'évolution d'une situation donnée. Il peut nous amener aussi à explorer des hypothèses concernant certaines questions, comme la répartition des ressources et le poids de la culture et des traditions. Cette analyse fournit en outre des données sur les éventuels avantages directs ou indirects d'un projet de développement sur les hommes et les femmes; on peut également en tirer des éléments de mesure qui favoriseront l'égalité dans un contexte particulier ou des mécanismes permettant de modifier ou de maintenir la division actuelle du travail en fonction du sexe dans le cadre d'un projet. En se fondant sur ces données, il est possible d'élaborer des mesures propres à promouvoir l'égalité et à combler les disparités.
Dans le cas de l'éducation primaire, l'analyse comparative entre les sexes peut signaler l'existence d'un fossé entre les sexes dans la plupart des pays, c'est-à-dire un écart entre les filles et les garçons en ce qui touche aux taux d'inscription et de persévérance. Dans la majorité des pays où l'on observe un écart, les disparités sont en défaveur des filles; dans d'autres au contraire, ce sont les garçons qui affichent un retard. En Inde, une fillette de six ans peut espérer fréquenter l'école pendant une moyenne de six ans, soit trois années de moins qu'un garçon du même âge. Les filles des régions rurales sont encore plus désavantagées, puisqu'elles sont trois fois plus susceptibles que les garçons d'abandonner l'école. En Jamaîque, en revanche, ce sont les garçons qui risquent le plus d'accuser un retard scolaire. On les retire en effet souvent des bancs d'école pour les envoyer travailler afin de compléter le revenu familial, ce qui explique le taux d'abandon plus élevé chez les garçons. Soucieux de pourvoir aux besoins des enfants des deux sexes, les gouvernements font de plus en plus appel à l'analyse comparative entre les sexes. Ils tentent ainsi de comprendre l'origine des disparités et de mettre au point des mesures susceptibles de réduire les iniquités dans le système éducatif.
Dans quels cas recourt-on à l'analyse comparative entre les sexes?
La coopération au développement concerne toujours des individus. Affaires mondiales Canada exige que l'on procède à une analyse comparative entre les sexes qui prend en considération les liens existants entre la problématique homme-femme et divers facteurs — tels que la race, l'ethnie, la culture, l'âge ou l'incapacité — dans toutes ses politiques, programmes et projets. Bien que la participation des gens soit plus manifeste dans des activités concrètes et pratiques, comme un projet de renforcement des capacités destiné aux autorités locales, toute politique ou programme aura, en fin de compte, des répercussions sur les gens et doit donc s'efforcer de favoriser l'égalité homme-femme.
Les concepteurs d'une politique environnementale doivent, par exemple, entreprendre une analyse socio-économique globale qui inclut les relations entre les sexes, afin de bien comprendre la situation et de s'assurer que la politique et ses directives favoriseront l'égalité. Cela pourrait nécessiter une étude des perceptions qu'ont les hommes et les femmes de leur environnement, ou la collecte de données ventilées par sexe sur les activités entreprises et leurs effets sur l'environnement, ainsi que sur les utilisations des ressources naturelles, comme la terre et l'eau.
La contribution de nombreuses femmes à l'économie n'est toujours pas reconnue parce que leur travail ne peut aisément être comptabilisé au sein des structures classiques. Les femmes travaillent en majorité dans le secteur non structuré et à la maison, de sorte que leur participation n'est pas prise en compte ou est sous-représentée dans les statistiques officielles. En omettant d'intégrer l'analyse comparative entre les sexes aux politiques économiques, on risque de laisser complètement de côté les priorités et les perspectives des femmes dans les stratégies de développement.
À quelle étape du processus procède-t-on à l'analyse comparative entre les sexes?
L'analyse comparative entre les sexes se poursuit tout au long du processus de développement : recherche, définition du problème, planification, mise en oeuvre, suivi et évaluation. En examinant les hypothèses de base à chaque étape du processus, on peut saisir les relations entre le contexte social et les facteurs économiques et mettre au point des interventions qui satisfont à ces besoins. Les projets financés par Affaires mondiales Canada doivent comprendre une analyse comparative entre les sexes à l'étape de la planification et intégrer les résultats et les recommandations à toutes les étapes ultérieures, jusqu'à l'évaluation.
Au Brésil, par exemple, le programme de formation technique du SENAI (Serviço Nacional de Aprendizagem Industrial — centre national d'apprentissage industriel) s'est fondé sur l'analyse comparative entre les sexes depuis le début pour remédier à la sous-représentation des étudiantes. Le programme comprend donc une campagne de sensibilisation ciblant la population étudiante et le secteur privé : on a présenté du matériel de promotion illustrant des femmes dans des rôles non traditionnels — des affiches montrant des travailleuses en construction, par exemple. Cette prise en compte des besoins des femmes tout au long du processus s'est traduite par une montée en flèche de 13,5 % à 31,3 % de la proportion de femmes dans les cours techniques en sept ans.
Qui doit se charger de l'analyse comparative entre les sexes?
La responsabilité de travailler en collaboration avec les femmes et les hommes afin de tendre à l'égalité entre les sexes incombe aux analystes, aux décideurs et aux gestionnaires de programmes, qu'ils proviennent des pays donateurs ou des pays partenaires, des gouvernements ou de la société civile. Ce processus de participation fournit le contexte dans lequel on conçoit, on met en oeuvre et on évalue les initiatives de développement afin de favoriser l'égalité homme-femme. Dans le cadre de l'analyse comparative entre les sexes, on devrait en outre recenser les initiatives locales et nationales entreprises tant par les gouvernements que par la société civile afin de pouvoir compléter et affermir ces efforts.
On doit inclure, dès le début du processus, tous les individus, les groupes et les collectivités touchés par l'activité de développement afin de pouvoir bien circonscrire la composante homme-femme dans la situation en question. Sans les connaissances et les compétences de la collectivité locale, il peut se révéler difficile de saisir dans toute leur complexité les relations sociales et les rôles homme-femme.
Les organisations apportant une aide alimentaire aux membres vulnérables chez les Dinka du Sud du Soudan se sont heurtées à un sérieux obstacle. En effet, les responsables de ces organisations ont été pris de cours quand les mères ont commencé à retirer volontairement du programme d'alimentation thérapeutique leurs enfants malnutris. Ils ont alors remis en question leurs propres conceptions de la vulnérabilité des gens et leur mode de distribution de l'aide alimentaire. Ils ont ensuite mis sur pied des séances de discussion entre les membres des organisations d'aide et les hommes et les femmes qui prenaient part aux décisions en matière d'alimentation dans les collectivités locales. Ces séances ont mis en lumière les différences qui existaient entre les organisations et les collectivités sur les plans de la définition des besoins et des modes de distribution de l'aide. Par exemple, tant les Dinka que les organisations comptaient les veuves et les handicapés au nombre des personnes vulnérables. En revanche, les Dinka incluaient également dans ce groupe les agriculteurs et les pêcheurs des deux sexes dépourvus, respectivement, de bétail ou de poissons, ainsi que les hommes et les femmes sans filles. La stratégie des donateurs consiste souvent à fournir une aide alimentaire à un enfant d'une famille alors que les Dinka considèrent que tout cadeau doit être partagé au sein de la famille et du clan. Ces échanges ont permis de mettre au point des méthodes prenant en compte les définitions locales des atouts sociaux et d'adopter un mode de distribution plus conforme aux pratiques locales.
Les éléments de l'analyse comparative entre les sexes
Pour que l'analyse comparative entre les sexes soit fructueuse, il faut disposer des ressources et avoir la volonté de mettre en oeuvre les résultats de l'analyse. Examinons ces trois points importants :
- L'analyse nécessite des spécialistes compétents et des ressources adéquates.
- L'analyse bénéficie de l'expertise locale.
- Les résultats doivent servir à concevoir les politiques, les programmes et les projets.
La première étape de l'analyse comparative entre les sexes consiste à examiner la question sous l'angle général des relations et des rôles homme-femme. La collecte des renseignements susceptibles d'accroître la compréhension de cette problématique dans un contexte donné implique de poser des questions difficiles. Lors de la recherche, il convient de se demander si l'on va à l'encontre d'une répartition homme-femme existante sur les plans du travail, des tâches, des responsabilités et des possibilités. Qui sont les bénéficiaires visés par la politique, le programme ou le projet proposés et quelles personnes pourraient se voir désavantagées? On doit alors consulter autant les hommes que les femmes afin que tous aient la possibilité d'exposer leur définition de la solution. Il ne faut pas perdre de vue les répercussions à long terme de la politique, du programme ou du projet sur l'égalité des femmes avec les hommes et sur les moyens de donner à ces dernières une maîtrise accrue sur leur vie.
Prenons l'exemple de la mortalité maternelle. Chaque année, quelque 585 000 femmes meurent dans le monde à la suite d'une grossesse ou d'un accouchement (OMS, 2000). Une approche purement médicale ne remédie que partiellement à cette situation tragique et complexe. En revanche, on peut réduire la mortalité maternelle et transformer son caractère récurrent en élargissant les moyens d'action et en se préoccupant de questions d'équité, comme le mariage des enfants, l'accès limité aux services de santé génésique et de planification familiale, la mutilation génitale des femmes et la coutume selon laquelle les femmes et les filles mangent en dernier et se servent en moindre quantité. Examiner un problème à la lumière de l'analyse comparative entre les sexes permet à la fois de mieux comprendre les enjeux auxquels les femmes sont confrontées et d'élargir la gamme de solutions possibles.
Les instruments de l'analyse comparative entre les sexes
On a élaboré une variété d'instruments pour venir en aide aux personnes qui posent ces questions. Chacun de ces différents instruments comporte ses avantages et ses inconvénients; certains prennent davantage en considération d'autres caractéristiques ou facteurs sociaux, tandis que d'autres adoptent une démarche plus participative. En voici quelques exemples.
Le cadre analytique de Harvard () (en anglais) permet de collecter des données au niveau de la collectivité et du foyer. Il comprend trois composantes principales : un volet activité (qui fait quoi?); un volet accès et maîtrise (qui a accès à quoi et qui maîtrise quoi?); enfin une analyse des facteurs déterminants (comment la problématique homme-femme influence-t-elle les deux volets précédents?).
Le Module 1 du site « SEAPAT's Online Gender Learning & Information » de l'Organisation internationale du Travail, intitulé (approches et stratégies de planification en matière d'égalité entre les sexes) (en anglais) propose des descriptions de divers instruments : Harvard Analytical Framework, Moser's Gender Planning Framework, Women's Empowerment Framework et Social Relations Framework.
Quels que soient l'instrument ou la méthode utilisés, l'information doit traduire les différences entre les hommes et les femmes, les garçons et les filles. On doit s'interroger sur les causes de ces différences. Sans cela, les initiatives de développement échoueront dans leur tentative d'instaurer un développement durable.
La Politique de en matière d'égalité entre les sexes fournit, dans la section intitulée Lignes directrices relatives à l'analyse comparative entre les sexes, quelques indices sur les questions à poser et les façons de procéder lorsque l'on effectue une analyse de ce genre.
Sites connexes
La Politique sur l'analyse comparative de l'égalité des sexes d' fournit un guide utile des questions à poser. (PDF, 891 Ko, 12 pages)
Sources:
- (en anglais)
- (PDF, 274 Ko, 94 pages)
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