Débat ouvert sur les méthodes de travail du Conseil de sécurité
Conseil de sécurité des Nations Unies
Déclaration prononcée par l’Ambassadeur Marc-André Blanchard
Représentant permanent du Canada auprès des Nations Unies
New York, le 6 juin 2019
Monsieur le président/Madame la présidente,
Je tiens à remercier le Koweït pour l’organisation de ce débat public et son leadership dans l’amélioration des méthodes de travail du Conseil.
J’aimerais aussi remercier Mme Landgren et M. Cockayne pour leurs exposés éclairants.
Le débat d’aujourd’hui est une excellente occasion de se pencher sur le fonctionnement d’une instance qui a été confié par les membres de l’ONU de veiller au maintien de la paix et de la sécurité internationale.
C'est pourquoi le Canada se félicite de la déclaration commune des dix membres élus du Conseil de sécurité et s'aligne sur son contenu.
Nous pensons souvent que le Conseil est une institution figée. En réalité, la Charte des Nations Unies offre la souplesse voulue pour lui permettre d’évoluer et de s’adapter en fonction des besoins.
En affinant ses méthodes de travail, nous continuons à transposer un document papier en une institution vivante.
Le Canada est fermement convaincu que le Conseil peut et doit évoluer pour mieux répondre aux besoins et pour être plus effectif et transparent.
En effet, depuis la création des Nations Unies, le nombre d’États membres a augmenté de 278%.
Ces vingt dernières années, le nombre d’organes subsidiaires du Conseil a triplé.
Dans le même temps, les nouvelles technologies de l’information et des communications ont renforcé la capacité des institutions internationales à faire preuve de transparence, en plus d’accroître les attentes à cet égard.
Et, comme les pays représentés ici le savent sûrement, les réalités géopolitiques ont changé considérablement depuis la naissance des Nations Unies, si bien que les membres élus s’attendent, à juste titre, à pouvoir participer de manière tangible aux travaux du Conseil.
Il reste encore beaucoup à faire pour rendre le Conseil de sécurité plus démocratique, inclusif et représentatif.
Fondamentalement, en améliorant les méthodes de travail du Conseil de sécurité, nous renforçons aussi les institutions multilatérales qui sous-tendent l’ordre international fondé sur des règles.
D’abord et avant tout, ces méthodes devraient permettre aux membres élus de participer pleinement aux prises de décisions collectives.
Les membres élus confèrent une légitimité au Conseil de sécurité, tout en apportant une diversité d’idées et de points de vue. Au fil des ans, ils ont été les moteurs de l’innovation dans cette enceinte.
Toutefois, pour tirer parti des avantages de cette diversité, les nouveaux membres élus doivent avoir accès à l’information et la capacité d’agir en se fondant sur celle-ci.
C’est ainsi qu’ils doivent pouvoir prendre connaissance des documents du Conseil et être au courant de ses consultations dès que possible après leur élection.
En outre, comme certains membres élus, le Canada estime qu’il faut accroître la consultation, la transparence et le partage des responsabilités en ce qui concerne la distribution des présidences de ses organes subsidiaires.
De même, le Conseil devrait renoncer à la pratique informelle qui consiste, pour certains membres, à exercer un monopole implicite en ce qui a trait à la rédaction de résolutions, souvent sans grande consultation, voire aucune, ni contribution concrète des membres élus ou des présidents des comités concernés. Cette pratique n’est ni démocratique ni fondée sur la Charte des Nations Unies.
Nous savons que la transparence améliore généralement la qualité de la gouvernance et des prises de décisions.
Des procédures équitables et claires et le respect d'une procédure régulière devraient donc guider la mise en œuvre des régimes de sanctions du Conseil de sécurité, et nous appuyons le rôle du médiateur à cet égard.
De plus, le Canada estime que le Conseil de sécurité doit tenir des réunions publiques, dans toute la mesure du possible. Il faut aussi prévoir la tenue régulière de dialogues interactifs informels dans le programme de travail mensuel, en plus de mieux codifier les règles de fonctionnement du Conseil, telles qu’elles sont établies.
Le Conseil de sécurité peut contribuer davantage à prévenir les conflits grâce à des tours d’horizon prospectifs et réguliers par le Secrétariat, et à un plus grand nombre de séances d’information par les chefs des bureaux politiques régionaux. Pour ces séances, il faudra constamment tenir compte des considérations liées au genre et au climat pour mieux refléter les réalités sur le terrain.
Le Conseil peut aussi faire plus pour institutionnaliser les liens avec la Commission de consolidation de la paix. Nous saluons la pratique qui consiste à tenir des dialogues interactifs informels avec la Commission et le Conseil sur les pays et les régions où ces deux organes jouent un rôle important, comme au Sahel. En outre, le Conseil pourrait envisager d’inviter le président de la Commission ou les présidents des formations de la Commission propre à un pays à se joindre aux missions du Conseil dans les pays où les deux organes sont présents.
Le Conseil devrait examiner la possibilité que la Commission soit saisie en permanence de la situation dans les pays en transition après une mission onusienne. De cette façon, la nécessité de s’attaquer aux causes profondes des conflits et des menaces à long terme pour la paix fera l’objet de l’attention nécessaire afin d'éviter les rechutes et la nécessité d'un retour des casques bleus.
Un élément crucial de l'évolution du Conseil de sécurité doit être la limitation de l'utilisation et de la menace du recours au veto. Le Canada demande à tous ceux qui ne l'ont pas encore fait de se joindre à l'initiative franco-mexicaine et au Code de conduite de l'ACT concernant l'action du Conseil de sécurité contre le génocide, les crimes contre l'humanité ou les crimes de guerre.
Madame, Monsieur le Président,
Selon le Canada, outre les mesures progressives recommandées dans la note 507 du Conseil de sécurité, il reste encore beaucoup à faire pour que cette instance tienne compte de l’égalité des genres.
Par la voie de résolutions et de déclarations, ses membres ont souligné l’importance de la participation égale des femmes, y compris leur pleine participation à tous les efforts de maintien et de promotion de la paix et de la sécurité.
Or, bien que les femmes représentent la moitié de la population mondiale, elles sont très peu représentées à cette table et constituent une minorité parmi les intervenants au Conseil.
Par conséquent, nous saluons les efforts visant à accroître le nombre d’intervenantes de la société civile au Conseil de sécurité pour les questions géographiques et thématiques figurant à l’ordre du jour. Il est essentiel que celles-ci puissent se faire entendre.
Qui plus est, nous nous réjouissons des efforts déployés à l’initiative du Koweït en faveur de l’utilisation de pronoms neutres et d’autres formules dans les documents onusiens.
La création d’un groupe d’experts informel du Conseil de sécurité sur les FPS est un pas important dans la bonne direction. Il faut le mettre pleinement à contribution, avec la participation de tous les membres du Conseil, pour mieux prendre en compte les considérations liées au genre dans les débats, les résolutions et les mandats des missions.
Lorsque le Conseil de sécurité se rend sur le terrain, il devrait rencontrer des groupes de femmes de la société civile. Idéalement, ces rencontres devraient figurer dans le programme des visites.
S’il est élu au Conseil de sécurité en 2021-2022, le Canada veillera à ce que le multiculturalisme soit bénéfique pour tous.
Merci.
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